REPORTAGE. "On peut dire qu'il est miraculé" : dans un hôpital de Goma, en RDC, une chirurgie de guerre pour traiter un afflux sans précédent de blessés

Dans l'est de la République démocratique du Congo (RDC), les rebelles du M23 soutenus par le Rwanda ont pris le contrôle, à la fin du mois dernier, de la ville de Goma. Une offensive éclair et des combats qui ont causé la mort de plus de 3 000 personnes et fait des centaines de blessés, qui ont submergé les hôpitaux de la ville.

Dans l'hôpital de Ndosho, les équipes du Comité international de la Croix-Rouge (CICR) ne connaissent aucun répit. "Moi, dans ma vie de chirurgien, c'est la première fois que je vois ce type d'afflux de blessés", relève le chirurgien en chef, Abdou Sidibé. Une vague sans précédent avec un pic de plus de 400 blessés en trois jours au plus fort des affrontements. "Nous sommes à 25-30 interventions par jour, 24 heures sur 24."

Des blessés à l'hôpital de Ndosho, dans la ville de Goma (République démocratique du Congo). (FRANCEINFO / RADIO FRANCE)

Une chirurgie de guerre dans l'urgence, sans scanner ni radio. Sur la table d'opération, un homme de 22 ans, un civil fauché par des éclats d'obus, des blessures béantes sur tout le corps. "Il a une plaie au niveau de l'abdomen, l'estomac, les bras, décrit-il. Le foie est touché, la rate est touchée, le thorax aussi. Les poumons sont touchés. Plus de 200 points [de suture]. On peut dire qu'il est miraculé."

"Des cadavres partout"

Les gestes sont précis, presque mécaniques, avant le dernier point de suture. L'opération aura duré 4h20. "Ça, c'est notre quotidien." Dans la cour de l'hôpital, dix tentes blanches abritent des blessés en enfilade, la plupart par balles. Cet homme, également âgé de 22 ans, a été touché aux parties génitales. "C'est un trou au niveau du pénis, décrit-il. Elle a traversé les testicules, puis c'est sorti par ici, derrière les fesses."

Il fait partie des forces spéciales de l'armée congolaise et a participé à la bataille de l'aéroport de Goma, théâtre de féroces combats. "C'était vraiment la guerre. Des cadavres partout. Ils étaient trop nombreux. Ils sortaient du Rwanda, avec des militaires rwandais. Je l'ai vu moi-même, durant trois jours successifs, jour et nuit." Et depuis la prise de Goma, l'aéroport est toujours fermé malgré les appels répétés de l'ONU à permettre le transport des blessés et l'acheminement de l'aide humanitaire.

Dans un hôpital de Goma, en RDC, une chirurgie de guerre pour traiter un afflux sans précédent de blessés