Guerre à Gaza : ce que l'on sait des tirs israéliens qui ont fait 27 morts près d'un centre de distribution d'aide humanitaire à Rafah
Mardi 3 juin, au moins 27 Palestiniens ont été tués par des tirs israéliens près d'un centre de distribution à Rafah, dans le sud de la bande de Gaza, a confirmé le Comité international de la Croix-Rouge (CICR). L'armée israélienne a reconnu avoir tiré sur des "suspects" qui "s'écartaient des itinéraires d'accès désignés", selon un communiqué publié sur X.
Il s'agit du troisième événement mortel sur des itinéraires menant aux sites de la Fondation humanitaire de Gaza (GHF), après les fusillades de dimanche, lundi et mardi à proximité immédiate de ce centre. Des événements qui ont poussé l'ONG à fermer ses centres une journée afin de mener "des travaux", a-t-elle annoncé mercredi. La situation humanitaire reste critique dans le territoire palestinien, avec plus de deux millions de personnes menacées de famine, selon l'ONU, après 11 semaines de blocus total israélien sur l'entrée des vivres et de l'aide. Franceinfo revient sur l'attaque survenue mardi.
Les victimes attendaient de l'aide humanitaire
Au moins 27 personnes ont été tuées et plus de 90, blessées, lorsque des soldats israéliens ont ouvert le feu mardi "sur des milliers de civils" près d'un centre de distribution d'aide humanitaire à Rafah, dans la zone d'Al-Alam, qualifiée de "zone humanitaire" par le porte-parole de la défense civile palestinienne, Mahmoud Bassal, auprès de l'AFP. Depuis plus de deux mois, la bande de Gaza est soumise à un blocus israélien strict, limitant désormais l'entrée de vivres et aggravant la famine dans l'enclave.
Les victimes attendaient l'aide américaine près d'un rond-point situé à proximité d'un centre soutenu par les Etats-Unis et Israël, mais non reconnu par l'ONU, lorsque les tirs sont survenus. Hisham Mhanna, un porte-parole du Comité international de la Croix-Rouge (CICR) dans la bande de Gaza, a confirmé avoir reçu 184 patients, dont 19 morts à l'arrivée et huit décédés peu après les faits, précisant que la majorité des blessés avaient été touchés par balle, rapporte Associated Press (AP). "Une fois de plus, des civils désespérés et affamés sont tués et blessés alors qu'ils tentent d'obtenir de l'aide. Celle-ci doit leur être acheminée en toute sécurité et avec dignité", a également dénoncé le représentant sur X.
La défense civile palestinienne accuse ainsi l'armée israélienne d'avoir ouvert le feu sur ces milliers de civils venus chercher de la nourriture. "Aujourd'hui ma mère est allée chercher de l'aide, elle est partie nous chercher de la nourriture et voilà ce qui lui est arrivé", gémit un garçon après l'attaque dans un reportage de France 2. A l'hôpital du CICR, un homme raconte de son côté que "tout d'un coup ça s'est mis à tirer et à bombarder. Tout le monde s'est écroulé. Les gens étaient obligés de marcher sur les corps." Le journaliste local Mohamed Qishta a confirmé auprès du Washington Post que la situation était chaotique dès 4h30 du matin. Il décrit des échanges de tirs près du centre GHF et rapporte des scènes de panique.
L'armée Israélienne justifie des tirs en direction de "suspects"
L'armée israélienne a reconnu avoir visé des "suspects" qu'elle estimait menaçants pour la sécurité de ses soldats. David Mencer, porte-parole du bureau du Premier ministre israélien, a quant à lui précisé à Sky News que ces tirs "avaient été tirés loin du point de distribution de l'aide". Le porte-parole militaire Effie Defrin assure de son côté que les chiffres des victimes communiqués par le Hamas étaient "exagérés", d'après AP.
La Fondation humanitaire de Gaza, soutenue par les Etats-Unis et Israël, mais rejetée par l'ONU et plusieurs ONG, a assuré qu'aucune violence ni victime civile n'avaient été recensées sur ou autour de ses centres de distribution où les tirs de l'armée israélienne ont eu lieu. Elle a notamment accusé le Hamas de diffuser des "mensonges" visant à discréditer ses opérations, rapporte la BBC. Toutefois, la GHF a reconnu mardi ne pas contrôler la zone située au-delà de ses sites, explique le média britannique. De son côté, la Maison Blanche affirme qu'elle "étudie l'authenticité" des informations faisant état de tirs mortels.
La Fondation humanitaire soutenue par Washington suspend temporairement ses opérations
Ces incidents meurtriers sont survenus en marge des distributions d'aide du GHF. Face à ces critiques, l'ONG a annoncé mardi soir une suspension temporaire de ses opérations. "Les centres de distribution seront fermés mercredi pour des travaux de rénovation, de réorganisation et d'amélioration de l'efficacité", a déclaré l'organisation, assurant que ses activités reprendraient jeudi. Lundi, le nouveau système humanitaire soutenu par Washington assurait pourtant dans un communiqué consulté par la BBC n'avoir "aucune preuve d'attaque à proximité de ses installations".
Les Palestiniens dénoncent une organisation chaotique des distributions, pointant l'absence de signalisation claire et l'obligation de passer par un itinéraire unique. Ce manque de coordination contribue à la confusion et à la dangerosité aux abords des centres, selon le Washington Post.
Israël continue par ailleurs de défendre ce mécanisme d'aide. Sur X, l'armée affirme qu'il permet notamment d'empêcher le Hamas de détourner les cargaisons. Une déclaration remise en question par les Nations unies et la directrice du Programme alimentaire mondial (PAM), Cindy McCain, qui ont affirmé, lors d'une conférence de presse le 25 mai, ne disposer d'"aucune preuve" que le groupe islamiste s'empare de l'aide humanitaire. "Les attaques dirigées contre des civils constituent une grave violation du droit international et un crime de guerre", a déclaré de son côté le Haut-Commissaire de l'ONU dans un communiqué.