Élection américaine : le ton monte encore d'un cran et les efforts se concentrent sur les États clés
Alors qu'il ne reste plus que quinze jours avant le scrutin du 5 novembre, Donald Trump et Kamala Harris multiplient les déplacements dans les Swing States, et notamment en Pennsylvanie, l'un des plus surveillés cette année. Le républicain et la démocrate ont fait campagne sur leurs thèmes favoris : pour le premier, l'économie dans un contexte d'inflation rampante, et pour la démocrate, le droit à l'avortement, interdit dans une vingtaine d'États depuis une décision de la Cour Suprême acquise aux républicains.
Haro sur la Pennsylvanie
Les efforts des deux camps semblent se concentrer dans cette dernière ligne droite sur la Pennsylvanie. Cet État de la rust belt, ancien bastion industriel frappé de plein fouet par les délocalisations, est le plus visité par les campagnes depuis l'entrée en lice de la vice-présidente dans la course à la Maison Blanche. Depuis juillet, les deux candidats et leurs colistiers respectifs ont organisé une cinquantaine de visites dans le Keystone State [état clé de voûte]. Il tient une place de choix cette année : avec 19 délégués à la clé, contre 16 pour la Géorgie et 15 pour le Michigan, c'est le Swing State le plus précieux.
Dans les sondages qui prennent en compte le Keystone state, Kamala Harris et Donald Trump sont au coude à coude. Selon le New York Times, Donald Trump aurait rattrapé son retard en Pennsylvanie, et les deux candidats seraient à égalité (48 % chacun, dernier sondage en date du 21 octobre).
Ce qui explique que ce soit dans cet État que deux camps ont investi le plus d'argent dans des publicités. "Les campagnes dépensent ici sans compter. On ne peut presque plus allumer la télévision ou faire défiler son téléphone sans tomber sur une publicité virulente", raconte un correspondant du New York Times en reportage dans le Keystone State.
Pour financer ces opérations ciblées et intensives, les campagnes ont besoin de fonds. La vice-présidente est parvenue à lever un total de 1 milliard de dollars en trois mois seulement, mais elle a encore besoin d'argent pour l'aider dans cette dernière ligne droite et fait ainsi appel aux dons des particuliers. La campagne de Trump est certes moins riche, mais elle bénéficie depuis peu du soutien financier et opérationnel d'Elon Musk. Le patron de Space X a donné 75 milliards de dollars à un Super PAC dédié à aider le républicain. Il multiplie les opérations pour inciter les républicains à s'inscrire sur les listes électorales.
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Elon Musk ne se limite désormais plus à faire des publications sur réseaux sociaux et mettre la main au portefeuille : il fait campagne pour Donald Trump sur le terrain. Il a d'ores et déjà organisé quatre rallyes en Pennsylvanie et a promis samedi 19 octobre de verser 1 million de dollars chaque jour à un électeur d'un État clé qui aura signé sa pétition en faveur de la liberté d'expression et du droit à porter des armes.
Une "vice-présidente de mer**", un milliardaire qui "divague"
Dimanche 20 octobre, Donald Trump a tenu un meeting dans la ville de Latrobe, à l'est de Pittsburg. "Vous devez dire à Kamala Harris que vous en avez assez, que vous ne pouvez plus le supporter, on ne te supporte plus, tu es une vice-présidente de m***", a lancé le républicain à une foule en délire. "La pire. Tu es la pire vice-présidente. Kamala, tu es virée ! Sors d'ici !". Un niveau de violence rarement atteint dans une élection présidentielle. Il a par ailleurs dénoncé le bilan économique de l'administration Biden-Harris, selon lui un "cauchemar d'inflation, d'invasion et d'humiliation".
