En soutien à Bolsonaro, Donald Trump menace Lula et attaque le Brésil avec des frais de douane

Une nouvelle fois, Donald Trump use des – ce qu’il considère être – leviers de pression pour obliger un État à se plier à ses exigences. L’imposition à 50 % de droits de douane additionnels sur les produits brésiliens, contre 10 % actuellement, apparaît ainsi comme une énième tentative du président des États-Unis de se lancer dans un nouveau rapport de force. Sa nouvelle cible : Luiz Inácio Lula da Silva ; ou plutôt ce qu’il représente. À savoir l’opposition à l’un de ses rejetons, élu dans le sillage de sa première prise de la Maison Blanche en 2017, Jair Bolsonaro, dont il tente de réhabiliter l’image.

L’occupant de la Maison Blanche a donc ouvertement déclaré la guerre à son homologue de gauche, mercredi 9 juillet, avec une nouvelle salve de menaces diffusées sur son réseau Truth Social. L’annonce des nouveaux frais de douane, actifs à partir du 1er août, à permis à Donald Trump de ressortir (en apparence) victorieux de cette première manche, avec la chute du réal brésilien. La monnaie du pays d’Amérique du Sud a touché son plus bas niveau depuis début juin, à 5,6052 réaux pour un dollar.

Agir en « réciprocité » à « toute mesure de hausse des droits de douane »

La réalité est que le dirigeant de gauche considère avoir les cartes en main. Le Brésil n’est pas dépendant des États-Unis – qui dégagent un excédent commercial dans leurs échanges avec le pays – avec seulement 12 % de ses exportations destinées à son voisin d’Amérique du Nord. La puissance agro-industrielle de Brasília a été, dans le sillage de la stratégie diplomatique de Lula, redirigée vers de nouveaux partenaires, dont le premier d’entre eux s’avère être la Chine (30 % des exportations).

Lula n’a attendu que quelques heures pour répliquer. Brasília a annoncé réfléchir à agir en « réciprocité » à « toute mesure de hausse des droits de douane de manière unilatérale ». Alors que la première puissance économique d’Amérique latine avait, jusqu’ici, été moins frappée que d’autres par la guerre commerciale trumpienne, le pays se retrouve visé en réaction à sa politique interne. La passe d’armes déclenchée par Donald Trump relève ainsi moins d’un conflit économique que d’une confrontation idéologique.

Il n’est, donc, guère étonnant que l’ancien dirigeant d’extrême droite Jair Bolsonaro ait vu son nom être au centre des échanges. Accusé d’avoir été le « leader d’une organisation criminelle » ayant conspiré pour son maintien au pouvoir après l’élection présidentielle d’octobre 2022, l’ancien militaire, chantre de la mouvance ultra-conservatrice brésilienne risque jusqu’à 40 ans de prison. Le 8 janvier 2023, à peine une semaine après l’investiture de Lula, des milliers de bolsonaristes avaient saccagé le Congrès, la Cour suprême et le Palais présidentiel en réclamant un putsch de l’armée. L’ancien militaire connaîtra son sort à l’issue de son procès face à la Cour suprême, qui pourrait s’achever dans les prochains mois.

« Une chasse aux sorcières »

Dans une lettre adressée mercredi 9 juillet à Lula, Donald Trump affirme que « la manière dont le Brésil traite l’ancien président Bolsonaro (…) est une honte internationale ». Les poursuites judiciaires contre l’ex-président sont, selon le locataire de la Maison Blanche, « une chasse aux sorcières (qui) doit cesser immédiatement ». Jair Bolsonaro ne s’y est pas trompé en remerciant chaleureusement son « ami » états-unien.

Lula a aussitôt rejeté cette « interférence », tandis que le ministère brésilien des Affaires étrangères a convoqué, mercredi, le diplomate états-unien Gabriel Escobar pour protester contre « une ingérence indue dans les affaires internes brésiliennes », suite au soutien apporté par l’ambassade à Jair Bolsonaro. La représentation des États-Unis au Brésil avait publié, plutôt dans la semaine, un communiqué où elle jugeait « honteuse » la « persécution politique » dont serait victime l’ancien dirigeant ultraconservateur.

Donald Trump accuse plus largement le Brésil de trop vouloir s’extirper du carcan états-unien. Le dirigeant ayant lui aussi provoqué une tentative de coup d’État estime le Brésil coupable d’« attaques insidieuses contre les élections libres et la liberté d’expression fondamentale des Américains ». En cause : les tentatives de la Cour suprême brésilienne de réguler les réseaux sociaux et la désinformation sur les plateformes numériques. « Le Brésil est un pays souverain avec des institutions indépendantes qui n’acceptera la tutelle de personne », lui a rétorqué Lula, dans un communiqué, refusant toute « ingérence ou menace » contre la justice brésilienne.

De même, la crise entre le Brésil et les États-Unis va au-delà même de leur relation bilatérale. L’espace que comptent occuper les Brics – le rassemblement de puissances du Sud global, dont l’Inde, la Russie, la Chine et l’Afrique du Sud -, sur la scène internationale a provoqué l’ire de Donald Trump. Ce dernier a par exemple menacé, lundi 7 juillet, de droits de douane supplémentaires « tout pays s’alignant sur les politiques anti-américaines des Brics ». La réponse de Lula, qui peut résumer le rapport entre le Brésil et les États-Unis : « Nous ne voulons pas d’un empereur. »

Face à l’extrême droite, ne rien lâcher !

C’est pied à pied, argument contre argument qu’il faut combattre l’extrême droite. Et c’est ce que nous faisons chaque jour dans l’Humanité.

Face aux attaques incessantes des racistes et des porteurs de haine : soutenez-nous ! Ensemble, faisons entendre une autre voix dans ce débat public toujours plus nauséabond.
Je veux en savoir plus.