En Ukraine et en Russie, un déluge de feu ininterrompu depuis plusieurs jours

Les attaques s'intensifient côté russe comme côté ukrainien. Dans l'est de l'Ukraine, une frappe russe a "endommagé" un barrage sur le réservoir de Kourakhové, provoquant une importante montée du niveau des eaux sur une rivière et créant une "menace" d'inondations pour des localités voisines, a affirmé lundi 11 novembre le gouverneur local.

"Les Russes ont endommagé le barrage du réservoir de Kourakhové", a déclaré Vadym Filachkine sur Telegram. "Cette attaque menace potentiellement les habitants des localités situées sur la rivière Vovtcha dans les régions de Donetsk et de Dnipropetrovsk", a-t-il ajouté alors que le niveau de cette rivière près du village de Velyka Novossilka "est monté de 1,2 mètre". Une attaque qui rappelle celle sur l'énorme barrage de la région de Kherson (sud de l'Ukraine), dont la destruction partielle en juin 2023 avait causé la mort de dizaines de personnes dans l'inondation de plusieurs villages sur les rives du fleuve Dniepr.

De l'autre côté de la frontière, les troupes russes tentent de reprendre les territoires conquis par Kiev dans la région de Koursk (ouest de la Russie). Moscou a envoyé des dizaines de milliers de soldats dans la zone frontalière avec l'Ukraine, a déclaré lundi Oleksandr Syrsky, commandant en chef de l'armée ukrainienne.

"Conformément aux ordres de leurs chefs militaires, ils tentent de déloger nos troupes et d'avancer profondément dans le territoire que nous contrôlons", a-t-il écrit sur Telegram.

Les troupes ukrainiennes avaient lancé, en août dernier, une incursion dans la région frontalière russe de Koursk, prenant le contrôle d'un certain nombre de localités.

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Depuis l'entretien entre Donald Trump et le président ukrainien Volodymyr Zelensky, qui avait "convenu de maintenir un dialogue étroit" avec le nouveau président américain, les affrontements entre la Russie et l'Ukraine ne connaissent aucun répit.

"La réalité quotidienne du peuple ukrainien"

Lundi, la Russie a attaqué les villes ukrainiennes de Nikopol et Kryvyï Rig, dans la région de Dnipropetrovsk (centre-est), selon les autorités ukrainiennes.

À Nikopol, deux personnes ont été tuées et cinq autres ont été blessées par des tirs d'artillerie russe, a indiqué le gouverneur régional, Serguiï Lyssak.

Plus tôt, à Kryvyï Rig, un missile russe a détruit une section d'un immeuble résidentiel, faisant, selon le gouverneur, au moins 14 blessés dans ce centre industriel, ville natale du président Volodymyr Zelensky. Une femme et trois enfants se trouvent sans doute sous les décombres, a précisé Serguiï Lyssak, selon lequel les secouristes continuent leur travail sur le site.

Cette photographie prise et publiée par les services d'urgence ukrainiens le 11 novembre 2024 montre un bâtiment endommagé après une frappe russe à Kryvyÿ Rig, dans la région de Dnipropetrovsk.
Cette photographie prise et publiée par les services d'urgence ukrainiens le 11 novembre 2024 montre un bâtiment résidentiel lourdement endommagé après une frappe russe à Kryvyÿ Rig, dans la région de Dnipropetrovsk. © AFP

Sur Telegram, le chef de l'administration militaire de l'oblast de Donetsk, Vadym Filachkine, a quant à lui annoncé que deux personnes étaient mortes et que plusieurs autres avaient été blessées dans des bombardements ayant visé les villes de Pokrovsk et Kramatorsk.

Ces frappes sont survenues pendant la visite en Ukraine du chef de la diplomatie européenne Josep Borrell, qui a lui-même dû descendre dans un abri antibombes à Kiev en raison d'une attaque sur la capitale.

"Je commence ma journée à Kiev dans l'abri, alors que la Russie déclenche une nouvelle attaque de missiles. C'est la réalité quotidienne du peuple ukrainien", a-t-il écrit sur X.

Lundi matin, des alertes aériennes ont été déclenchées dans presque tout le pays en raison du décollage d'un grand nombre de bombardiers russes, après une série de frappes ayant fait au moins six morts dans la nuit dans le sud du pays.

"Attention ! Danger de missiles dans toute l'Ukraine ! Décollage de MiG-31K", a écrit l'armée de l'air ukrainienne dans un message sur Telegram. Elle a également annoncé que huit bombardiers stratégiques Tupolev Tu-95 se dirigeaient vers l'Ukraine.

Dans le courant de la nuit, au moins six personnes ont été tuées et une vingtaine d'autres blessées dans des attaques russes à Mykolaïv et Zaporijjia, dans le sud du pays, selon les autorités locales.

