Mayotte : «Je pense qu’il est naturel qu’après la sidération vienne le moment de colère», estime Bruno Retailleau
Quelques jours après la visite d’Emmanuel Macron à Mayotte, balayée par le cyclone Chido le 14 décembre, au cours de laquelle le locataire de l’Élysée a fait face à la fureur d’une partie de la population l’accusant d’inaction, Bruno Retailleau déclare ce dimanche dans un entretien accordé au Journal du Dimanche (JDD) «[penser] qu’il est naturel qu’après la sidération vienne le moment de la colère».
Le ministre démissionnaire de l’Intérieur, qui était en déplacement dans l’archipel lundi dernier, réaffirme toutefois le plein engagement de l’État pour venir en aide aux Mahorais - le bilan provisoire s’élève à 35 morts et 2500 blessés, dont 78 grièvement, selon les derniers chiffres de la Place Beauvau. «Mayotte, c’est la France, et je peux vous assurer que la France mobilise des forces civiles et militaires considérables», déclare-t-il dans les colonnes de l’hebdomadaire.
«Travail titanesque»
Concrètement, le pont aérien érigé entre la métropole, la Réunion et Mayotte «a atteint sa pleine capacité». «50 tonnes d’eau, de denrées, de matériel arrivent chaque jour [dans l’archipel]. CMA CGM a mis à disposition un cargo; les compagnies civiles qui opèrent sur la zone ont aussi mis un certain nombre d’avions à disposition (...) C’est un travail titanesque que la France est en train de mener», détaille le ministre.
Quant à la temporalité de l’acheminement de l’aide - un défi historique par son ampleur et sa complexité - Bruno Retailleau rappelle que l’aéroport principal de Mayotte ne peut toujours pas accueillir d’avion la nuit, le balisage lumineux et la tour de contrôle ayant été endommagés.
1.600.000 litres d’eau lundi
«Dès la fin de ce week-end, 90% de la population (320.000 personnes selon le ministère de l’Intérieur, NDLR) sera reliée à l’eau courante, deux jours sur trois pendant huit heures via des tours d’eau», annonce le ministre LR. Toutefois, six communes sur les dix-sept que compte le département français «ne le seront pas immédiatement». «Mais nous compenserons par la distribution de bouteilles d’eau qui arrivent en masse, à proportion de plus de 30.000 litres par jour», ajoute Bruno Retailleau.
Lundi 23 décembre, un porte-conteneurs livrera par ailleurs 1.600.000 litres d’eau, annonce le ministre. Deux stations de production d’eau remise en route par la Sécurité civile et une station installée par Veolia «assureront à partir du milieu de la semaine prochaine le complément de production pour alimenter l’ensemble des Mahorais».
«Chaos migratoire»
De retour de Mayotte, le ministre démissionnaire avait mis sur la table l’épineuse question de l’immigration illégale vers Mayotte, provenant majoritairement des Comores voisines. Le Vendéen avait déclaré sur BFMTV qu’il faudrait être à l’avenir «beaucoup plus dur vis-à-vis» de l’ancienne colonie française, indépendante depuis 1974. Des propos qui lui avaient valu les foudres de la gauche.
«Le chaos migratoire, ce sont les Mahorais qui m’en parlent : ils constatent que l’immigration clandestine a tout aggravé», affirme l’ancien président du groupe LR au Sénat. «Si le bilan humain s’annonce dramatique, c’est parce qu’on a laissé s’entasser des populations vulnérables dans des habitations faites de tôles. Ceux qui y vivent vont payer le plus lourd tribut», explique-t-il au JDD. Les Comoriens qui s’installent sur l’archipel français vivent majoritairement dans des bidonvilles, pour beaucoup rasés par les rafales de vent drainées par le cyclone Chido. Cette population clandestine dépasserait les 100.000 personnes. «Si l’État ne règle pas le problème migratoire, alors nous reconstruisons sur du sable», conclut Bruno Retailleau qui appelle à ne pas «reproduire les mêmes erreurs» du passé.