«Incroyable come-back» ou «cauchemar», «erreurs de calcul», «faiblesse maximale pour l'UE» : la victoire de Donald Trump agite la presse mondiale

Ce jeudi, la presse mondiale autopsie la victoire nette de Donald Trump, hier, à l’élection présidentielle américaine. Au premier rang de laquelle figurent les journaux américains. Le New York Times tente ainsi d’analyser comment le républicain a réussi à toucher «autant d’Américains»  - à ce stade, le futur président des États-Unis a recueilli au moins 72 millions de votes, contre à peine 68 millions pour sa rivale démocrate défaite Kamala Harris.

«Il a été un militant redoutablement efficace. Le voir, c'était le voir mêler comédie, fureur, optimisme, noirceur et cynisme comme jamais auparavant. C'était un communicateur expert. Il a gagné de nouveaux partisans et a gardé les anciens sous son charme», est-il possible de lire dans les colonnes du quotidien qui se demande si «une femme sera-t-elle un jour présidente» . Et de noter que «le lien avec Donald Trump s'est renforcé pour beaucoup de gens après la tentative d'assassinat» lors d’un meeting en Pennsylvanie en juillet : «Les gens ont commencé à le considérer comme un croisement entre Rambo et John Gotti (un mafieux new-yorkais, NDLR)» et «certains ont vu une preuve du divin dans sa survie», permettant au candidat de se rapprocher de «certaines personnes sur le plan spirituel». «La haine des institutions ne saurait être estimée», ni ses «critiques de l’orthodoxie dominante» ni ses «tactiques alarmistes» : «la peur a maintenu les gens accrochés».

Les «erreurs de calcul» de Kamala Harris

Le Wall Street Journalqui se pose la même question, estime que «les électeurs ont exprimé leur colère face aux prix et leur frustration face au fait que leurs ambitions semblent hors de portée». Et analyse les «erreurs de calcul» de Kamala Harris. «Sa campagne a été mal interprétée par un électorat plus préoccupé par l’inflation et l’immigration que par le caractère de Donald Trump», tranche le WSJ. «Les électeurs, tous partis confondus, ont viré à droite sur la question de l'immigration. Ils ont reproché à Biden et Harris de ne pas avoir réussi à contrôler la frontière chaotique»résume de son côté le New York Times.

«La colère des électeurs face à l’économie déconcerte les démocrates»plussoie le Washington Post . «Pour Harris, qui n'est pas étrangère aux revers, ce fut une défaite cuisante. Mais c'était aussi un verdict cuisant pour la gauche américaine, qui a vu son porte-étendard écarté pour la deuxième fois en trois élections présidentielles, dans une élection marquée par les sombres tendances du populisme réactionnaire»analyse dans un autre article le journal de la capitale. 

«L’Europe au pied du mur»

Une thématique abordée en France par Le Monde , pour qui la candidate démocrate «laisse ouverte la question de la déroute de son parti». «Kamala Harris a négligé la base traditionnelle du parti, notamment le courant progressiste et les jeunes (...) Porter des baskets et s'amuser sur le plateau de l'émission mythique “Saturday Night Live”, à trois jours de l'élection, ne créent pas une adhésion», cingle le journal du soir. 

Les Unes de la presse françaises sont entièrement consacrées à l’élection de Donald Trump. Capture d’écran

Le Parisien fait sa Une sur «l’incroyable come-back» de Donald Trump quand L’Humanité s’alarme du «cauchemar américain». «L’Europe au pied du mur», pointe de son côté Les Échos. «Le monde s’apprête à vivre de nouvelles turbulences : isolationnisme et imprévisible, le président élu entend bien tourner la page Biden, qui a tenté de restaurer l’image des États-Unis dans le monde», peut-on lire. Dans Le Figaro , l’élection du républicain met l’Europe, «affaiblie et divisée à l'heure des choix pour assurer sa sécurité», face à ses responsabilités.

