Surpopulation carcérale : la France sur le podium des plus mauvais élèves d’Europe

C’est une médaille de bronze dont on serait bien passé. La France est le 3e plus mauvais élève européen en matière de surpopulation carcérale, selon le rapport annuel 2024 sur les statistiques pénales du Conseil de l’Europe, publié ce vendredi 18 juillet.

Avec 124 détenus pour 100 places de prison, l’Hexagone se classe juste derrière la Slovénie (134) et Chypre (132), tandis qu’il devance l’Italie (118), la Roumanie (116) et la Belgique (113).

Au total, sur le continent, le nombre de personnes détenues pour 100 places disponibles a augmenté, passant de 93,5 début 2023 à 94,9 au 31 janvier 2024 tandis que le taux médian de population carcérale s’y élève à 105 détenus pour 100 000 habitants.

Ce niveau est resté stable dans 24 administrations pénitentiaires sur 51 étudiées, mais il a particulièrement augmenté en Slovénie (+ 25,4 %), en Suède (+ 15,5 %), à Malte (+ 11,1 %) et a baissé en Bulgarie (-14,5 %), en Luxembourg (-14.5 %), en Turquie (-12,9 %).

« La surpopulation compromet les efforts de réinsertion »

En Turquie justement, où Recep Tayyip Erdoğan continue de multiplier les arrestations d’opposants, connaît, malgré cette baisse, le plus fort taux d’incarcération avec 356 détenus pour 100 000 habitants, loin devant l’Azerbaïdjan (264) et la Géorgie (261), qui figurent également sur ce podium.

« Les crimes violents représentaient environ un tiers de la population carcérale condamnée, notamment les homicides (11,9 %), les infractions sexuelles (8,7 %), les voies de fait (6,7 %) et les vols (6,3 %) », pointe également le rapport qui relève également que les « infractions que les plus courantes pour lesquelles des personnes purgeaient une peine d’emprisonnement étaient les infractions liées à la drogue (16,7 %) et le vol (12,3 %) », précise le rapport.

Outre que l’âge moyen des détenus est de 37 ans et que les femmes représentent 4,9 % de cette population, une proportion « remarquablement constante » dans tous les pays, le Conseil de l’Europe note, dans son communiqué, que les « étrangers représentent une part importante de la population carcérale ».

Avant d’ajouter : « mais leur répartition est très inégale selon les pays, en raison des flux migratoires, des cadres juridiques et de la géographie géopolitique ». Une appréciation à relativiser au regard des 84 % de détenus qui sont des ressortissants nationaux, selon les données collectées.

Mais ce rapport est aussi une alerte sur la préoccupante question de la surpopulation carcérale dont la France est une championne avec 84 447 détenus au 1er juin et un taux moyen de suroccupation de 160 % dans les maisons d’arrêt où sont incarcérés près de 70 % des personnes détenues.

« La surpopulation compromet sérieusement les conditions de vie de la population carcérale et les efforts de réinsertion des administrations pénitentiaires », souligne le professeur Marcelo Aebi, chef de l’équipe de recherche de l’Université de Lausanne, qui a compilé ces données pour le Conseil de l’Europe.

« Outre la promotion de sanctions alternatives à l’emprisonnement, la réduction de la durée des peines, en particulier pour les délinquants non violents et à faible risque, peut être un outil puissant pour réduire les taux d’incarcération », ajoute-t-il.

Bien loin de la surenchère carcérale promise par les ministres de la Justice, Gérald Darmanin, allant de la location de places de prison à l’étranger, à la création d’une police pénitentiaire, en passant par la contribution des personnes détenues aux frais pénitentiaires, ou la diminution du recours aux aménagements de peine.

Peu importent les traitements indignes que le système inflige et que rappelait Estelle Carraud, secrétaire générale du SNEPAP-FSU, à l’occasion de la présentation à l’Assemblée du rapport du groupe de travail sur la régulation carcérale début juillet : « Il y a plus de 5 000 matelas au sol, certains détenus sont contraints de prendre des douches froides en plein hiver, certains établissements ne sont plus en capacité de fournir des repas à toute personne détenue, car les cuisines ont été dimensionnées pour un nombre bien défini. »

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