"Des incendies se sont déclarés dans des immeubles résidentiels de la ville et tous les services d'urgence sont sur le terrain", a indiqué sur Telegram le gouverneur de la région de Mykolaïv, Vitaliy Kim, faisant état de cinq morts et d'un blessé.

"Les Russes ont à nouveau attaqué notre ville avec des drones", avait déclaré auparavant le maire de Mykolaïv, Oleksandr Senkevitch, également sur Telegram.

"Chaque jour, chaque nuit, la Russie commet les mêmes actes de terreur", a par ailleurs écrit Volodymyr Zelensky dans un message publié sur Telegram. "Sauf qu'un nombre croissant de civils deviennent des cibles."

Cette photographie prise et publiée par les services d'urgence ukrainiens le 11 novembre 2024 montre un secouriste travaillant sur le site d'une frappe nocturne russe à Mykolaïv, le 11 novembre 2024.
Cette photographie prise et publiée par les services d'urgence ukrainiens le 11 novembre 2024 montre un secouriste travaillant sur le site d'une frappe nocturne russe à Mykolaïv, le 11 novembre 2024. © AFP

La veille, dans la nuit de samedi à dimanche, l'Ukraine avait déjà été visée par une attaque de 145 drones russes. Un "record", selon le président ukrainien Volodymyr Zelensky.

"Au cours de la semaine, la Russie a utilisé plus de 800 bombes aériennes guidées, environ 600 drones de frappe et près de 20 missiles de différents types", ajoutait-il dans un message publié sur X. "On ne peut pas mettre fin à ce genre de terrorisme avec des mots, et on ne peut pas simplement oublier le meurtre d’enfants et la perte d’êtres chers."

Dans un communiqué, l'armée de l'air ukrainienne a indiqué qu'à 9 h 30 (7 h 30 GMT), 62 de ces 145 drones avaient été neutralisés au-dessus de 13 régions du pays.

"Attaque massive" sur la région de Moscou

En réponse à cette attaque de drones russes, et quatre jours après une autre attaque russe sur Kiev – visée quasiment quotidiennement depuis un mois –, la région de Moscou a elle-même été la cible, dimanche matin, d'une attaque de drones ukrainiens d'une ampleur inédite depuis le début du conflit, avec une trentaine d'appareils abattus selon les autorités russes, qui ont précisé qu'une femme avait été blessée.

Le ministère russe de la Défense a annoncé sur Telegram avoir "déjoué une tentative d'attaque terroriste par le régime de Kiev" en détruisant un total de 70 drones dans la matinée, dont 34 dans la région de Moscou.

Les autres ont été abattus dans les régions de Kalouga (7) et Toula (2) – limitrophes de Moscou –, et dans trois régions frontalières de l'Ukraine : celles de Briansk (14), Oriol (7) et Koursk (6).

L'épave d'un drone à côté d'une voiture incendiée dans la cour d'immeubles résidentiels à la suite d'une attaque de drone dans le village de Sofyino, dans la région de Moscou, le 10 novembre 2024.
Les forces de l'ordre russes inspectent l'épave d'un drone à côté d'une voiture incendiée dans la cour d'immeubles résidentiels à la suite d'une attaque de drone dans le village de Sofyino, dans la région de Moscou, le 10 novembre 2024. © Tatyana Makeyeva, AFP

Décrivant sur Telegram une "attaque massive", le gouverneur de la région de Moscou, Andreï Vorobiov, a affirmé que les interceptions s'étaient notamment déroulées au-dessus des villes de Ramenskoïe et Domodedovo, à une quarantaine de kilomètres au sud-est du centre de Moscou et à proximité d'aéroports.

Selon le Guardian, trois aéroports de Moscou ont été temporairement fermés et des vols ont été détournés.

L'armée ukrainienne a de son côté affirmé que, pour le seul mois d'octobre, Moscou aurait lancé plus de 2 000 attaques de drones sur des cibles civiles et militaires.

Octobre 2024, pire mois pour les forces armées russes ?

Si la Russie ne révèle pas le nombre de ses morts, ce mois d'octobre se démarquerait, selon le chef d'état-major britannique, comme étant le pire mois pour l'armée russe en termes de pertes de soldats depuis le début de la guerre.

Une moyenne d'environ 1 500 soldats russes ont été tués ou blessés par jour en octobre, a déclaré l'amiral Tony Radakin à la BBC. "La Russie est sur le point d'arriver à 700 000 personnes tuées ou blessées, ce qui illustre l'énorme douleur et la souffrance que la nation russe doit supporter à cause de l'ambition du président Vladimir Poutine", a-t-il ajouté.

Le chef des forces armées a en outre admis que la Russie – qui consacre plus de 40 % des dépenses publiques à la défense et à la sécurité, ce qui représente une "pression énorme" pour l'État – réalisait des gains territoriaux, mais souligné qu'il s'agissait "de minuscules portions de territoire".

Avec AFP et Reuters