Parce qu’ils ont osé contrecarrer la politique raciste de la Maison Blanche – en interdisant l’expulsion de citoyens pendant à peine 48 heures -, quinze juges fédéraux du tribunal de district de l’État du Maryland se retrouvent dans le viseur… de leur ministère de tutelle. « Il s’agit simplement de la dernière action en date du ministère de la Justice de Pam Bondi pour mettre un terme aux abus judiciaires illégaux », a justifié un porte-parole de la procureure générale, dans un message publié sur X, mercredi 25 juin.
La plainte du ministère de la Justice a été déposée mardi dans la ville de Baltimore et désigne les États-Unis et le ministère de la Sécurité intérieure en tant que plaignants. « L’injonction automatique des défendeurs détermine si l’étranger a besoin ou sollicite une mesure d’urgence, si le tribunal est compétent ou non pour connaître de ses demandes, et quel que soit le caractère futile de ces dernières, résume cette dernière. Et cela dans le contexte de l’immigration, empiétant ainsi sur les pouvoirs fondamentaux du pouvoir exécutif. »
Une ordonnance jugée « illégale et antidémocratique »
L’administration Trump entérine ainsi sa stratégie d’intimidation en passant à l’étape supérieure : retourner l’outil qu’est la justice contre celles et ceux qui en sont les représentants. Avec sa plainte, la Maison Blanche vise particulièrement le juge George L. Russell III, qui a émis en mai dernier une ordonnance jugée « illégale et antidémocratique ». Cette dernière accordait simplement un sursis d’expulsion de deux jours à toute personne détenue par les services d’immigration qui dépose une requête en habeas corpus – soit une action en justice alléguant une détention injustifiée.
« L’afflux récent de requêtes en habeas corpus concernant des détenus étrangers (…) qui ont été déposées après les heures normales d’audience et les week-ends et jours fériés a créé des difficultés de planification et a donné lieu à des audiences précipitées et frustrantes dans la mesure où il est difficile d’obtenir des informations claires et concrètes sur l’emplacement et le statut des requérants », expliquait alors le juge du district du Maryland dans son ordonnance permanente. Cette dernière s’est ainsi appliquée non seulement aux affaires dont il avait la charge mais aussi à celles des quatorze autres juges.
C’est justement cette ordonnance permanente que le ministère de la Justice tente de démonter. L’administration menée par Pam Bondi fait valoir que, selon d’autres précédents de la Cour suprême, les juges se doivent de statuer sur chaque cas individuellement. L’ordonnance permanente de George L. Russell III, à la visée globale, fait « précisément ce que la Cour suprême a interdit », justifient-ils donc dans leur plainte longue de 22 pages.
Ce procès politique a été rapidement condamné par le Parti démocrate. « Après avoir violé de manière flagrante des ordonnances judiciaires et lancé des attaques personnelles contre des juges, la Maison Blanche bouleverse notre Constitution en poursuivant les juges eux-mêmes, a fustigé le gouverneur du Maryland, Wes Moore, dans un communiqué publié mercredi 26 juin. Ne vous y trompez pas : cette action sans précédent est une tentative manifeste d’intimider les juges et d’usurper le pouvoir des tribunaux. »
Les juges du Maryland se sont confrontés à l’administration Trump pour une série de ses initiatives clés, en matière d’immigration, de licenciement de fonctionnaires fédéraux ou, encore, d’arrêt des soins médicaux pour les jeunes transgenres. L’affaire qui symbolise ce conflit est sans aucun doute celle qui oppose la juge Paula Xinis et la Maison Blanche sur le cas de Kilmar Abrego García, un citoyen originaire du Maryland dont le retour aux États-Unis ne cesse d’être repoussé depuis son expulsion – par erreur – au Salvador, plus tôt cette année. Interrogée sur son cas lors d’une conférence de presse, mardi 24 juin, la procureure générale Pam Bondi a justement estimé que Kilmar Abrego García « devrait rester où il est ».
Face à l’extrême droite, ne rien lâcher !
C’est pied à pied, argument contre argument qu’il faut combattre l’extrême droite. Et c’est ce que nous faisons chaque jour dans l’Humanité.
Face aux attaques incessantes des racistes et des porteurs de haine : soutenez-nous ! Ensemble, faisons entendre une autre voix dans ce débat public toujours plus nauséabond.
Je veux en savoir plus.