Naturalisation : Bruno Retailleau durcit les conditions d’accès à la nationalité
C’est la nouvelle surenchère de Bruno Retailleau, ministre de l’intérieur, sur la question migratoire : durcir l’accès à la nationalité française aux étrangers qui en feraient la demande. C’est, en tout cas, l’objet d’une circulaire, adressée aux préfets et présentée par le locataire de Beauvau ce lundi 5 mai, à Créteil (Val-de-Marne).
Cette nouvelle étape de la politique ouvertement xénophobe que mène le ministre de l’Intérieur s’inscrit dans sa volonté acharnée de trouver le moyen de faire appliquer les mesures censurées par le Conseil constitutionnel, en janvier 2024, après l’adoption de la loi immigration portée par son prédécesseur, Gérald Darmanin.
Suite au retoquage, par les juges, de la quasi-totalité des amendements portés par la droite sénatoriale dont l’actuel ministre de l’intérieur était chef de file, l’intéressé avait jugé, que « le Conseil constitutionnel (venait) de censurer la voix des Français ».
Une nouvelle étape de la politique xénophobe menée par Bruno Retailleau
À sa prise de poste, sous le gouvernement Barnier, Bruno Retailleau pensait pouvoir revenir à la charge avec un nouveau projet de loi contenant une partie des 35 mesures censurées. Ses ambitions contrariées, il a changé son fusil d’épaule en choisissant, d’un côté, de durcir l’application du droit existant par voie réglementaire, de l’autre, en encourageant le dépôt de nouvelles propositions législatives hostiles aux étrangers.
Dans cette logique, il a adressé un premier ordre de marche aux préfets, en janvier 2025, abrogeant la circulaire Valls sur la régularisation par le travail, et a soutenu avec verve, en mars 2025, les textes portés par ses anciens collègues du Palais Bourbon visant à augmenter la durée de rétention administrative de 90 à 210 jours ainsi qu’à conditionner l’accès des personnes de nationalité extracommunautaire aux prestations familiales à deux années de présence régulières sur le territoire et à trente mois d’activité professionnelle.
Le Conseil constitutionnel avait pourtant jugé, en janvier 2025, que ce type de contraintes étaient « contraires à la Constitution ». Peu importe, pour Bruno Retailleau, l’État de droit n’est « ni intangible ni sacré ».
Rejeter les demandes des étrangers qui auraient été en situation irrégulière
Dans le même esprit, la nouvelle circulaire sur l’accès à la nationalité comporte trois critères que les préfets sont désormais chargés de resserrer. « Je demande (…) de rejeter les demandes des étrangers qui auraient été en situation irrégulière par le passé », a d’abord expliqué le ministre.
Difficile de connaître le nombre exact de personnes visées par cette directive. Mais combien de mineurs non accompagnés, dont la minorité est contestée par les services de l’Aide sociale à l’enfance, tombent régulièrement dans l’illégalité avant qu’un juge pour enfant ordonne finalement sa prise en charge ? Combien de personnes perdent leur titre de séjour faute d’avoir obtenu un rendez-vous pour son renouvellement du fait de la dématérialisation généralisée des services préfectoraux ?
Les associations de défense des droits des exilés ne cessent de pointer cet état de fait. Une manifestation est d’ailleurs organisée, à Créteil, mercredi 7 mai, à l’appel de la Ligue des droits de l’homme et du Réseau éducation sans frontières, pour dénoncer l’hécatombe de « rendez-vous impossibles (en préfectures), dossiers bloqués (et) renouvellements refusés ».
Bruno Retailleau souhaite, en outre, relever le niveau de l’examen d’oral de français des candidats à la naturalisation et « créer, à partir du 1er janvier 2026, un examen civique qui permettra de connaître auprès du demandeur sa connaissance de notre histoire par sa connaissance de la culture civique », a-t-il précisé. Le test d’évaluation de français pour l’intégration, la résidence et la nationalité (TEF IRN) a pourtant déjà évolué. Depuis le 1er avril 2025, il est censé certifier « la compétence à communiquer en langue française du niveau A1 au niveau B2 du Cadre européen de référence pour les langues ».
Les préfets devront, par ailleurs, vérifier « si les demandeurs disposent de ressources suffisantes pour ne pas dépendre (…) des aides sociales », a ajouté le ministre de l’Intérieur, estimant que leur autonomie financière doit pouvoir se traduire par une « insertion professionnelle » sur cinq ans et des « ressources suffisantes et stables ». Pour la présidente de France terre d’asile, Najat Vallaud-Belkacem, « on a vraiment le sentiment d’une vacuité du discours politique qui ne sert qu’à nourrir des petits intérêts politiciens ». Elle complique cependant très concrètement la vie de milliers de personnes qui aspirent à devenir citoyen français.
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