Bruno Retailleau et Manuel Valls stars d’un meeting pro-Netanyahou sous couvert de « lutte contre l’islamisme »
Un meeting « pour la République » et « contre l’islamisme », ou pour le pouvoir israélien et contre l’islam tout court ? Les prises de position des organisateurs et intervenants à cet événement, qui se tient ce mercredi soir au Dôme de Paris, laissent plutôt penser à la seconde option. Comme l’a détaillé Mediapart, la soirée est organisée principalement par #AgirEnsemble, association « pour la France, les valeurs républicaines, la sécurité, la vérité » qui selon le site Off Investigations ne serait qu’une vitrine du lobby pro-israélien Elnet (European Leadership Network).
Déclarée comme groupe d’intérêt, la branche française d’Elnet diffuse un discours pro-israélien, proche de celui de Benyamin Netanyahou et de l’extrême droite locale. C’est aussi elle qui, depuis 2017, organise des voyages en Israël de responsables politiques – une centaine de membres de LR ou de la Macronie y ont bénéficié selon Mediapart.
Une obsession contre l’islam et la gauche
À sa tête – comme à la tête de #AgirEnsemble -, se trouve Arié Bensemhoun. Principale cheville ouvrière du meeting, celui-ci adopte une ligne radicale consistant à faire de l’islam mais aussi de la gauche les principaux adversaires des juifs et de la démocratie, au Proche-Orient comme en France. Exemples de ses prises de position : « Ceux qui sont principalement responsables de ces agressions contre les juifs sont, aujourd’hui, les islamistes, les extrémistes de gauche et les wokistes » ; « Dire qu’à l’extrême gauche il y a les collabos des nouveaux nazis que sont les Islamistes, c’est dire la vérité ! ».
Sur les réseaux sociaux comme dans les médias, Arié Bensemhoun – qui parlait en 2023 du peuple palestinien comme d’une « société de barbares » cible tous ceux qui alertent sur les bombardements en cours à Gaza. La gauche bien sûr mais aussi Dominique de Villepin, qu’il voit comme « l’une des figures de proue de cette hystérie anti-israélienne et antijuive ». Pour lui, le monde d’aujourd’hui se résume en un affrontement entre deux camps : « Ce qui est en train de s’effondrer sous nos yeux, c’est la République ! La République écartelée entre les pro Hamas et ceux qui combattent l’islamisme et le wokisme. »
Arié Bensemhoun et Elnet accompagnent le récit de l’extrême droite israélienne faisant de la guerre menée à Gaza un symbole de celle que subirait tout l’Occident face à l’islamisme. Un narratif repris par Manuel Valls en 2023 : « Israël est en première ligne face à l’islamisme (…) Si Israël tombe, nous tombons ».
Proximité du Printemps républicain
Le ministre de l’Outre-Mer – qui a participé à des voyages en Israël organisés par Elnet – sera présent, ce mercredi soir au Dôme de Paris, aux côtés de Bruno Retailleau. Le ministre de l’Intérieur risque d’y prolonger son discours selon lequel l’antisémitisme « existe en France de manière résiduelle à l’extrême droite » et incombe désormais « à l’islamo-gauchisme ».
Taper sur la gauche, sa critique de l’islamophobie ou son soutien à la cause palestinienne est aussi une spécialité du reste des intervenants, pour beaucoup proches du Printemps républicain (Raphaël Enthoven, Rachel Khan, Jean-Michel Blanquer, Julien Dray). Sont aussi annoncées la journaliste du Figaro Eugénie Bastié ou la militante Fadila Maaroufi, qui lors d’un colloque organisé par Elnet France l’année dernière a déclaré : « La seule chose que les musulmans regrettent, c’est qu’Hitler n’ait pas terminé ce qu’il a commencé. »
Parmi les têtes d’affiche de la soirée se trouve aussi la chercheuse spécialiste des Frères musulmans et proche d’Éric Zemmour, Florence Bergeaud-Blackler. Celle-ci représentera son propre think tank, le Centre européen de recherche sur le frérisme (Cerif), partenaire de l’événement et financé par le projet Périclès de Pierre-Édouard Stérin, comme l’a révélé l’Humanité. C’est le cas aussi de la structure de l’avocat Thibault de Montbrial, le Centre de réflexion sur la sécurité intérieure (CRSI) qui prône une politique ultra-sécuritaire. Tous partagent un soutien fort au pouvoir israélien dans le conflit en cours et l’idée qu’il se joue, au Proche-Orient, le même combat que celui qui devrait être mené en France contre l’islamisme et ses « relais ». Comprendre les musulmans et la gauche.
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