Portiques à l’entrée des écoles, fouille des élèves… Après le drame de Nogent, la course au plus sécuritaire crispe jusqu’au sein de la macronie

Face au meurtre d’une surveillante par un élève de 14 ans à l’entrée du collège Françoise-Dolto à Nogent (Haute-Marne), mardi 10 juin, le gouvernement tente de trouver le ton à adopter. Quitte à s’écharper sur quelle mesure sécuritaire mérite d’être enclenchée et délaisser le volet préventif. Invitée à s’exprimer au micro de France Inter, dans la matinée de mercredi, Élisabeth Borne souhaite « assurer au maximum la sécurité dans les enceintes scolaires, que ça reste des sanctuaires ».

Après avoir annoncé une minute de silence dans tous les établissements scolaires jeudi midi, la ministre de l’Éducation nationale a esquissé les potentielles priorités de son ministère. « Je suis ouverte à tout ce qui peut permettre d’éviter l’introduction d’armes dans les établissements, a-t-elle enclenché. C’est un travail qu’on mène avec les collectivités qui sont responsables de la sécurisation des enceintes scolaires : les départements pour les collèges, les régions pour les lycées. »

« On peut, avec ceux qui le souhaitent, tester tous les dispositifs »

L’ex-première ministre s’est par la suite jointe à la proposition de son successeur, François Bayrou, qui a prôné « l’expérimentation » de portiques de détection d’armes à l’entrée des établissements scolaires, lors d’une séance de questions au gouvernement à l’Assemblée nationale, un jour plus tôt. « On peut, avec ceux qui le souhaitent, tester tous les dispositifs, les portiques, les tourniquets », a ainsi estimé la ministre de l’Éducation nationale. Ces annonces sécuritaires ont cependant été accueillies avec circonspection jusque dans le camp macroniste.

Un jour plus tôt, le patron du parti Renaissance – et auteur du texte répressif sur la justice des mineurs – Gabriel Attal avait exprimé son scepticisme sur le plateau de BFMTV, en estimant que ces portiques ne permettraient « absolument pas d’empêcher » l’introduction d’une arme blanche dans un établissement. « Un collège, vous avez en moyenne 500 ou 600 élèves. Vous imaginez, ils arrivent tous à la même heure, ça fait des attroupements (…) à un moment où, avec le risque terroriste, on veut au contraire les limiter devant les établissements », a-t-il poursuivi.

Un troisième ancien premier ministre a exposé son avis sur les annonces de François Bayrou : Edouard Philippe. Le maire du Havre s’est également montré dubitatif à propos des portiques : « Je ne suis pas sûr que ça soit le bon message », a-t-il lancé sur TMC. Même son de cloche pour la présidente de l’Assemblée nationale, Yaël Braun-Pivet, qui estime que l’installation de portiques « est céder à une illusion de sécurité », au micro de RTL, mercredi 11 juin.

« Il ne s’agit pas de faire des bunkers, il s’agit d’assurer la sécurité au sein des établissements, s’est justifiée quelques heures plus tôt Élisabeth Borne. Ça passe notamment par des opérations de fouilles inopinées et aussi par une très grande vigilance sur les problèmes psychologiques que peuvent rencontrer des élèves. » L’entrée des établissements scolaires n’a pas été le seul sujet de discorde. Lors d’un entretien au JT de 20 heures sur TF1, mardi soir, François Bayrou a aussi expliqué vouloir « élargir la liste des armes » blanches interdites à la vente.

« Pour l’instant, il n’y a que les poignards qui sont interdits », a lancé le premier ministre. « On va durcir les règles. Ça veut dire qu’on va mettre des sanctions massives, financières, des interdictions. On ne pourra plus vendre ces armes blanches », a poursuivi le chef de l’État, Emmanuel Macron, lors d’un entretien sur France 2, le même soir. D’après une circulaire publiée le 27 mars, sur 6 200 contrôles à l’entrée des établissements scolaires, policiers et gendarmes ont saisi « près de 200 couteaux » et « 567 conseils de discipline ont été réunis ».

Le président de la République a aussi pointé la responsabilité des réseaux sociaux, qu’il ambitionne d’interdire au moins de 15 ans. « Je nous donne quelques mois pour arriver à faire la mobilisation européenne, a-t-il annoncé face à Léa Salamé et Hugo Clément. Sinon, on commence à le faire en France. On ne peut pas attendre. » Ce à quoi Élisabeth Borne souscrit, estimant qu’il faut « protéger nos jeunes de la surexposition aux écrans ». Les réseaux sociaux « banalisent la violence » et font « perdre leurs repères à notre jeunesse », a-t-elle ajouté, lors de son entretien sur France Inter.

Si la ministre a aussi abordé un volet consacré à la santé mentale des élèves – entre « la mise en place de deux adultes formés pour détecter les signaux de malaise psychologique chez les jeunes » et « des effectifs d’infirmiers et d’infirmières, d’assistants de service social, de psychologues à l’Éducation nationale » renforcés -, le manque de moyens systémiques au sein de l’Éducation nationale a, de nouveau, été laissé de côté.

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