REPORTAGE. "C'était un enfer là-bas !" : en pleine guerre en RDC, des survivants de l'incendie mortel de la prison de Goma témoignent

Une prison en feu. Goma, la capitale provinciale du Nord-Kivu, tente de retrouver le calme, après sa prise éclair par le groupe armé antigouvernemental M23 et les troupes rwandaises. Les Nations unies annoncent un bilan provisoire de près de 3 000 morts ces dernières semaines, dans ce conflit qui déchire l'est de la République démocratique du Cong,  depuis plus de trois ans. 

Un autre drame s'est déroulé fin janvier. Les détenus de la prison centrale de Muzenze, à Goma, ont vécu une véritable nuit d'horreur entre le 26 et le 27 janvier dernier. "C'était à 1h30 que le feu a commencé. C'était un enfer là-bas ! On criait au secours, au secours, au secours ! Mais il n'y a eu aucun secours...", raconte Esther, en larmes, qui fait partie des 16 survivantes du bloc des femmes. Au total, 141 d'entre elles ont péri cette nuit-là, certaines avec leurs enfants en bas âge. 28, dont un bébé de trois jours, sont morts durant ce drame. 

"Les mamans étaient dans les cellules avec leur bébé, dans les bras... Et ils ont péries là-bas, brûlés vives."

Esther, une ancienne prisonnière

à franceinfo

Les prisonniers qui parvennaient à sortir "recevaient des balles"

Direction la ville de Goma dans l’Est de la République Démocratique du Congo tombée il y a tout juste deux semaines entre les mains des rebelles du M23 soutenus par le Rwanda. Les combats ont causé la mort, selon l’ONU, de 3000 personnes et fait des centaines de blessés... La capitale du Nord Kivu a également été le théâtre d’une tragédie qui s’est déroulée dans la prison centrale où 181 prisonniers, dont une très grande majorité de femmes, sont morts lors d’un incendie en cherchant à fuir alors que les rebelles entraient dans la ville... Nos envoyés spéciaux à Goma Sandrine Mallon et Omar Ouahmane ont rencontré des rescapés de cette catastrophe...

Ce drame a été provoqué par un incendie déclenché par les prisonniers. Eugène, un des rescapés du bloc des hommes décrit la situation : "Il n'y a plus rien. Le matelas, le lit, le mobilier... Tout a été brûlé. Le feu, c'était l'œuvre des prisonniers. Les hommes, tout les femmes, croyaient qu'en mettant le feu, ils allaient pouvoir partir... Ce qui n'était pas le cas. Toute personne qui osait sortir, recevait des balles. Et sur place, là, il y a aussi eu des morts", glisse-t-il.

Selon les témoins, les gardiens de prison sont restés positionner dans leur guérite durant une grande partie de la nuit pour empêcher une évasion massive, quand, à l'intérieur, c'était la panique. Des hommes sont parvenus à rejoindre le bloc des femmes, piégées au milieu de la fournaise, pour leur venir en aide. "Quand les hommes ont entendu les cris des femmes qui mourraient, ces prisonniers ont montés dans le plafond pour chercher un trou pour passer, pour venir nous secourir", raconte une ex-prisonnière. Les détenus, encore vivants, ont attendu le départ des gardiens de la prison au petit matin pour s'échapper, peu avant l'arrivée sur les lieux, des rebelles du M23.