Frappes de missiles en Ukraine : "Les Russes veulent briser le moral des civils"
Au matin du 29 décembre 2023, les alertes qui signalent les missiles russes à l’approche résonnent dans de nombreuses villes ukrainiennes.

Kiev, Kharkiv, Dnipro, Zaporijjia ou encore Odessa : de nombreuses agglomérations sont touchées par les tirs de missiles balistiques russes. C’est également le cas de certaines villes situées dans l’ouest du pays - d’habitude moins frappées que d’autres localités plus proches du front - comme Lviv, particulièrement touchée le 29 décembre.
Ce sont des drones kamikazes russes Shahed - de fabrication iranienne - qui frappent la ville de Lviv, où un lycée est notamment touché.
The lyceum of Lviv which was subjected to the russian attacks yesterday pic.twitter.com/ytll5c2CjO
— Oriannalyla 🇺🇦 (@Lyla_lilas) December 29, 2023
À Kiev, la station de métro Lukyanivska, connue pour être un lieu de refuge pour les civils en cas de bombardement, est également prise pour cible ce jour-là.
Метро "Лук'янівська", Київ. Наслідки російського обстрілу
— Ukrinform (@UKRINFORM) December 29, 2023
📸: Євген Котенко, Кирило Чуботін/Укрінформ pic.twitter.com/A7sNotyMzS
“Tout le monde ressent la peur : des enfants aux personnes âgées, même les animaux sont terrifiés”
Habitante de Kiev, notre Observatrice, Tetiana Kuznietova, âgée de 62 ans, décrit la peur que génèrent les bombardements.
Les explosions sont assourdissantes, c’est comme si le ciel éclatait juste au-dessus de votre tête. Certains courent au sous-sol, d’autres vers un abri anti-bombes, d’autres encore vers le métro. Les gens se déplacent vers les couloirs, les cages d'escalier - pour être le plus loin possible des fenêtres. Nous écoutons les explosions, et essayons de déterminer approximativement si les impacts sont loin ou proches de nous. Nous regardons les réseaux sociaux qui nous informent des endroits touchés. Tout le monde ressent la peur : des enfants aux personnes âgées, même les animaux sont terrifiés.
Selon elle, les missiles de type balistique sont beaucoup plus dangereux que les autres roquettes ou armes de la même catégorie :
Ils tombent soudainement du ciel, il est donc impossible de les détecter : d'abord, il y a une explosion et ensuite seulement un signal d'alarme, il est difficile de les abattre.
À la suite des frappes du 29 décembre, les Ukrainiens auraient répliqué en ciblant la ville russe de Belgorod. En réponse, les troupes russes ont bombardé intensément l'Ukraine le 2 janvier, frappant plusieurs immeubles peuplés de civils.
— Dominik (@99Dominik_) January 2, 2024
“Une amie proche se trouvait justement dans une maison près de laquelle une roquette est tombée”
Ce jour-là, Kiev a ainsi connu un nombre record de bombardements. C’est ce que nous a confié notre Observatrice, Olga Lugovska, psychothérapeute dans cette ville.
Le 2 janvier, je me suis réveillée dans la nuit à cause du bruit des missiles anti-aériens. J'ai regardé les chaînes Telegram : ils disaient que des drones "Shahed" avaient été abattus par les missiles ukrainiens. Je suis allée me réfugier dans la salle de bain, et j’ai entendu les drones voler, cela fait le même bruit qu’une mobylette. Après ça, il est très difficile de s’endormir. Vers 6 heures du matin, les sirènes ont retenti. J'avais vraiment envie de dormir, mais une voix dans ma tête m'a ordonné de me lever et d’aller dans l’abri anti-bombes. À l’intérieur, les bruits des explosions étaient étouffés, mais on ressentait de très fortes vibrations au sol.
Une fois l’attaque terminée, vous quittez l’abri anti-bombes et êtes heureux que votre maison soit intacte. Ensuite, vous commencez à appeler et à écrire à tous ceux que vous connaissez avec une seule question : "Comment allez-vous ?" Et vous attendez la réponse : "Tout va bien. Vivant."
Le 2 janvier, j'ai découvert qu’une amie proche se trouvait justement dans une maison près de laquelle une roquette est tombée. Elle et ses amis ont subi une commotion cérébrale et sont toujours sous la surveillance de médecins. Ils se sont également retrouvés en un instant sans appartement, ni voiture. Finalement les voisins se sont mobilisés afin de réparer l’immeuble.
“Les Russes ont réussi à renouveler leur stock de missiles”
Alors qu’il n’y avait pas eu de frappes d’une telle ampleur depuis longtemps, Xavier Tyelman, consultant en aéronautique, explique ce retour par les atermoiements de la logistique russe :
Cette reprise s’explique par le fait qu’ils ont réussi à renouveler leur stock de missiles qu’ils avaient utilisés l’année dernière. Il y a un an, on estimait que le stock de missiles russes était en dessous de 400 exemplaires. Là, ils sont à nouveau à 800 unités donc ils reprennent les frappes.
Xavier Tyelman réagit au fait que ce sont essentiellement des zones civiles qui ont été touchées par les récentes frappes :
Les Russes commencent leur campagne hivernale en visant exclusivement des cibles civiles afin de faire souffrir la population, leur but est de rendre la vie des gens impossible pour avoir un impact sur leur moral.
Les Russes n'arrivent pas à toucher les infrastructures militaires ukrainiennes, car elles sont protégées par les défenses anti-aériennes de provenance américaine. Du coup, ils visent des zones civiles qui ne sont pas pourvues de missiles anti-aériens.
De manière générale, les Ukrainiens ont un très bon taux d’interception : ils détruisent 90 % des missiles et des drones russes. Le problème, c'est que tout le territoire ukrainien n’est pas couvert par les systèmes de défense occidentaux.
Sur les réseaux sociaux, l’armée de l’air ukrainienne communique d’ailleurs régulièrement son taux d’interception des projectiles lancés par la Russie. Le 29 décembre, selon elle, 27 drones auraient été interceptés par la défense anti-aérienne l’ensemble du pays.
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