REPORTAGE. "J'espère qu'il rassemblera les gens" : aux Etats-Unis, l'Américain Léon XIV suscite de nombreux espoirs chez les fidèles

Les Etats-Unis et Chicago ont découvert qu’ils avaient donné naissance à un pape. Robert Francis Prevost, désormais Léon XIV, est né dans la grande ville de l’Illinois, il y a effectué son séminaire, mais en est parti très jeune. Les habitants de la ville, sidérés, découvrent un pape qu’ils espèrent à leur image. Le père Pedro a un grand sourire sur son visage, jeudi 8 mai, quand il débute sa messe en espagnol devant des paroissiens nombreux sur les bancs de l’église Sainte-Marie des Neiges, dans ce quartier populaire de Chicago. Il dédie l'eucharistie au nouveau pape Léon XIV tout juste élu.

Robert Prevost, né à Chicago le 13 septembre 1955, et élevé à Dolton, à deux pas d’ici, mais l’église Sainte-Marie-de-l’Assomption, où il est allé enfant, a disparu depuis longtemps. En vente aussi, la maison de briques rouges où il a vécu  avec ses parents, Louis, d’origine franco-italienne, proviseur de collège, et Mildred, bibliothécaire très dévote. Dans ce quartier aujourd’hui, on évite de traîner à la nuit tombée. Judy Matthews vit dans le centre-ville, mais elle a quand même voulu aller voir. "J"espère que le pape va porter les idéaux des habitants de Chicago, c’est une très grande ville très ouverte d’esprit", souligne-t-elle.

"Il voulait jouer au prêtre"

Dès la fumée blanche, les médias locaux se sont rués au domicile du frère du pape, John, sidéré mais pas surpris, confie-t-il à CBS Chicago. "Il y a des enfants qui veulent jouer à la guerre, lui, il voulait jouer au prêtre", raconte John. "Il prenait la planche à repasser de notre mère, il mettait une nappe dessus et il fallait qu’on joue à la messe. Il savait les prières en latin, en anglais... Il prenait ça très au sérieux, il ne blaguait pas, ce n’était pas un jeu", détaille-t-il.

Mariana Sanchez était au café avec sa mère quand la télévision a annoncé la nouvelle. "Elle ne s’attendait pas à ce que ce soit si rapide, elle a même eu les larmes aux yeux en réalisant que Léon XIV était de Chicago", déclare-t-elle. "Venir de la même ville que le nouveau pape, c’était moment incroyable pour tous les habitants de Chicago", poursuit-elle. Mariana Sanchez  aussi que le nouveau pape a quitté Chicago très jeune pour partir en mission au Pérou. "Le pape Léon a montré de la compassion pour les migrants et les pauvres", dit celle qui espère que cela changera le regard sur la migration.

"Pas seulement un Américain des Etats-Unis"

De l'autre côté des Etats-Unis, à Los Angeles, l'émotion est forte. A l'intérieur de la très contemporaine cathédrale Notre-Dame des Anges, l'heure est au recueillement après l'annonce du nouveau pape. Ils sont une centaine de paroissiens, venus pour la messe quotidienne, heureux d'entendre le nom du pape prononcé ici pour la première fois. L'élection d'un Américain est une surprise totale, y compris pour Juan Ochoa, jeune prêtre de Los Angeles : "C'est très excitant et nous sommes aussi sous le choc. Nous n'arrivons toujours pas à croire que nous avons un pape américain. J'ai toujours entendu à l'intérieur comme à l'extérieur de l'église que nous n'aurions jamais un pape américain." Le religieux reconnaît "que notre nouveau pape n'est pas seulement un Américain des Etats-Unis", puisqu'il a passé une grande partie de sa vie au Pérou. "Il a parlé en espagnol. Il a parlé à son peuple au Pérou", souligne Juan Ochoa.

Dans cette métropole où les latinos représentent la majorité des quatre millions de catholiques, le parcours de Robert Prevost est perçu comme un atout. "Il représente l'inclusion, un melting pot où tout le monde se rassemble, sans division. Cela rapproche tout le monde, et c'est ce que nous voulons", explique Gina, une fidèle sexagénaire. Le sentiment de continuité avec le pape Francois est aussi perçu comme essentiel, pour ceux, à l'image de Jordan, qui souhaitent une Eglise ouverte sur le monde : "J'espère qu'il va poursuivre dans le sens de l'unité prônée par le pape François, du dialogue, parler aux personnes qui peut-être ne s'intéressaient pas à l'église auparavant."

L'unité, un mot qui revient souvent chez ces fidèles. Certains, comme Daniel, espèrent que le pape pourra réduire les fractures au sein de la société américaine. "Je pense que le fait qu'il soit modéré est une très bonne chose, souligne-t-il. C'est peut-être une des raisons pour lesquelles il a été choisi, parce qu'il aura le courage de s'opposer à Trump, si nécessaire. J'espère qu'il rassemblera les gens, alors que la politique actuelle tend à les diviser."

L'attente est forte sur des sujets sensibles, comme l'immigration ou l'avortement. Sur ces questions, difficile de prédire comment se positionnera un pape que l'on dit attentif aux questions sociales, mais peut-être moins progressiste que son prédécesseur.