« Débloque ta préf’ » : l’outil de mobilisation pour le droit au séjour lancé par la députée communiste Elsa Faucillon
Pourquoi avoir lancé la campagne « Débloque ta préf’ » ?

Elsa Faucillon
Députée PCF des Hauts-de-Seine
Alors qu’elles ont fait toutes les démarches à temps, de nombreuses personnes se retrouvent sans titre de séjour ou sans renouvellement de leur titre de séjour. En circonscription, nous sommes sollicités, interpellés en permanence. Du fait des retards en préfecture, ces personnes étrangères perdent parfois leur travail ou la possibilité d’en avoir un. Il arrive que faute de titre de séjour, elles n’accèdent pas au logement social qui leur avait été attribué. Parfois, elles perdent des prestations sociales, ne peuvent plus faire valoir certains droits.
Et souvent, il s’agit de personnes très insérées dans la société française. En discutant avec d’autres députés, j’ai vu que ce n’était pas un problème spécifique aux Hauts-de-Seine : c’est un problème global, mais renforcé dans les préfectures où il y a beaucoup de demandes au service des étrangers. Devant ce constat, avec d’autres, je me suis dit qu’il y avait besoin d’un outil de mobilisation pour les personnes concernées. Avec la dématérialisation des demandes et des renouvellements de titres de séjour, les personnes concernées sont invisibilisées. Le but de la campagne est de montrer les effets que cela produit dans la vie quotidienne.
D’où vient le problème : des politiques d’austérité ou des politiques anti-immigrés ?
Les deux. François Bayrou annonce une attaque en règle contre les services publics, avec le non-remplacement d’un tiers des départs en retraite. Il y a bien eu des augmentations d’effectifs dans les services des étrangers, mais insuffisantes. Les problèmes sont connus mais les moyens ne suivent pas. La procédure administration numérique pour les étrangers en France (Anef) est faite pour que les gens s’y perdent, elle démontre une volonté politique d’entrave à l’accès au séjour. La loi immigration comme la circulaire Retailleau témoignent d’un climat anti-immigrés plus général.
La circulaire Retailleau pose-t-elle un problème ?
Oui. La loi immigration est censée primer sur cette circulaire. Et alors qu’on pouvait penser que la partie du texte de loi sur les métiers en tension aurait pu créer quelques régularisations supplémentaires par le travail, c’est la circulaire, dans son versant le plus restrictif, qui prime. Les admissions exceptionnelles au séjour sont d’une grande exceptionnalité.
Quels outils cette campagne met-elle à disposition des personnes concernées ?
Dès à présent, une pétition pour pouvoir signer, partager autour de soi et témoigner est en ligne. Il faut qu’on se rende compte de ce que cela fait peser sur la vie des personnes, mais aussi de leur famille. Car, on l’ignore, c’est souvent une affaire de famille. Face aux démarches administratives dématérialisées, je suis souvent sollicitée par un enfant, un voisin. Le récit doit rendre visible certaines exigences. Il faut un meilleur accueil physique en préfecture. Cela demande des moyens.
Et nous demandons que les personnes se voient délivrer un document permettant de montrer qu’elles sont en règle, qu’elles ont fait les démarches dans les temps impartis. Cela passe soit par un récépissé, soit par une attestation provisoire d’instruction. La pétition sera remise au ministère de l’Intérieur fin septembre. La dématérialisation fait qu’on ne voit plus de files interminables devant les préfectures. Pourtant, elles existent bel et bien. Il y a besoin de les matérialiser. À la rentrée, il y aura des initiatives devant les préfectures.
Vous intervenez beaucoup auprès des préfectures. À quel type de réactions faites-vous face ?
J’agis essentiellement pour des situations particulières. Je vois bien qu’il n’y a pas d’hostilité aux renouvellements de titre : quand il y a un risque de perte de travail ou de droits, les fonctionnaires s’attachent à régler la question au plus vite. Dans les services des étrangers, personne ne raconte que tout se passe bien, que les moyens sont à la hauteur. Ils se battent pour avoir davantage de personnel.
Comme dans d’autres services publics, il y a beaucoup de vacataires. Cela entraîne un turn-over important, alors que la complexité du droit des étrangers plaiderait pour que les personnels restent dans la durée afin de se former. En revanche, le discours tenu, c’est que cela va s’arranger. Mais cela ne s’arrange pas, cela empire. On nous dit que les procédures Anef 2.0 vont améliorer les choses. Alors que nous demandons une alternative humaine à la dématérialisation, on nous parle de la mise en place d’une procédure dématérialisée appuyée par l’intelligence artificielle.
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