La veille, depuis Atlanta, dans l'État clé de Géorgie, la candidate démocrate avait provoqué le milliardaire, pointant du doigt le fait qu'il ne "se concentre que sur lui-même, et maintenant, il évite les débats et annule des interviews à cause de la fatigue". "Quand il répond à une question ou parle lors d'un rassemblement, avez-vous remarqué qu'il a tendance à sortir du script, à divaguer et, en général, il n'arrive absolument pas à terminer une idée ?", s'était moquée la vice-présidente.
Elle a ajouté que Donald Trump était "cruel" dans sa manière de traiter le décès d'une jeune femme qui avait attendu vingt heures pour qu'un hôpital traite ses complications liées à une pilule abortive en Géorgie, État dont les lois sont très restrictives en matière d'avortement depuis le renversement de la jurisprudence Roe vs Wade grâce aux trois juges conservateurs nommés par Donald Trump. Elle a placé la lutte contre les restrictions aux soins reproductifs au centre de son discours aux électeurs de l'État clé.
Si vous l'avez raté cette semaine :
- Sur Fox News, Kamala Harris prend ses distances avec le bilan de Joe Biden
Kamala Harris a tenu mercredi 16 octobre à préciser que sa présidence ne serait pas "une continuation" de celle de Joe Biden, lors d'une interview tendue sur Fox News, la chaîne favorite des conservateurs américains. "Comme chaque nouveau dirigeant qui prend ses fonctions, j'apporterai mon vécu, mes expériences professionnelles et des idées nouvelles", a affirmé la candidate démocrate. La vice-présidente a dû ménager la chèvre et le chou – souhaitant prendre ses distances avec un locataire de la Maison Blanche impopulaire, sans pour autant renier son héritage. "Je représente une nouvelle génération de leaders", a-t-elle insisté.
- Trump à la fenêtre d'un McDonald's
Le 45ᵉ président des États-Unis a profité lundi 21 octobre de son étape en Pennsylvanie, pour apparaître à la fenêtre d'un restaurant Mcdonald's à Feasterville-Trevose, en périphérie de Philadelphie. Cette opération étonnante visait à se moquer de la vice-présidente, qui affirme avoir eu un job d'été chez la célèbre enseigne de fastfood en 1983, alors qu'elle était étudiante, près d'Oakland en Californie.
Donald Trump avait accusé à plusieurs reprises la candidate démocrate d'avoir menti par opportunisme électoral à ce sujet. "J'ai désormais travaillé quinze minutes de plus que Kamala, elle n'a jamais travaillé ici", a-t-il lancé après un quart d'heure passé à manier la friteuse et à servir les clients. Ni sa campagne, ni celle de Kamala Harris, n'ont apporté d'éléments factuels à ce sujet. Mais le milliardaire le sait, ce genre de petit boulot est une étape cruciale dans la vie de millions d'Américains, qui peuvent ainsi s'identifier à lui. Connu pour son amour des hamburgers, Donald Trump a pu se mettre en scène tablier et cornet de frite à la main.
- Kamala Harris fête son anniversaire dans une église
La vice-présidente a célébré ses 60 ans en Géorgie, État où elle tente de séduire l'électorat afro-américain. Elle a reçu le soutien du chanteur Stevie Wonder, qui lui a chanté son célèbre "Happy Birthday" dans une église près d'Atlanta.
Le point sur les sondages : rien n'est joué
Les sondages continuent de prédire une élection historiquement serrée. Les deux candidats se tiennent à 1 point d'écart au niveau national, avec 49 % pour Kamala Harris et 48 % pour Trump, selon l'agrégateur de sondages du New York Times. Dans les Swing States, qui feront l'élection le 5 novembre prochain, aucun des deux ne semble véritablement tirer son épingle du jeu. Ils se tiennent à un point d'écart dans tous les Swing States, sauf en Arizona, où le milliardaire semble avoir pris une courte avance de deux points.
Il faut prendre ces prévisions avec des pincettes, les sondeurs et les médias faisant face à des problèmes économiques ces dernières années et à la difficulté de comptabiliser le vote Trump.
