Une décision importante contre le fichage des étrangers. La demande de suspension d’un fichier « sauvage » visant les étrangers en situation régulière en Seine-Saint-Denis a été accordée, mardi 20 mai, par le tribunal administratif de Montreuil dans le cadre d’une procédure d’urgence, dont l’audience s’était déroulée une semaine plus tôt. Une victoire pour la Ligue des droits de l’homme, le Syndicat de la magistrature, le Syndicat des avocats de France, l’Association de défense des libertés constitutionnelles, la Cimade, le Gisti, et l’Adde (Avocats pour la défense des droits des étrangers).
Ce sont ces sept organisations qui avaient saisi en urgence le juge des référés sur une fiche interne émise par le préfet de la Seine-Saint-Denis et destinée aux services de la direction territoriale de la sécurité de proximité (DTSP) du département. Le document, révélé par le média Les jours, s’appuie sur la très controversée circulaire Retailleau du 28 octobre 2024. Cette « note de service de la préfecture de Seine-Saint-Denis » vise à instaurer une « fiche-réflexe » ciblant « les étrangers en situation régulière dont la présence en France représente une menace pour l’ordre public ».
Des informations à transmettre à la préfecture de Seine-Saint-Denis
Cette note enjoint les policiers du département à signaler auprès de la préfecture les étrangers en situation régulière et placés en garde à vue, en mentionnant certaines informations comme les coordonnées des personnes concernées, la photocopie des papiers de leur pays d’origine et de leur titre de séjour en France, ainsi que des extraits du casier judiciaire, un relevé d’empreintes digitales ou encore le motif de la garde à vue, même si celle-ci n’aboutit à aucune poursuite. L’ensemble devait être transmis à la préfecture « en vue du refus, du non-renouvellement ou du retrait de titre de séjour », est-il précisé dans le document.
Mais, face à ce véritable fichage des étrangers, le juge du tribunal administratif de Montreuil a fait valoir un « doute sérieux quant à la légalité du document attaqué », selon sa décision consultée par l’Agence France-Presse. Il a notamment estimé que le préfet de Seine-Saint-Denis avait empiété dans ce dossier sur les compétences dévolues au préfet de police de Paris dans les départements de « petite couronne ». « Il résulte (…) qu’il y a lieu d’ordonner la suspension » du document en cause « jusqu’à ce qu’il soit statué sur la requête au fond », a conclu le tribunal.
Un fichier sous séquestre auprès de la Cnil
Alors que le document qui vient d’être suspendu est en vigueur depuis janvier dernier, le juge des référés a ordonné dans sa décision, selon Les Jours, au préfet de la Seine-Saint-Denis de le « placer sous séquestre auprès de la Commission nationale de l’informatique et des libertés (Cnil) ainsi que de détruire toute copie qu’il détiendrait dans un délai d’un mois ».
De ce fait, le préfet en question, Julien Charles, a demandé, mardi, à ses services « la mise en œuvre immédiate de la décision du tribunal administratif » de Montreuil. Cependant, évoquant le dossier « sur le fond », le préfet « rappelle » dans un communiqué « que la loi lui donne la faculté de refuser la délivrance d’un titre de séjour, de le retirer ou de limiter sa durée de validité pour tout ressortissant étranger en situation régulière qui se serait rendu responsable de troubles à l’ordre public ». « La préfecture de la Seine-Saint-Denis continuera donc, si nécessaire et selon une procédure revue, de prendre des mesures de ce type, sous le contrôle du juge administratif », poursuit le communiqué.
Un autre tribunal administratif, celui de Nantes, avait suspendu mi-avril un document similaire à celui suspendu par le tribunal de Montreuil. Le juge avait alors estimé que cela constituait un « traitement de données personnelles » non autorisé. La préfecture de Loire-Atlantique ayant fait appel in extremis de cette décision, le Conseil d’État devrait prochainement lui consacrer une audience.
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