Delphine Ernotte Cunci cherche à réaliser des économies. Et quoi de mieux que la masse salariale pour servir de variable d’ajustement ? Mercredi 9 juillet, la PDG de France Télévisions a annoncé, sans aucune discussion préalable avec les syndicats, une renégociation des accords collectifs.
À la tête du groupe audiovisuel public depuis 2015, elle s’attaque donc avec une vraie violence sociale à la couverture conventionnelle de ses employés, en arguant d’un nécessaire virage numérique, qui encore pour le coup a bon dos pour sabrer ici et là.
Face à cette attaque, Pierre Mouchel, secrétaire général du SNRT-CGT et délégué central CGT de France Télévisions, dénonce une décision « abrupte et dangereuse qui n’était pas à l’ordre du jour ». Delphine Ernotte Cunci a exigé un vote à l’emporte-pièce.
Les administrateurs, « qui avaient l’air bien au courant depuis longtemps », ont voté en faveur de la dénonciation de l’accord collectif. Les représentants syndicaux ont voté contre. Ces derniers sont tombés des nues. Un « chaos social » s’opère juste avant les départs en vacances, souligne Pierre Mouchel qui a suggéré à la direction d’attendre avant de prendre cette décision.
Un « management de la terreur »
« Elle veut casser la nomenclature des métiers pour que des salariés deviennent polyvalents », poursuit le délégué central CGT. Ils auront plus de tâches à accomplir, donc certains corps de métiers vont progressivement disparaître. Delphine Ernotte Cunci a pour but « de faire exploser les métiers et les pratiques professionnelles afin, prétexte-t’elle, de s’adapter à la bascule du tout numérique », s’indigne l’intersyndicale (SNJ-CGT, CFDT, SNJ et FO) dans un communiqué commun.
Les 8 800 salariés devraient voir leurs avantages sociaux laminés. La dernière négociation de ces accords date de 2013, après quatre ans d’âpres négociations, qui ont duré quatre ans, au moment où les différentes entités de France Télévisions se sont retrouvées dans un même groupe.
L’une des dispositions que souhaiterait revoir Delphine Ernotte-Cunci, d’après Pierre Mouchel, vise les conditions de départ de l’entreprise : jusqu’ici, à partir de trente ans d’ancienneté, si un salarié était licencié, il partait avec deux ans de salaire. La direction souhaite revoir ceci sans passer par la case du plan social pour éviter de trop débourser.
Delphine Ernotte a la réputation de mépriser ses employés. Lorsqu’elle était à la tête d’Orange, elle était « omniprésente » et « se mêlait de tout ». Sauf du « management par la terreur », qui a provoqué 35 suicides de salariés en 2008 et 2009.
Cette dénonciation de l’accord collectif intervient au moment où France Télévisions est menacé d’une fusion avec Radio France et l’INA au sein d’une même holding. « Nous sommes en plein examen de la proposition de loi sur l’Avenir de l’Audiovisuel public, écrit l’intersyndicale. Il conviendrait de garder la tête froide pour savoir dans quel cadre nous allons nous trouver une fois le processus parlementaire achevé ». Car si la holding devait voir les jours, il faudrait à nouveau lisser les statuts entre ses différentes entités, France Télévisions, Radio France et l’INA.
Après la suppression de la redevance et de la publicité sur certains créneaux, « les financements censés compenser ces pertes ont été sans cesse réduits, créant un véritable plan social au long cours ». Pour l’heure, rien n’est prévu sur ce point pour l’examen du texte. Les sénateurs en débattent ce jeudi 10 et vendredi 11 juillet au Sénat.
L’intersyndicale CGT-CFDT-SNJ-FO n’est pas dupe. Le projet de holding, c’est une seule personne à sa tête pour tout contrôler, « sabrer dans les effectifs des filiales, donner moins de temps et de moyens à l’équipage qui restera pour éviter qu’il ne fasse de l’ombre aux flottilles du privé et le cantonner à l’écume de l’information ». Pour garantir l’indépendance de l’Audiovisuel Public, les syndicats appellent les sénateurs à se mobiliser fortement lors de la seconde lecture du texte dans la Chambre haute.
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