Rentrée scolaire : à Mayotte, des journées de 1 h 45, des classes manquantes et des parents excédés
À écouter la rectrice, tout va bien ou presque pour les élèves mahorais. Au micro de Mayotte la 1ère, Valérie Debuchy a jugé la rentrée « satisfaisante », arguant que « 90 % des écoliers ont bien 24 heures par semaine, certes en rotation » et que « le bâti scolaire dans le premier degré, ce n’est pas la compétence du rectorat ». Les parents de l’île ne semblent pas être d’accord avec ces affirmations.
Depuis le lundi 25 août, jour de reprise des cours pour certains enfants, des mères de famille ont dû se mobiliser devant les mairies ou même bloquer les portails des écoles, comme dans les communes de Chirongui, au sud, et de Pamandzi, en Petite Terre. La population demande simplement que les enfants puissent suivre des cours dans des établissements sûrs et sécurisés, huit mois après la catastrophe qu’a été le cyclone Chido pour les familles.
Mais le désintérêt de l’État pour son 101e département, qui a préféré voter des lois indignes sur la misère des habitants, n’a fait que plonger les enfants de Mayotte dans une sous-éducation déjà chronique. Certains d’entre eux n’ont toujours pas été affectés dans une école, quand d’autres manquent de matériel, voire de bâtiments, et la majorité craignent pour leur sécurité à cause des bandes de jeunes délinquants qui terrorisent la population mahoraise depuis des années.
Un système de rotations généralisé
Cette situation est particulièrement remarquée à Vahibé, un village sur les hauteurs de Mamoudzou, la préfecture du département. Là-bas, la rentrée de janvier s’est faite le 18 mars et il n’y a aujourd’hui que 7 salles de classe et 16 enseignants pour 1 200 élèves. Une situation obligeant la mise en place des rotations de cinq classes par jour, pour des cours de 1 heure 45 minutes.
« On parle de la catastrophe naturelle la plus urgente de la nation, et [l’État prend] six, sept, huit mois d’instruction de dossier. Ce n’est pas acceptable », a déploré dans un média local le maire de Mamoudzou, Ambdilwahedou Soumaïla, ajoutant qu’il attendait encore « 100 millions d’euros » du ministère des Outre-mer.
Certes, de nombreux établissements du premier degré ont été reconstruits, et l’île compte à la rentrée 8 300 enseignants contre 7 400 l’année dernière. Mais ces derniers sont à bout de nerfs, contraints de faire cours dans des classes insalubres et surchargées.
Ce système, qui retarde constamment les jeunes générations mahoraises, a cours depuis plusieurs années et a été généralisé après Chido. Fin janvier, plusieurs grèves avaient été menées, notamment lors des visites des ministres de l’Éducation et des Outre-mer Élisabeth Borne et Manuel Valls.
Mais les réponses sont trop tardives, et la population ne peut compter sur ses élus locaux, toujours aussi lymphatiques. Quant aux enfants, ils sont pour beaucoup traumatisés par le cyclone et inquiets à chaque averse, alors que la saison des pluies recommencera en octobre, et que le suivi psychologique est quasiment inexistant à Mayotte.
Les rares îlots de stabilité qu’étaient les écoles et les madrasas sont désormais submergés. Le chiffre le plus inquiétant est le nombre d’élèves inscrits sur les listes scolaires, en baisse. Une anomalie pour un département que l’on surnomme « la première maternité de France ». Comparé à l’année dernière, ils sont ainsi 3 169 enfants de moins, dont on espère que les familles ont simplement quitté le territoire.
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