REPORTAGE. "Aujourd’hui, leurs drones volent à 250km/h et à 3 km de haut !" : sur le front, les soldats ukrainiens confrontés à la modernisation de l'arsenal russe

Ils sont bon marché et redoutables. Les drones Shahed, fournis par l'Iran à Moscou et que les Russes produisent désormais de manière autonome, sont devenus l'un des tristes symboles de la guerre en Ukraine. Chaque nuit, ces engins kamikazes frappent le pays, et la défense antiaérienne ukrainienne a de plus en plus de mal à s'adapter.

Près de la frontière russe, dans l'oblast de Soumy, malgré la pluie et la pénombre, le sergent-chef Volodymyr prépare son canon antiaérien pour une nouvelle nuit de chasse. La Russie a envoyé 30 000 Shahed contre l'Ukraine depuis le début de cette guerre.

Lui et son vieil armement soviétique n'en ont abattu qu'une vingtaine. "Au début, les Shahed volaient à 120km/h, à 200m d'altitude. Aujourd'hui, ils volent à 250km/h, et à 3 kilomètres de haut ! Et regardez, pour viser, il faut tourner cette manivelle verticalement, horizontalement, avec les deux mains, puis il faut tirer en appuyant sur cette pédale…", décrit-il.

"J'aimerais avoir des armes plus modernes"

Avant de glisser : "Comment voulez-vous faire du bon boulot avec un tel matériel ? On s'adapte, mais je crains qu'on ne puisse jamais rattraper notre retard sur le plan technologique. Il se peut qu'on reste comme cela, à la traîne par rapport aux Russes. Donc j'aimerais avoir des armes plus modernes".

Et si ce n'était que ça : près de nous, la Russie, et son oblast de Koursk, que les Ukrainiens ont occupé pendant 8 mois jusqu'en avril dernier, Moscou devrait lancer dès cet été une vaste offensive aux accents de vengeance.

"Même si l'opération en elle-même a été un succès sur le moment, je ne suis pas sûr qu'occuper ce territoire russe, aussi longtemps, ait été une bonne idée. Il y a eu beaucoup de pertes. Tellement de nos gars sont morts là-bas..."

Volodymyr, sergent-chef dans l'armée ukrainienne

à franceinfo

"Et aujourd'hui, on se retrouve dans une situation très délicate, parce qu'entre-temps, les Russes n'ont pas traîné : ils en ont profité pour changer et pour moderniser leurs tactiques et leur matériel", souffle le sergent-chef Volodymyr.

Et à la question d'une prime pour chaque Shahed abattu, le sergent Oleksandr, qui écoutait notre conversation, tranche : "L'essentiel dans ce travail, ce ne sont pas les récompenses : on n'en a pas vraiment besoin. La meilleure prime pour nous, c'est que nos enfants, là-bas en arrière, dorment en paix." L'Ukraine intercepte aujourd'hui 80% de ces drones Shahed, un chiffre en baisse.