Pourquoi les droits de douane imposés par Donald Trump font dégringoler les Bourses du monde entier
Les marchés boursiers mondiaux ont commencé la semaine comme ils l'avaient finie : en chute libre. La bourse de New York a encore dégringolé à son ouverture, lundi 7 avril, avec -2,85% pour le Dow Jones et -3,91% pour le Nasdaq, tandis que les bourses européennes ont aussi dévissé, quelques jours après la secousse provoquée par la hausse des droits de douane américains annoncée par Donald Trump.
Dans les premiers échanges, la Bourse de Francfort a chuté de 7,9%, après avoir brièvement affiché une perte de plus de 10%. La Bourse de Paris est tombée à -6,19%, Londres -5,83% et la Bourse suisse, -6,8%. Les marchés asiatiques aussi ont été pris de vertige : -7,8% pour la Bourse de Tokyo à la fermeture et même -13,2% pour Hong Kong, soit sa plus forte chute depuis la crise boursière asiatique de 1997.
Cette panique générale apparaît comme la conséquence de la déclaration de guerre commerciale lancée par Donald Trump avec le reste du monde. Mercredi, le président des Etats-Unis a fixé un tarif plancher de 10% sur toutes les importations aux Etats-Unis, ainsi que des surtaxes ciblées pour les pays jugés particulièrement hostiles en matière commerciale. L'addition est particulièrement lourde pour l'Union européenne (20% de taxes) et pour la Chine, dont les produits seront taxés, à partir du 9 avril, à 34% en plus des 20% déjà mis en place par Washington.
Des entreprises cotées en bourse qui craignent de voir leurs bénéfices fondre
Cette politique aura des conséquences sur l'économie mondiale et les plus grosses entreprises de la planète, dont les titres et les actions s'échangent dans les places boursières partout dans le monde. Ce qui crée de l'instabilité et de la panique de New York à Paris, alors que les marchés craignent également une escalade après la décision de Pékin de riposter. Pour Alexandre Baradez, analyste marché à la société IG interrogé par la chaîne franceinfo, la chute des bourses traduit un phénomène d'anticipation face à une situation inédite.
"Il y a un stress qui touche les marchés et entraîne des mouvements violents. Personne ne sait à quoi s'attendre : les entreprises ne peuvent pas faire de prévisions d'investissement et les consommateurs ne savent pas s'ils doivent consommer ou pas, ce qui créé cette contraction."
Alexandre Baradez, analyste marché pour la société IGà franceinfo
"La guerre commerciale entamée par Donald Trump va fortement réduire les bénéfices des entreprises industrielles, qui sont cotées sur toutes les bourses mondiales", complète Christian Saint-Etienne, économiste au Conservatoire national des arts et métiers, également sur le plateau de franceinfo. Peu après l'ouverture de la Bourse de Paris, les actions d'ArcelorMittal (-5,7%), Airbus (-7,5%) ou encore Safran (-9,8%) ont ainsi perdu de leur valeur.
La réponse des marchés mondiaux à la politique protectionniste lancée par Donald Trump traduit aussi les craintes des autorités et des investisseurs : la menace d'une récession aux Etats-Unis et d'un ralentissement mondial de l'économie. "Si personne ne trouve d'accord et que les nouveaux tarifs douaniers sont appliqués, la croissance mondiale, qui tourne autour de 3% depuis deux ans, pourrait perdre un point", prévient aussi Christian Saint-Etienne, pour qui la réaction des places boursières mondiales répond à un "ajustement difficile et désagréable". "Si la baisse ne dépasse pas 10% sur la semaine, on devrait traverser l'orage : mais si les bourses perdent 6 à 8% chaque jour, ce serait la panique."
Le "plus grand choc pour le système commercial mondial" depuis un demi-siècle
Les économistes de la Deutsche Bank, cités par l'AFP, sont plus pessimistes : ils parlent de mouvements "historiques" causés par le "plus grand choc pour le système commercial mondial depuis l'effondrement de Bretton Woods [des accords économiques signés après la Seconde Guerre mondiale pour définir un système monétaire international]", en 1971. Peut-on parler d'un krach boursier, comme certains l'affirment ? La réponse est oui, selon Alexandre Baradez. "Quand le marché perd 5% un jour, puis 5% le lendemain et 5% le surlendemain, c'est la définition du krach, qui touche toutes les places boursières. Il y a un mouvement de célérité extrême, et pas de pause dans la baisse, mais cela ne veut pas dire qu'on ira vers une baisse de 80%", développe-t-il.
En quelques jours, plus de 1 500 milliards d'euros de capitalisation boursière sont ainsi partis en fumée en Europe. A New York, la perte s'élevait en fin de semaine à quelque 6 000 milliards de dollars de pertes après les séances de jeudi et vendredi. Pour Alexandre Baradez, la chute des marchés pourrait se calmer si les Etats-Unis et les autres pays négocient pour stopper ce début de guerre commerciale. Ou si la Fed, la banque centrale des Etats-Unis, baissait ses taux d'intérêt afin d'amortir le choc et de rassurer les marchés.
En attendant, l'administration de Donald Trump a affirmé dimanche que plus de 50 pays avaient pris contact avec la Maison Blanche pour négocier sur les droits de douane imposés par Washington. Des négociations qui prendront du temps mais qui ne semblent pas inquiéter le président américain. Interrogé sur la réaction des Bourses, Donald Trump a comparé dimanche, à bord de l'avion présidentiel Air Force One, la panique boursière à "un traitement" destiné à guérir les maux de l'économie américaine. Une lecture résolument optimiste des conséquences du chaos mondial qu'il a créé.