Rodolphe Saadé à la Maison Blanche, revirement sur les droits de douane, chute du bitcoin… Ce qu’il faut retenir des annonces économiques de Donald Trump

Alors que la suspension de l’aide militaire avec Kiev par les États-Unis suscite l’inquiétude des Ukrainiens, la politique économique du président milliardaire américain et sa guerre commerciale sont également l’objet de multiples annonces et revirements. Voici trois éléments à retenir.

Un investissement de 20 milliards de dollars aux États-Unis de Saadé

Rodolphe Saadé, le français PDG du troisième armateur mondial, devenu magnat des médias, a été reçu dans le bureau ovale. « Je suis ravi d’annoncer que [CMA CGM] va investir 20 milliards de dollars aux États-Unis », a déclaré à ses côtés, jeudi 6 mars, Donald Trump depuis la Maison Blanche. Le président américain a affirmé que cet investissement résultait « de l’élection » présidentielle, qui s’est notamment traduite par de « grandes protections ».

Depuis son investiture en janvier, Donald Trump a commencé à relever les taxes américaines sur les importations, ce qui a pour effet de renchérir les coûts d’entrée sur le marché américain pour les entreprises qui n’y sont pas implantées. « Cet investissement massif consistera à construire des infrastructures et des terminaux logistiques pour le transport maritime, ce qui permettra de créer environ 10 000 nouveaux emplois aux États-Unis », a affirmé Donald Trump.

Rodolphe Saadé s’est dit « très enthousiaste » au sujet de cet investissement, qui pourrait s’amplifier « dans les prochaines semaines », évoquant notamment l’éventualité de construction navale de porte-conteneurs. CMA CGM a vu son bénéfice net bondir en 2024 (à 5,71 milliards de dollars pour un chiffre d’affaires de 55,5 milliards).

« Nous voudrions, M. le président, qu’il y ait plus de navires battant le pavillon américain. Nous allons passer des dix que nous opérons aujourd’hui à 30 navires sous pavillon américain, et espérons faire plus dans les mois à venir. Merci beaucoup, M. le président », a encore dit l’homme à la tête du groupe de fret maritime, depuis le Bureau ovale, devant une carte des États-Unis affichant en gros « golfe d’Amérique », l’appellation impérialiste choisie par Donald Trump pour remplacer le « golfe du Mexique ».

Une mise en scène en forme de soutien dans la droite ligne des prises de position du patronat français – à commencer par celle de Bernard Arnault – lors de l’examen du budget. Pour mémoire, propriétaire du journal la Provence en 2022, Rodolphe Saadé avait ordonné la mise à pied du directeur de la rédaction en chef du quotidien régional, au lendemain d’une opération d’Emmanuel Macron contre la drogue à Marseille. Le journal avait alors titré : « Il est parti, et nous, on reste… », en choisissant de donner la parole aux habitants de la cité de la Castellane et à leur détresse. Une mise à pied qui a évidemment suscité un tollé, le directeur de la rédaction avait été réintégré. Rodolphe Saadé détient également BFMTV et RMC.

Un recul sur les droits de douane

Le même jour, Donald Trump a reculé sur les droits de douane de 25 % qu’il avait imposés au Canada et au Mexique, amenant Ottawa à suspendre certaines mesures de représailles. Le président républicain a mis en pause jusqu’au 2 avril les droits de douane de 25 % pour les produits mexicains et canadiens respectant le cahier des charges de l’accord de libre-échange Canada-Etats-Unis-Mexique (ACEUM). Parallèlement, il a décidé de réduire à 10 % les droits de douane imposés à la potasse canadienne, utilisée comme engrais par l’agriculture américaine.

« Cela va grosso modo exclure les produits éligibles à l’ACEUM des droits de douane existants », a déclaré Donald Trump à la presse depuis le Bureau ovale de la Maison Blanche. « Pour protéger nos agriculteurs dans cette période cruciale, nous allons réduire ceux imposés à la potasse canadienne de 25 % à 10 % », a-t-il ajouté.

Une décision qui n’a « rien à voir avec les marchés », a-t-il affirmé à la Maison Blanche. Et d’insister à propos des cours de bourse : « Je ne [les] regarde même pas, car, à long terme, les États-Unis seront très forts avec ce qu’il se passe actuellement ». Reste que l’indice S & P 500 a reculé, jeudi 6 mars, de 1,78 %, tandis que le Nasdaq a perdu 2,61 %. Soit une chute respective de 7 et 10,6 % depuis leur plus haut niveau.

Une chute du cours du bitcoin après l’annonce d’une « réserve stratégique »

En outre, le même jour, Donald Trump a signé un décret pour l’établissement d’une « réserve stratégique de bitcoins », une importante marque de soutien à l’industrie des cryptomonnaies, qui a généreusement contribué au financement de sa dernière campagne présidentielle. Après cette annonce, le cours du bitcoin a perdu jusqu’à 5,7 %. Vers 02 h 45 GMT, il lâchait encore 2,66 % à 87 449 dollars.

En quoi consiste cette « réserve stratégique » ? Les États-Unis possèdent déjà quelque 200 000 bitcoins, selon le conseiller à l’intelligence artificielle (IA) et aux cryptomonnaies de la Maison-Blanche, David Sacks, ce qui représente une valeur d’environ 17,5 milliards de dollars au cours actuel. Ces avoirs sont issus de saisies judiciaires et n’ont pas été achetés par le gouvernement américain. Ces actifs sont supposés être transférés dans cette réserve stratégique, où ils seront stockés pour une durée illimitée.

« La réserve sera alimentée par des bitcoins appartenant au gouvernement fédéral et confisqués dans le cadre de procédures pénales ou civiles. Cela ne coûtera pas un centime aux contribuables (…) Le gouvernement n’acquerra pas d’actifs supplémentaires au-delà de ceux obtenus par le biais de procédures de confiscation », a insisté David Sacks.

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