« Il y avait un forfait de présence dans la prison » : Gérald Darmanin veut relancer les frais d’incarcération pour financer ses projets sécuritaires

Interrogé par l’Humanité, mi-avril, à propos de la politique carcérale du ministre de la Justice, Gérald Darmanin, le président de l’Observatoire français des prisons, Matthieu Quinquis, fustigeait le populisme de l’ex-ministre de l’Intérieur, dont les annonces s’enchaînent sans qu’une place soit laissée au débat. « Il les impose comme le fait du prince », lançait-il. Il n’aura fallu que deux semaines pour qu’il réitère.

Le garde des Sceaux a annoncé, à travers une lettre destinée aux agents de l’administration pénitentiaire, que les détenus devront s’acquitter de frais d’incarcération. « Comme il y a un forfait hospitalier, il y avait un forfait de présence dans la prison », a-t-il par la suite appuyé le jour même, sur le plateau du 20 heures de TF1. Le ministre fait ici référence à des frais obligatoires en vigueur jusqu’en 2003.

Surpopulation, déserts médicaux et privation de droits

« Aujourd’hui, ça coûte 10 millions d’euros par jour, le fonctionnement de nos prisons, quasiment 4 milliards d’euros par an, a tenté de justifier Gérald Darmanin. Les détenus doivent contribuer aux frais d’incarcération. » Une annonce qui symbolise la vision répressive et court-termiste de l’ex-élu républicain, qui s’entête à fermer les yeux sur la réalité du système carcérale français : surpopulation, déserts médicaux, privation de droits, perpétuation de la violence, des inégalités sociales et du racisme, vague de suicides.

« Il ne s’agit pas de faire payer les 4 milliards aux détenus, bien évidemment, mais une participation aux frais, au service public de la justice », a minimisé le garde des Sceaux, qui assume toujours plus ses ambitions pour la présidentielle de 2027. Pour mettre son projet de réforme en route, le ministre de la Justice – qui s’est dit choqué de l’inéligibilité de Marine Le Pen et a remis en cause l’État de droit qu’il est censé représenter – devra cependant passer par l’Assemblée nationale. « Il faut modifier la loi », a-t-il d’ores et déjà plaidé, annonçant qu’il allait soutenir un texte déposé dans l’Hémicycle.

Deux propositions de loi traitent de ce sujet, selon l’entourage du ministre, et devraient ainsi être examinées à l’Assemblée prochainement. « Nous allons travailler ensemble pour que ce soit un montant qui soit symbolique, mais important pour qu’on arrête avec une sorte de laxisme qui existe dans nos prisons françaises », a lancé Gérald Darmanin.

Alors que le système pénitentiaire se retrouve sous le feu des critiques – et des balles – depuis plusieurs semaines, l’ancien ministre de l’Intérieur a profité de sa lettre, envoyée à l’occasion de l’interpellation de vingt-cinq suspects dans l’enquête sur les récentes attaques de prison, pour annoncer que la « somme récoltée ira directement à l’amélioration » des conditions de travail des agents pénitentiaires. Selon l’entourage du ministre, les indigents et les personnes placées en détention provisoire ne seront pas concernés par cette mesure. Ou comment camoufler une mesure répressive en une prise de position sociale.

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