« Il est ahurissant que la France soit en train de stopper la baisse de ses émissions » : la lutte contre les gaz à effet de serre devrait perdre du terrain en 2025

L’an dernier, au moment de dévoiler son bilan de l’année 2023, le Haut Conseil pour le climat (HCC) avait salué une baisse significative des émissions de gaz à effet de serre en France. L’objectif d’atteindre une division par deux des rejets de gaz à effet de serre d’ici 2030, par rapport à 1990, paraissait même en bonne voie. C’était sans compter sur un freinage alarmant sur la dernière année, qui devrait se confirmer en 2025.

Après avoir déjà marqué sérieusement le pas en 2024, la baisse des émissions de gaz à effet de serre de la France devrait ainsi à nouveau ralentir en 2025, avec une baisse estimée à seulement 0,8 % sur l’ensemble de l’année, a annoncé, vendredi 4 juillet, le Centre interprofessionnel technique d’études de la pollution atmosphérique (Citepa). Sur 2025, les émissions brutes françaises – hors puits de carbone – devraient donc atteindre 366 millions de tonnes en équivalent CO2, note l’organisme mandaté pour dresser le bilan carbone national, qui fait pour la première fois un « bilan prévisionnel » pour l’année en cours.

Une « dynamique observée ces dernières années »

Pour le premier trimestre, le Citepa note que les émissions sont même reparties légèrement à la hausse (+ 0,2 %) sous l’effet d’une forte consommation de gaz et de chauffage liée à un hiver plus frais. Pour l’année, le Citepa anticipe que le deuxième trimestre devrait voir ses émissions baisser de 1,8 %, avant -0,9 % et -0,8 % pour les troisième et quatrième trimestres. L’organisme prévoit que les secteurs qui seront en plus forte baisse seront l’industrie manufacturière et de construction (-2,4 %) ainsi que l’agriculture et la sylviculture (-1,3 %).

Les transports resteront stables, tandis que les baisses importantes observées ces dernières années sur le secteur de la production d’énergie (-7 % en 2023 et -4 % en 2024) devraient fortement ralentir en 2025 (-0,9 %). Le secteur industriel devrait voir ses émissions baisser de 2,4 % mais, selon l’Insee, cette baisse sera « essentiellement » liée au recul de la production industrielle plutôt qu’à la décarbonation.

Cette faible diminution des émissions « confirmerait le ralentissement de la dynamique observée ces dernières années », souligne-t-il. En 2024, la baisse des émissions françaises était de 1,8 %, après -6,8 % en 2023. La France, longtemps présentée comme un des bons élèves de la décarbonation, semble ainsi perdre son élan, à l’image de l’Allemagne (-3 % en 2024 après -10 % en 2023) ou du Royaume-Uni (-3,6 % après 5,1 %).

L’appel à un « sursaut collectif »

Une tendance qui pourrait se pérenniser sur les prochaines années, alors que les reculs politiques se sont multipliés ces derniers mois, tant sur l’artificialisation des sols (ZAN), que sur la restriction des véhicules les plus polluants dans les grandes villes (ZFE), en passant par la remise en cause des aides de l’État pour la rénovation énergétique des logements (MaPrime Rénov’). « Il est ahurissant que l’année des dix ans de l’Accord de Paris, et alors que les impacts du changement climatique s’aggravent, la France, par les reculs incessants de son gouvernement sur la transition écologique, soit en train de stopper la baisse de ses émissions », fustige Anne Bringault, directrice des Programmes chez Réseau Action Climat (RAC).

Si la baisse des émissions est tangible pour la production d’énergie, elle ne cesse de patiner dans d’autres secteurs : agriculture, bâtiments, industrie, transports. Le rythme de la baisse doit pourtant doubler pour atteindre les objectifs de la France à l’horizon 2030. Le Haut Conseil pour le climat a ainsi appelé à un « sursaut collectif » pour relancer l’action climatique, suite à la publication, jeudi 3 juillet, de son 7e rapport. Selon le HCC, les ambitions doivent être revues à la hausse pour espérer limiter les effets désastreux (canicules, inondations, sécheresse, incendies…) du dérèglement climatique.

Or, la marche reste encore haute tant à l’échelle nationale qu’européenne. Alors que la Commission a proposé de réduire de 90 % les émissions nettes par rapport à 1990, les émissions de l’Union européenne ne sont inférieures que de 37 % en 2025. Selon l’Insee, depuis 1900, les émissions françaises ont quant à elles été réduites de 31 %.

La Terre de nos batailles

La justice climatique, c’est notre bataille. Celle qui relie luttes environnementales et sociales pour contrer un système capitaliste faisant ventre de tout. Du vivant, de la planète, de notre humanité.

Il n’y a pas de fatalité.

  • Nous démasquons les manipulations des lobbies.
  • Nous battons en brèche les dénis climatiques mortifères.
  • Nous mettons en valeur les initiatives visant à réduire les inégalités environnementales et les fractures sociales.

Soutenez-nous.
Je veux en savoir plus