En Allemagne, Friedrich Merz à l'épreuve du pouvoir
Friedrich Merz est attendu au tournant par les Allemands sur la question économique. Les années 2023 et 2024 ont été deux années de récession, un choc pour la première économie européenne. Et l’année 2025 s'annonce sous de mauvais auspices, car les problèmes sont toujours là : chute des marchés à l'exportation, notamment en direction de la Chine, problème de main d'oeuvre, coût de l'énergie, et il faut ajouter la menace des droits de douane américains.
La nouvelle coalition au pouvoir (CDU-SPD) sait qu’elle doit aller vite pour inverser la tendance. Dans sa feuille de route présentée lundi 5 mai, elle annonce plusieurs mesures : baisse de l’impôt sur le revenu, relèvement du salaire minimum, économies dans l’administration ou encore durcissement des conditions d’attribution des allocations chômage.
Quelques semaines auparavant, une autre annonce avait été faite par celui qui n'était pas encore chancelier : celle d'un fonds d’investissement de 500 milliards d’euros sur 12 ans pour moderniser les infrastructures (le ferroviaire, les routes, les hôpitaux ou encore les installations électriques).
Vers le réarmement de l'Allemagne
Mais il y a aussi un deuxième chantier urgent : la défense. Ce plan d’investissement qui doit générer de la croissance a été présenté comme le moyen de financer les futures dépenses militaires. Et en la matière, Friedrich Merz formule de grandes ambitions, face à la menace russe mais aussi face aux États-Unis "largement indifférents au sort de l’Europe". Pour cela, il a même réussi à faire voter la possibilité pour l’Allemagne de s’endetter sans limite, dès lors que les dépenses en matière de défense dépassent 1% du PIB. Une petite révolution au pays de l’orthodoxie budgétaire ! Avec ce plan, le nouveau chancelier participe à la construction d’une "capacité de défense européenne autonome". Des mots, a t-il concédé, qu’il ne pensait pas devoir dire un jour.
Sur le plan politique, un troisième défi attend encore le nouveau chancelier : il s’agit de contenir la progression de l’AfD, désormais première force d’opposition parlementaire et qui vient d’être classée par le renseignement allemand comme parti "extrémiste de droite". Aujourd’hui, il y a un "cordon sanitaire" autour du parti d'Alice Weidel, qui l’empêche de nouer des accords de coalition et d’avoir des postes au sein des commissions parlementaires. Mais cette pratique politique a vacillé fin janvier quand l’AfD a voté deux résolutions de la CDU visant à renforcer la lutte contre l’immigration. Merz a d’ailleurs été critiqué dans son propre camp pour avoir accepté ce soutien sans sourciller.
Partisan de la fermeté sur le plan migratoire, le chancelier s’est accordé avec le SPD sur plusieurs points, notamment la suspension du regroupement familial et la restriction des demandes d’asile. Cela sera t-il suffisant pour contenir la poussée de l’AfD ou les électeurs préféreront-ils l’original à la copie ? Le parti d’extrême-droite a déjà les yeux tournés vers la prochaine élection en 2029, avec la ferme intention de l’emporter.