Interrogatoires sans avocats, signature de documents d’expulsion, transfert vers la prison de Geveon… l’équipage du Madleen toujours sous le joug de l’armée israélienne

Près de 24 heures après leur arrestation illégale par les forces israéliennes, les membres de l’équipage du Madleen sont toujours détenus, dans la matinée du mardi 10 juin. Retenus et interrogés au sein de l’aéroport international Ben Gourion (Tel-Aviv), les douze volontaires – de la députée européenne Rima Hassan à la figure de la lutte contre le dérèglement climatique Greta Thunberg, en passant par le journaliste d’Al Jazeera Omar Faiad – auraient dû être rapatriés, comme annoncé le ministère israélien des Affaires étrangères.

Problème, les autorités palestiniennes obligeraient les détenus à signer des documents d’expulsions, et ce, sans la présence de leurs avocats. Soit une nouvelle violation du droit international, qui pousserait huit des douze membres à refuser de les ratifier, rapporte la journaliste Khadija Toufik, présente à Tel-Aviv. Ainsi, selon l’institution représentant la minorité arabe en Israël Adalah, ces derniers devraient « être traduits en justice dans les prochains jours ». La chaîne de télévision locale Kan révèle notamment que Rima Hassan aurait refusé de signer les documents. Franceinfo annonce, de son côté, que cinq Français sur six refusent d’être expulsés dans ces conditions. Le journaliste de Blast Yanis M’hamdi en fait partie. Parmi ceux ayant accepté, Greta Thunberg se trouve dans un avion en direction de la France.

« Projeter une vidéo montrant les atrocités commises le 7 octobre 2023 »

Les activistes concernés pourraient ainsi être transférés vers le centre de détention de Geveon, à proximité de Tel-Aviv, alors que le traitement des otages par l’armée israélienne a largement été condamné à l’international, entre séances de tortures, viols et disparitions. Le ministre de la Défense, Israël Katz, a notamment ordonné à l’armée « de projeter une vidéo montrant les atrocités commises le 7 octobre 2023 contre des militants détenus qui ont tenté de défier le blocus israélien de Gaza », annonçait son bureau dans un communiqué. La vidéo en question dure une quarantaine de minutes et se résume à un enchaînement d’images non censurées récupérées par Tel-Aviv.

« Il est normal que Greta l’antisémite et ses amis qui soutiennent le Hamas voient exactement qui est le groupe terroriste Hamas qu’ils soutiennent et au nom duquel ils agissent, quels actes atroces ils ont commis sur les femmes, les personnes âgées et les enfants, et contre qui Israël se bat pour sa défense », a ainsi lancé Israël Katz, faisant fi de l’objectif premier du Madleen. À savoir : briser le blocus humanitaire maintenu illégalement par l’armée israélienne, qui est à l’origine d’une famine généralisée dans la bande de Gaza.

La coalition de la Flottille de la liberté (un mouvement international de soutien aux Palestiniens) annonçait, dans un communiqué publié quelques heures plus tôt, que l’équipage du Madleen se trouvait au port d’Ashdod, dans le sud d’Israël, en attente d’un possible transfert vers le centre de détention de Ramleh, « à moins qu’ils n’acceptent de partir immédiatement, auquel cas ils pourraient être autorisés à quitter Tel-Aviv dès ce soir ».

« On ne sait même pas où sont les détenus »

Les membres français de la flottille (Rima Hassan, Baptiste Andre, Pascal Maurieras, Reva Viard, Yanis M’hamdi, Omar Faiad) ont ainsi été interrogés sans avocats ni représentants de l’ambassade. « Nos familles n’ont aucune nouvelle alors que la rétention illégale dure depuis près de 24 heures, alertait Jean-Luc Mélenchon sur son compte X, au milieu de la nuit. Nous, Insoumis, sommes sans nouvelle aussi. Malgré nos relances à plus haut niveau, on ne sait même pas où sont les détenus. »

Le Madleen, mené par des activistes français, allemand, brésilien, turc, suédois, espagnol et néerlandais, a été attaqué par les forces israéliennes dans les eaux internationales, alors qu’il était proche de rallier la bande de Gaza avec à son bord de l’aide humanitaire. Immédiatement, l’annonce de l’arrestation – accompagnée des images diffusées par Tel-Aviv – a mobilisé à l’international. Des dizaines de milliers de personnes se sont par exemple rassemblées à travers la France, dans la soirée du lundi, tandis qu’une manifestation a été organisée sur les ruines du port de Gaza « pour condamner le raid des forces d’occupation israéliennes et l’enlèvement d’activistes internationaux », résume le journaliste palestinien Anas Al-Sharif.

De quoi maintenir la pression sur les services diplomatiques des pays concernés. Le président de la République Emmanuel Macron a ainsi réagi en affirmant, lundi 9 juin, que le Quai d’Orsay a « passé tous les messages » à Israël pour que « la protection » de ses ressortissants, au nombre de six, « soit assurée » et qu’ils « puissent retrouver le sol français ». De la communication dont les effets tangibles peinent, pour l’instant, à apparaître.

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