Ils vivent à quelques kilomètres de la frontière russe, dans des villages ukrainiens presque entièrement détruits. À la veille d’une possible offensive militaire d’ampleur des troupes du Kremlin, des hommes et des femmes ont décidé de rester malgré les attaques de drones et les frappes quotidiennes.
Trouver des civils à Krasnopillia à l'aube n'est pas difficile : depuis la rue, il suffit de repérer les rares salles à manger encore pourvues de lumière. À 63 ans, Petro nous accueille chez lui. "Avant, on avait tout : on allait passer une bonne retraite, avec de l’eau, du gaz, de l’électricité. Mais non, les barbares sont arrivés, et ils ont tout détruit, tout rasé", raconte-t-il. Ses yeux d'un bleu perçant ne suffisent pas à raviver sa mine triste.
Une population divisée par 30
Krasnopillia est une petite ville de la région de Soumy, à une centaine de kilomètres de Kharkiv, et à peine une quinzaine de la frontière. Il est 7h du matin. D'ici peu et comme ils le font quotidiennement, des drones russes chargés d'explosifs viendront fendre l'air de ce village, où Larissa est de passage. “On est tellement proches des Russes qu'on arrive à les voir sans jumelles, indique cette amie de Petro. On est sur la ligne de contact, on ne peut pas être plus près. Les frappes d'artillerie sont constantes, et leurs drones nous survolent comme s'ils étaient chez eux.”
Il y avait ici 4 500 habitants avant la guerre, ils sont seulement 150 aujourd'hui. Krasnopillia a été rendue invivable par des bombes russes d'une demi-tonne. Plus d'école, ni d'hôpital, ni de commerce : 80% des infrastructures sont détruites. En visite chez une amie, Alyna a fait le choix de s'en aller : "Je travaille pour une entreprise qui répare les canalisations, pour que l'eau arrive de nouveau dans ces zones bombardées. Je comprends ceux qui sont restés ici. Ils n'ont aucune aide, donc ils n'ont nulle part où aller", déplore-t-elle.
"Les deux premiers jours de la guerre, presque tout le monde a fui, c’était surréaliste."
Alyneà franceinfo
La menace d'un nouvel assaut terrestre
Sans ressources et attachés à leur terre, ces irréductibles compliquent le travail de l'armée ukrainienne, confie Sergiy, un officier chargé de les convaincre de partir : "Seuls les militaires et les médecins de combat sont capables d'évacuer les civils blessés et les morts. On n'a pas d’autre choix que de les faire venir, ce qui veut dire qu'ils doivent abandonner leurs positions."
Samedi 19 juillet, Volodymyr Zelensky a proposé de nouveaux pourparlers à Moscou. Le président ukrainien espère un cessez-le-feu rapide. Pendant ce temps, la Russie amasse plusieurs dizaines de milliers de soldats, à quelques kilomètres de Krasnopillia, avant une potentielle offensive cet été.