OQTF : l’avenir des mineurs isolés de la Gaîté Lyrique toujours en suspens
Ils voulaient seulement ne plus dormir à la rue. Le 18 mars 2025, à six heures du matin, la police expulse 450 mineurs non accompagnés du théâtre parisien de la Gaîté Lyrique, qu’ils occupaient depuis le 10 décembre 2024. Regroupés dans le Collectif des jeunes du Parc de Belleville, ils sont tous en procédure de recours pour être reconnus comme mineurs isolés, et alertent sans cesse les pouvoirs publics sur leur situation pour faire valoir leurs droits.
L’expulsion est d’une violence extrême. Les jeunes et les nombreux manifestants venus les soutenir sont nassés, gazés, matraqués. Plusieurs interpellations ont lieu, débouchant sur des gardes à vue plus ou moins longues selon la couleur de peau des personnes arrêtées. Parmi eux, 25 des jeunes migrants interpellés reçoivent une Obligation de quitter le territoire français (OQTF), et ce malgré la présentation de documents indiquant leur minorité.
25 OQTF faussées
Une décision qui tombe comme un coup de massue sur des jeunes dont la situation est déjà critique. « Je n’avais jamais été au commissariat avant », témoigne anonymement l’un des adolescents. « Ils m’ont dit que si j’appelais un avocat, ils me garderaient toute la nuit. Alors j’ai répondu à leurs questions. Et ils m’ont quand même fait dormir au commissariat. »
Le lendemain, il reçoit une OQTF et est envoyé au centre d’hébergement de La Boulangerie, dans le 18e arrondissement de Paris. « Pour pouvoir donner des OQTF aux mineurs, ils ont modifié leur date de naissance » s’indigne Bano, membre du collectif des jeunes du Parc de Belleville. Laurent Sorel, élu LFI à la mairie du 20e arrondissement de Paris et membre du conseil de Paris, abonde dans son sens. « Cette préfecture, cette police fabrique du faux », appuie-t-il.
Le quotidien des jeunes sous OQTF est insupportable. À La Boulangerie, personne n’arrive à dormir, tous terrifiés par la perspective d’être renvoyés vers leur pays d’origine. Les convocations à la police rythment leur vie. « Ils nous traitent comme des animaux », désespère Joseph, représentant du collectif des jeunes du Parc de Belleville.
Pas de scolarité non plus pour eux, alors que certains ont tout abandonné dans l’espoir de recevoir en France une bonne éducation. « Ça fait tant d’années que je suis sur la route, pour au final arriver en France et être menacé de devoir partir », se désole l’un des adolescents. Ils sont nombreux à ne plus oser sortir ou prendre les transports, de peur qu’un contrôle au faciès ne leur coûte leur vie en France.
« L’hypocrisie de la mairie de Paris »
Les soutiens du collectif ont engagé un bras de fer juridique avec la préfecture de police de Paris. Une intersyndicale de l’éducation est mobilisée au côté des jeunes, militant notamment pour leur permettre l’accès au logement et à l’éducation. « Nous dénonçons l’hypocrisie du rectorat et de la mairie de Paris, qui malgré des discours de façade, n’ont jamais vraiment cherché à s’occuper de ces jeunes, qui sont pourtant dans une situation extrêmement fragile », rappelle Élodie militante CGT. La maire de Paris Anne Hidalgo a refusé de rencontrer les représentants des jeunes de la Gaîté Lyrique – tout en se portant candidate au Haut-commissariat aux réfugiés de l’ONU.
La première audience pour faire annuler les OQTF de certains de ces jeunes se tiendra le 23 mai. Les jeunes restent combatifs : « Les OQTF sont infondées, elles seront normalement toutes annulées », espère Joseph. L’intersyndicale appelle à une mobilisation massive la veille devant le lycée Voltaire (11e arrondissement de Paris), dans le but d’alerter sur une situation aussi critique qu’injuste.
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