Emmanuel Macron a quitté l'archipel français de Mayotte vendredi midi après avoir constaté les besoins criants dans des zones enclavées, où il a été confronté, comme la veille, à la profonde détresse d'habitants à la fois exaspérés et accablés par les dégâts générés par le cyclone Chido. «Nous sommes une Nation» et «Mayotte et la France, jusqu'au bout», a écrit sur X le chef de l'État en français et mahorais, après deux jours de visite dans l'archipel ravagé par le passage du cyclone. Le cyclone - le plus ravageur qu'ait connu Mayotte en 90 ans, avec des vents à plus de 200 km/heure - a semé la désolation dans l'archipel : villages pauvres - et constitués de nombreux bidonvilles - en ruine, habitants endeuillés et traumatisés par les visions d'apocalypse du cyclone et manquant cruellement d'eau, de nourriture, d'abris, arbres déchiquetés, végétation à terre...
Selon des chiffres provisoires, 31 morts et quelque 2500 blessés ont été officiellement recensés. «Il est vraisemblable qu'il y ait beaucoup plus de victimes», a reconnu Emmanuel Macron, rappelant qu'une mission avait été diligentée pour vérifier le nombre de morts. Avant de décoller, le président français a tenu en visioconférence une réunion de la cellule interministérielle de crise, pour «transmettre au gouvernement et aux administrations les actions utiles à prendre», a indiqué la présidence française.
«On ne pourra pas régler les problèmes de fond de Mayotte si on ne règle pas le problème de l'immigration clandestine», a déclaré vendredi matin le président à des journalistes. «C'est une certitude.», a-t-il estimé. À moyen terme, il entend augmenter, jusqu'à presque doubler, le nombre de reconduites à la frontière, qui était de 22.000 en 2023. Près d'un tiers de la population de Mayotte est en situation irrégulière, selon les autorités.
«On veut de l'eau !»
Mayotte est séparée de seulement 70 kilomètres des côtes comoriennes. Au moment de la proclamation de l'indépendance des Comores, Mayotte avait choisi de rester en France par deux référendums en 1974 et 1976. La pauvreté pousse tous les jours des Comoriens à tenter de gagner Mayotte par la mer et au péril de leur vie à bord de pirogues très précaires. Emmanuel Macron s'est rendu à Tsingoni, commune enclavée de l'ouest de Grande-Terre, l'île principale de cet archipel de l'océan Indien. Loin de Mamoudzou, le chef-lieu de ce département le plus pauvre de France, les secours, l'eau, l'électricité et la nourriture tardent à arriver. «On veut de l'eau, de l'eau», l'implorent plusieurs habitants.
L'un d'eux, Badirou Abdou, raconte que des hélicoptères ont «largué (...) des bouteilles sur le terrain de foot». «Heureusement on est une population sage qui ne se bouscule pas mais c'est pas la meilleure manière de le faire», glisse-t-il. Il prévient: «ici on est coupés du monde», «y a des gens qui dorment dehors par terre... les maladies, ça va arriver».
C'était «la manière la plus rapide» pour que l'eau arrive, «mais on va faire mieux ces prochains jours», répond le président, précisant que la sécurité civile avait été déployée pour «déblayer» les routes. Dans sa déambulation, Emmanuel Macron s'accroupit devant Moinecha Djindani, 70 ans, qui le bénit en mahorais. «Il faut bien me regarder droit dans les yeux: je suis votre maman, j'ai un enfant plus âgé que vous», lui dit-elle en lui tapotant le crâne. «Je te promets on se bat pour rétablir l'eau et on va rien lâcher», lui assure le chef de l'État. «Je suis très contente», acquiesce-t-elle.
«Rebâtir» Mayotte
Environ un tiers de la population de Mayotte, soit plus de 100.000 habitants, notamment les personnes en situation irrégulière venant des Comores voisines, vivent dans des logements précaires. «Mettre fin» aux bidonvilles et «supprimer» ces habitats «indignes» et «dangereux», c'est l'un des objectifs de la «loi spéciale» promise par le président pour «rebâtir» Mayotte. Le premier ministre François Bayrou a fixé un délai potentiel de deux ans pour cette reconstruction.
«Mayotte est une île où on a énormément investi», «simplement elle est soumise à une pression migratoire qui fait qu'elle s'effondre sous celle-ci», a plaidé vendredi Emmanuel Macron face aux accusations de désengagement de l'État. Le président français a quitté Mayotte en direction de Djibouti où il doit partager un repas de Noël avec les troupes françaises présentes là-bas.