Guerre en Ukraine : on vous explique le mémorandum d'intention signé par Kiev et Washington, premier pas vers un accord sur les minerais ukrainiens

Deux mois après l'altercation entre Volodymyr Zelensky et Donald Trump, l'Ukraine et les Etats-Unis ont accordé leurs voix. Les deux pays ont annoncé une avancée dans les négociations sur l'exploitation des ressources naturelles et des minerais ukrainiens par les Américains, avec la signature d'un "mémorandum d'intention", jeudi 17 avril. Il doit être une première étape avant la conclusion d'un véritable accord. "Nous avons un accord sur les minerais", a même déclaré Donald Trump, qui a promis sa signature "jeudi prochain", soit le 24 avril. Ces négociations ont toujours été présentées par Washington comme une contrepartie de l'aide militaire et financière américaine, toujours cruciale pour Kiev. Franceinfo vous résume cette première étape et l'avancée des négociations.

Un premier pas vers un accord, attendu dans les jours à venir

Le document signé jeudi et publié vendredi par le gouvernement ukrainien n'est, pour l'instant, qu'un mémorandum d'intention. En d'autres termes, cela signifie que ce texte reste non contraignant et qu'il donne les lignes directrices d'un futur accord. Yulia Svyrydenko, première vice-première ministre de l'Ukraine, l'a présenté sur X comme "un protocole d'intention qui ouvre la voie à un accord de partenariat économique et à la création du Fonds d'investissement pour la reconstruction de l'Ukraine." "Il y a encore beaucoup à faire, mais les progrès sont significatifs", a-t-elle commenté après avoir signé le texte lors d'un appel vidéo avec Scott Bessent, le secrétaire au Trésor américain.

Donald Trump a promis, lors d'une conférence de presse avec Scott Bessent, une signature "jeudi prochain", le 24 avril, et a insisté sur le fait que l'Ukraine devait "honorer sa part du marché". Le texte du mémorandum, publié par le gouvernement ukrainien, mentionne l'objectif d'une fin des négociations d'ici au 26 avril, ainsi que la venue du Premier ministre ukrainien, Denys Chmyhal, à Washington, la semaine prochaine, dans le cadre de la suite des pourparlers. Une fois signé, l'accord devra être ratifié par les Parlements des deux pays, a rappelé Yulia Svyrydenko.

Peu d'informations sur le projet d'exploitation des minerais 

Le protocole d'intention représente un premier pas vers un texte officiel d'"environ 80 pages", a confirmé Scott Bessent jeudi. S'il assure que celui-ci est "substantiellement" identique aux premières versions, il est encore difficile de connaître les détails du projet.

Selon Yulia Svyrydenko, il doit entériner la création d'un Fonds d'investissement pour la reconstruction de l'Ukraine, qu'elle présente comme un "outil efficace pour attirer des investissements en vue de la reconstruction de notre pays, la modernisation des infrastructures, le soutien aux entreprises et la création de nouvelles opportunités économiques." Aucun détail sur la gouvernance de ce fonds, la façon dont il sera alimenté et la répartition des bénéfices n'a été rendu public.

Fin mars, le Financial Times et l'agence américaine rapportaient avoir consulté un résumé du projet d'accord alors sur la table. Cette version prévoyait que la totalité des revenus tirés par l'Etat et les entreprises ukrainiennes de l'exploitation des ressources naturelles du pays soient versés dans ce fonds, et que les profits dégagés reviennent aux Etats-Unis jusqu'au remboursement de l'intégralité de l'aide versée à l'Ukraine. Le projet d'accord donnait aussi aux Américains la priorité pour l'achat des ressources extraites des sols ukrainiens.

Contactée par Reuters jeudi, la Maison Blanche n'a pas souhaité commenter le contenu du futur texte, dont on ignore s'il reprendra ces points évoqués en mars, ou même l'idée, lancée par Donald Trump, de placer sous contrôle américain certaines infrastructures énergétiques ukrainiennes, notamment des centrales nucléaires. Le président américain, qui continue d'assumer une ligne transactionnelle et présente ce partenariat comme une compensation pour l'aide militaire américaine apportée sous l'administration Biden, espère tirer 500 milliards de dollars des ressources ukrainiennes.

Une avancée après des semaines de tensions et d'impasse

Avant d'arriver à un mémorandum d'intention, les négociations sur le partenariat minier entre Kiev et Washington ont connu plusieurs semaines d'impasse. La signature d'un premier accord sur les minerais aurait pu avoir lieu en février, lors de la visite aux Etats-Unis de Volodymyr Zelensky, et avait échoué après son accrochage public avec Donald Trump et son vice-président J.D. Vance. L'incident, qui s'est déroulé devant les caméras, a gelé temporairement les discussions.

À la fin du mois de mars, Donald Trump a mis en garde Volodymyr Zelensky, affirmant qu'il ferait face à de "gros problèmes" si un accord était rejeté. Le président ukrainien était aussi sous la pression d'une partie des députés du pays, qui ont qualifié les ambitions américaines d'"inacceptables". Outre l'avenir économique du pays, cet accord est déterminant pour l'obtention des garanties de sécurité réclamées par Kiev. La Maison Blanche estime que le renforcement des intérêts commerciaux américains en Ukraine serait suffisant afin de dissuader la Russie de toute future agression dans l'éventualité d'un cessez-le-feu. "Le peuple américain souhaite investir aux côtés du peuple ukrainien dans une Ukraine libre, souveraine et sûre", soutient le mémorandum d'intention.