Prison de « haute sécurité » : une plainte contre Gérald Darmanin déposée pour abus d’autorité
L’avocat d’un détenu qui vient d’être transféré à la prison de haute sécurité de Vendin-le-Vieil (Pas-de-Calais), Maître Philippe Ohayon, a annoncé jeudi 24 juillet avoir déposé plainte pour abus d’autorité contre Gérald Darmanin devant la Cour de justice de la République. Cette instance est la seule habilitée à juger des ministres dans l’exercice de leurs fonctions.
La plainte, dont l’Agence France-Presse (AFP) a eu connaissance, reproche au ministre de la Justice d’avoir ordonné ce transfert « en s’affranchissant de l’obligation d’établir des liens préexistants entre le détenu, depuis la détention, et des réseaux de criminalité ou de délinquance organisée ».
Une obligation pourtant posée par le Conseil constitutionnel comme condition préalable à ces transfèrements. « Le garde des Sceaux ou son délégataire a éhontément piétiné les conditions légales fixées par le Conseil constitutionnel », estime l’avocat dans la plainte.
« Une opération dûment médiatisée, suivant un agenda politique précis »
La construction d’une prison de « haute sécurité » pour enfermer et isoler les « cent plus gros narcotrafiquants », soupçonnés de poursuivre leur activité criminelle depuis leur cellule était une promesse agitée depuis le mois de janvier par le garde des Sceaux.
Le 16 juillet, plusieurs détenus ont ainsi été informés qu’ils allaient être transférés vers la nouvelle structure. Moins d’une semaine plus tard, les 17 premiers narcotrafiquants ont effectivement été écroués à Vendin-le-Vieil. Douze autres détenus y ont été incarcérés jeudi, a annoncé Gérald Darmanin sur X (ex-Twitter).
Mi-juin, le Conseil constitutionnel a validé ce régime carcéral d’isolement, inclus dans la loi visant à lutter contre le narcotrafic, estimant que le législateur avait « défini avec suffisamment de précision les motifs d’affectation dans les quartiers de lutte contre la criminalité organisée ».
Les dispositions de la loi « subordonnent la décision d’affectation dans ces quartiers à la condition qu’il soit établi que ces personnes détenues continuent à entretenir des liens avec les réseaux de la criminalité et de la délinquance organisées pendant la durée de leur détention ou qu’elles y aient établi de tels liens », avait observé le Conseil, rapporte l’AFP.
Or, selon le plaignant, condamné pour des infractions à la législation sur les stupéfiants et les armes et soupçonné d’association de malfaiteurs criminelle, le dossier pénitentiaire « ne fait qu’induire, à partir de procédures au demeurant anciennes, une capacité à établir des liens » avec la criminalité organisée.
Le garde des Sceaux « a imposé à ses services de fonder les ordres de transfert non pas sur ”des liens établis”, mais ”des liens supposés” lui donnant la possibilité de saisir et transférer des prisonniers bien plus facilement en se délestant de la charge de la preuve imposée par les juges constitutionnels », est-il affirmé dans la plainte, où est dénoncée « une opération concertée de police administrative dûment médiatisée, suivant un agenda politique précis », rapporte l’AFP.
Le 2 juillet dernier, la Contrôleuse des prisons, Dominique Simonnot, et six représentants des membres du groupe de travail sur la régulation carcérale ont été reçus à l’Assemblée nationale. Ils y ont présenté les résultats de leur rapport et ont tenté d’alerter le pouvoir politique sur un système carcéral qui s’effondre sur lui-même. Surpopulation carcérale, santé mentale… Le ministre de la Justice choisit ses priorités.
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