La lente agonie de la Convention d’Ottawa se poursuit. Le président de l’Ukraine, Volodymyr Zelensky, a signé, dimanche 29 juin, un décret en vue d’un retrait du pays d’Europe de l’Est de ce texte qui interdit l’utilisation de mines antipersonnel. Plus de trois ans après le début de l’invasion du pays par la Russie et alors que Moscou utilise ces charges explosives, Kiev a signé un décret qui devra, ensuite, être soumis au parlement ukrainien, la Rada.
Si jamais le vote final se révèle en faveur de cette décision présidentielle, il faudra que Kiev la notifie ensuite aux Nations unies (ONU), enclenchant un processus de retrait – qui dure officiellement un semestre après la notification. Cependant, en vertu de la Convention d’Ottawa, si « à l’expiration de cette période de six mois, l’État parti est engagé dans un conflit armé, le retrait ne prendra pas effet avant la fin du conflit armé ».
« La Russie fait preuve d’un cynisme extrême »
Volodymyr Zelensky en a conscience. Il a souligné dans son message quotidien du dimanche 29 juin que l’Ukraine était prête pour faire face à « la complexité de la procédure de retrait lorsqu’elle est mise en œuvre en temps de guerre ». Le président ukrainien estime néanmoins que ce retrait est une « étape politique » indispensable. « La Russie fait preuve d’un cynisme extrême dans son utilisation des mines antipersonnel, a ainsi accusé le chef d’État. C’est la marque de fabrique des tueurs russes : détruire des vies par tous les moyens à leur disposition. »
Si l’Ukraine a ratifié la Convention d’Ottawa en 2005, la Russie ne s’est jamais jointe à ce traité signé par plus de 160 pays. Ce dernier interdit l’emploi, le stockage, la production et le transfert des mines antipersonnel conçues pour être enterrées ou dissimulées dans le sol. Déclenchées au contact ou à proximité d’une personne, celles-ci peuvent tuer ou provoquer de graves blessures et restent souvent actives après un conflit, empêchant ainsi le retour des populations.
Le ministère ukrainien des Affaires étrangères a qualifié dans un communiqué ce retrait de « difficile » mais « nécessaire et proportionné » au regard de « la priorité absolue qui est de défendre notre État contre l’agression brutale de la Russie ». Roman Kostenko, un député ukrainien qui siège à la commission parlementaire sur la sécurité nationale, s’est quant à lui félicité de la décision prise par Volodymyr Zelensky. « C’est une mesure que la réalité de la guerre exigeait depuis longtemps, a-t-il commenté sur Facebook. La Russie n’est pas signataire de cette convention et utilise massivement des mines contre nos militaires et nos civils. Nous ne pouvons pas rester tenus par des obligations (alors que) l’ennemi n’a aucune restriction. »
En mars dernier, la Lituanie, la Lettonie, l’Estonie ainsi que la Pologne, toutes des alliées proches de l’Ukraine, ont annoncé leur décision de quitter la Convention d’Ottawa, une mesure alors déplorée par des ONG. « Le nombre de victimes de mines a chuté de 25 000 par an en 1999 à moins de 5 000 en 2023. Cependant, ces avancées sont aujourd’hui menacées », constatait alors Elliot de Faramond, responsable de plaidoyer à Handicap international. Même son de cloche pour le Comité international de la Croix-Rouge (CICR), qui dénonçait un « dangereux recul pour la protection des civils dans les conflits armés ». Les mines antipersonnel continuent de tuer et de mutiler des milliers de personnes chaque année, 85 % des victimes sont des civils, dont une grande proportion d’enfants.
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