Les députés allemands se prononcent ce mardi sur le plan d'investissements géants de Friedrich Merz, un tournant majeur pour le pays qui veut dépenser sans compter pour se réarmer et se moderniser afin d'affronter les bouleversements du monde.
«La situation s'est encore aggravée de façon dramatique ces dernières semaines», a plaidé avant le vote le probable futur chancelier qui s'apprête à enterrer le dogme de l'orthodoxie budgétaire dont il a toujours été un fervent défenseur. Et d'évoquer le revirement stratégique des États-Unis de Donald Trump, qui se rapprochent de la Russie au détriment de l'Ukraine, et l'urgence pour l'Europe d'accroître son indépendance vis-à-vis de Washington en matière de défense.
Le «bazooka» d'investissements proposé par le chef des conservateurs quelques jours seulement après sa victoire aux législatives du 23 février, est la pierre angulaire du futur gouvernement qu'il a entrepris de former avec le Parti social-démocrate (SPD).
Débloquer un soutien militaire
Pour faire entrer la rigoureuse Allemagne dans cette nouvelle ère de la dépense, il lui faut amender la Loi fondamentale car le texte prévoit un assouplissement des règles d'endettement inscrites dans la constitution pour les dépenses militaires et pour les régions. S'ajoute un fonds spécial de 500 milliards d'euros sur 12 ans pour moderniser les infrastructures et relancer la première économie européenne en récession depuis deux ans, dont, sous la pression des écologistes, 100 milliards affectés à la protection du climat.
Les sommes en jeu sont colossales et auront des répercussions bien au-delà de l'Allemagne, représentant 1000 à 1500 milliards d'euros, selon les calculs, injectés dans l'économie au cours de la prochaine décennie. Il s'agit d'«un signal fort montrant que l'Allemagne prend au sérieux sa propre sécurité, la sécurité de l'Ukraine et la sécurité de l'Europe», a loué lundi la cheffe de la diplomatie sortante Annalena Baerbock (Verts). Pour cette journée historique, le chef de l'État français Emmanuel Macron sera à Berlin et rencontrera dans la soirée le chancelier sortant Olaf Scholz, ainsi que Friedrich Merz.
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Le plan permettra aussi le déblocage d'un soutien militaire en suspens de 3 milliards d'euros pour l'Ukraine. Selon le porte-parole du gouvernement allemand, des munitions d'artillerie pourraient alors être livrées «dans les prochaines semaines». Lundi, Friedrich Merz s'est déclaré «confiant» d'obtenir la majorité des deux-tiers des voix nécessaires, grâce au soutien du SPD et des Verts, qui se sont in extremis ralliés au projet.
Le chef des conservateurs de 69 ans veut faire voter les lois par le Bundestag sortant, car les partis des extrêmes, de droite et de gauche, détiendront une minorité de blocage dans le nouvel hémicycle qui se constituera le 25 mars. «Mais avec 31 voix, l'avance n'est pas si grande», souligne Der Spiegel. D'autant que le spectaculaire virage budgétaire de Friedrich Merz n'est pas sans créer des remous au sein même de son camp politique.