Retour dans les colonnes des Échos, qui, dans son éditorial, estime que «la victoire de Trump nous renvoie à notre propre aveuglement» : «Si, donc, nous nous trompons sur le regard que la société américaine porte sur son nouveau président, risquons-nous de nous tromper sur la façon dont nous voyons notre propre société ? Les sujets qui l’ont fait gagner sont pourtant là : pouvoir d’achat, immigration, insécurité, détestation des élites. Le terreau est le même, gardons-nous d’y enfouir la tête pour ne pas voir.»

«Changement historique de camp des minorités»

En Italie, le Corriere Della Serra met l’accent sur le rapport de force à venir entre les États-Unis et le Vieux continent. «Le triomphe de Donald Trump intervient à un moment de faiblesse maximale pour l’UE. De la défense à une vision commune de l'investissement et du développement industriel, l'UE parviendra-t-elle à éviter ce que Draghi a appelé une «lente agonie» ?», interroge le premier quotidien du pays. Il Manifesto, résolument de gauche, déplore pour sa part le «pouvoir absolu» qu’est en passe de s’adjuger Donald Trump : «Il n'y a qu'un seul homme aux commandes, plus une ombre pluto-technologique nommée Musk.»

Le quotidien espagnol El Mundo , lui, se penche sur «le changement historique de camp des minorités aux États-Unis». Le républicain a effectivement «considérablement amélioré ses performances» auprès «des latinos, des noirs et des jeunes». «Le vote latino s'est avéré déterminant, mais pour Donald Trump . Il n'y a pas eu de vague «bleue» de féministes ou de légions de femmes hispaniques se rendant aux urnes, stimulées par la cause des droits reproductifs ou par la réforme tant attendue de l'immigration, du moins pas avec suffisamment de force pour influencer le résultat électoral et donner une victoire à Kamala Harris», analyse le journal conservateur.

Outre-Manche, The Guardian titre sa Une «American Dread» - «la hantise des Américains» - quand The Mirror se demande «What have they done again» - «qu’ont-ils encore fait». «On lui a tiré dessus, il a été reconnu coupable d'un crime et qualifié de fasciste… mais il reste le choix du peuple», résume le Daily Express. «Vous êtes réembauché», écrit The Sun en référence au célèbre «vous êtes viré» que lançait Donald Trump à ses recrues dans The Apprentice.

En Allemagne, enfin, Der Spiegel  relève que «l'élection présidentielle ne s'est pas déroulée sans incidents ni perturbations» mais que «le chaos redouté ne s'est pas produit», citant les «menaces à la bombe de la part de la Russie et allégations de fraude sans fondement de la part de Donald Trump»

«Trump fera passer ses propres intérêts en premier»

Dans le reste du monde, les quotidiens chinois se contentent de souligner que leur président Xi Jinping a «félicité» le président élu. En Israël, le Jerusalem Post estime que «la victoire de Trump est une bombe diplomatique». Pour le journal libéral, son élection «affaiblit les efforts diplomatiques visant à mettre fin à court terme aux guerres multifrontales d'Israël et remet en question le soutien à long terme des États-Unis aux campagnes militaires d'Israël contre l'Iran et ses mandataires». Et s’interroge : «Trump sera-t-il bon pour Israël en temps de guerre, compte tenu notamment de sa réticence à s'engager militairement» ?

«Donald Trump fera passer ses propres intérêts en premier, et ils ne seront pas forcément toujours alignés avec les attentes de la coalition de Netanyahou», analyse de son côté le quotidien hébreu de centre gauche Haaretz.

Au Mexique, enfin, La Jordana se demande quelles seront les «implications» de la victoire de Donald Trump pour le pays : «Le premier changement sera un changement de ton. Alors que l'administration de Joe Biden entretenait généralement des relations cordiales, voire solides, avec ses homologues mexicains, le style de négociation de Trump commence presque toujours par des menaces». Et d’ajouter : «Mais la promesse de Trump d'expulsions massives d’immigrés est ce qui pourrait faire le plus de dégâts.»