Pas d’expropriations, droit du sol encore plus strict, hausse du Smic… Que faut-il retenir de l’accord trouvé en CMP sur la refondation de Mayotte ?

On dit à Mayotte que “tant qu’on n’a pas accosté, on n’arrête pas de pagayer“. Après des mois de combat parlementaire pour le 101e département français, les résultats sont certes mineurs, mais ils sont là. La commission mixte parlementaire (CMP) a validé ce mardi un texte commun sur la loi de programmation pour la refondation du petit territoire, ravagé par le cyclone Chido le 14 décembre dernier.

Au cœur des préoccupations de la population, l’article 19 sur les expropriations par dérogation, introduit par le ministre des Outre-mer Manuel Valls et supprimé par l’Assemblée nationale, est définitivement écarté par les 14 parlementaires.  

La fin des séjours territorialisés en 2030 ?

Parmi eux figuraient deux Mahorais, le sénateur socialiste Saïd Omar Oili et la triste Anchya Bamana, devenue l’une des premières députées ultramarines à rejoindre le Rassemblement national. Si les bancs d’extrême droite correspondent à son casier judiciaire, elle a regardé végétative ses nouveaux amis voter contre les intérêts des siens au sujet des titres de séjour territorialisés. Cette exception locale mise en place par Manuel Valls en 2014 empêche les immigrés – la moitié de la population de Mayotte – de quitter l’île pour l’Hexagone, et engorge les services publics de l’île.  

Ces titres seront finalement supprimés, a décidé la CMP, contre l’avis du gouvernement et de la droite sénatoriale. Seulement, il faudra attendre le 1er janvier 2030 pour cela, les députés de La Réunion ayant repris la rhétorique du RN en évoquant un “appel d’air migratoire“.

C’est mieux que rien, a soufflé la députée Liot Estelle Youssouffa en sortie de commission. Ce n’est pas optimal mais on a obtenu des avancées historiques. Maintenant, il va falloir se battre pour que ce soit concrétisé.” Car cette suppression n’interviendra qu’après l’élection présidentielle de 2027, sous un autre gouvernement. 

Retrait des papiers aux parents d’enfants problématiques

Parmi les autres conclusions de la CMP figurent néanmoins des mesures indignes d’une population en pleine détresse. Parmi elles, le retrait des titres de séjour aux parents dont les enfants sont jugés comme troublant l’ordre public, l’accélération des destructions de bidonvilles, ou encore plus de justificatifs demandés aux parents pour que les enfants obtiennent la nationalité française à leur majorité, enterrant encore un peu plus le droit du sol à Mayotte. Quant à l’alignement des droits sociaux, repoussé à 2031 par Emmanuel Macron, seule une hausse du Smic (à 87,5 % du Smic national) est à prévoir en janvier 2026. 

Enfin, la loi de programmation prévoit environ 300 millions d’euros d’aide aux collectivités pour la reconstruction, dérisoires au vu des dégâts, ainsi que plus de 3 milliards d’investissements programmés pour le réseau d’eau, les écoles, la prison, le futur aéroport, le logement, l’agriculture ou encore l’aménagement. “Il va falloir que sur chaque loi de finances, on fasse en sorte que ces engagements soient tenus par le gouvernement“, pondère cependant Estelle Youssouffa. Ultime étape : le vote du texte par les deux chambres dans les prochains jours.

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