« TotalEnergies profite de ce système à bas coût » : un rapport révèle des abus commis par les sous-traitants du pétrolier en Ouganda

Rapports, études et reportages s’accumulent pour dénoncer les nombreuses défaillances des projets pétroliers de TotalEnergies en Ouganda. Violences sexuelles et déplacements forcés révélés par la Fédération Internationale pour les droits humains (FIDH), forages pétroliers climaticides, menace d’un parc naturel, violation des droits humains et manquement au devoir de vigilance, violente répression des mouvements d’oppositions

Les violations des droits des communautés et les impacts environnementaux causés par les projets Tilenga et EACOP en Ouganda sont maintenant bien documentés par les associations, les ONG et les médias. Cependant, « la situation des travailleurs et travailleuses du secteur n’a fait l’objet que de très peu ou pas d’attention, malgré de nombreux accidents y compris mortels », s’inquiète les Amis de la Terre.

« Se plaindre n’était jamais une option »

Si Total a toujours mis en avant l’argument des emplois créés grâce à ses projets, la réalité du travail à Tilenga et EACOP semble être bien plus sombre. Rogers Byaruhanga, 26 ans, originaire d’un village tout près du lieu d’implantation des principaux projets pétroliers ougandais, a travaillé en 2022 pour CIVTEC Africa Limited, sous-traitant de Mota-Engil, en charge de la préparation du site du projet Tilenga.

Ce travailleur a eu le dos brisé suite à un accident sur son chantier. Il a perdu son travail, mais a aussi été rapidement abandonné ans aucune aide financière malgré de graves séquelles physiques. Il parle également de conditions de travail difficiles et de mauvais traitements avant son accident. « TotalEnergies a le devoir de veiller à ce que ses prestataires et sous-traitants respectent les droits humains et les normes de sécurité », estime Rogers Byaruhanga.

Olive Nyakato travaillait comme plombière pour un autre prestataire du projet Tilenga. Elle dénonce des faits de harcèlement sexuel, des discriminations et avoir été licenciée trois mois avant la fin de son contrat, sans explication. « Certains superviseurs et collègues masculins m’ont fait des avances déplacées ou m’ont touchée d’une manière qui m’a mise mal à l’aise et m’a fait me sentir en danger. Se plaindre n’était jamais une option : cela ne faisait qu’empirer les choses », raconte cette habitante du village de Kasenyi.

Il ne s’agit que d’exemple parmi les témoignages recueillis par l’Institut Africain pour la gouvernance énergétique (AFIEGO), publiés par les Amis de la Terre. D’autres font état de licenciements abusifs, de discriminations, de conditions de travail intolérables… « Il est inacceptable que le droit du travail soit systématiquement bafoué par les sous-traitants et que les travailleurs des projets pétroliers souffrent ainsi et soient exposés à tous ces dangers. Total ne fait rien car elle profite de ce système à bas coût », s’indigne Juliette Renaud, coordinatrice des Amis de la Terre France.

« Total et ses partenaires du projet pétrolier Tilenga se vantent souvent du nombre d’Ougandais, y compris des membres des communautés affectées, qu’ils emploient », fustige Diana Nabirume, d’AFIEGO. Mais « ces travailleurs sont instrumentalisés pour susciter du soutien au projet alors qu’ils subissent des violations que personne ne devrait endurer », regrette-t-elle.

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