INFOGRAPHIES. Comment les annonces de Donald Trump sur les droits de douane ont affolé les Bourses ces dix derniers jours
Un jour en baisse, le lendemain en hausse, puis de nouveau en baisse. Les marchés financiers sont secoués par la guerre commerciale mondiale ouverte, le 2 avril, par Donald Trump. Certains économistes jugent la situation assez grave pour la qualifier de krach boursier, quand d'autres appellent à ne pas céder à la panique. Les fluctuations des dix derniers jours sont révélatrices de la grande incertitude qui règne depuis que le président des Etats-Unis met en œuvre son programme économique, à coups de hausses et baisses successives de droits de douane imposés à l'ensemble de ses partenaires commerciaux. Franceinfo fait le point en trois graphiques.
La chute des cours des grandes places boursières mondiales
Les principaux indices boursiers mondiaux ont fluctué au rythme des annonces et des revirements de Donald Trump. Les marchés ont d'abord plongé les 3 et 4 avril face au choc des droits de douane supplémentaires annoncées par les Etats-Unis pour des dizaines de pays. Puis le président américain a fait votre-face en déclarant, mercredi 9 avril, qu'il suspendait pendant 90 jours les surtaxes des pays visés, à l'exception de la Chine, tout en maintenant un taux plancher à 10% sur toutes les importations américaines, entré en vigueur le 5 avril. De quoi provoquer un rebond de courte durée, car les valeurs boursières ont replongé dès le lendemain, sur fond d'inquiétude provoquée par l'escalade des tensions entre Washington et Pékin.
Face à cette situation, les analystes sont partagés. Certains jugent que ces baisses soudaines et spectaculaires sont révélatrices d'un krach boursier. D'autres préfèrent parler d'une "correction", un phénomène plus classique, qui se produit tous les ans sur les marchés financiers, et qui consiste en un renversement de tendance.
Pour Christophe Blot, économiste à l'Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE), il y a un peu des deux : une correction, "dans le sens où après avoir perçu favorablement l'élection de Donald Trump, les marchés se sont finalement rendu compte qu'ils avaient sous-estimé la volonté du président américain d'engager un bras de fer commercial", et les signes d'un "krach reflétant une remise en cause profonde de l'ordre économique international établi depuis la Deuxième Guerre mondiale, ce qui affecterait la fiabilité de l'économie américaine".
"L'indice de la peur" à son troisième plus haut niveau depuis 1990
En réalité, les places boursières sont surtout plongées dans l'incertitude. Ce phénomène transparaît dans les valeurs de l'indice VIX, utilisé par les analystes pour mesurer la volatilité des marchés financiers. "On l'appelle 'l'indice de la peur'. Plus il monte, plus les investisseurs sont inquiets", résume David Taieb, directeur des investissements en actifs cotés chez Sienna Investment Managers. Créé dans les années 1980, le VIX est calculé en fonction du comportement des investisseurs sur le S&P 500, l'indice de référence aux Etats-Unis, qui regroupe les 500 plus grandes sociétés cotées sur les bourses américaines. Or, le VIX a atteint mardi 8 avril la valeur de 52,3, son troisième plus haut niveau depuis les années 1990, après la crise financière de 2008 et celle du Covid-19 en 2020.
"Concrètement, un VIX à un tel niveau, cela veut dire que les marchés ne sont pas capables de lire l'avenir", résume l'économiste Christophe Blot. Les analystes estiment que les marchés sont dans une situation attentiste et de grande fragilité. "Des marchés plus volatils par nature, ce sont des marchés plus fragiles sur lesquels il peut y avoir plus fréquemment des à-coups baissiers, voire des corrections", explique Christopher Dembik, conseiller en stratégie d'investissement au sein de la société de gestion d'actifs Pictet Asset Management. Dans ce contexte, les hausses et les baisses de ces dernières semaines pourraient être amenées à se reproduire. "Nous rentrons dans une phase de 'yoyotement' des cours, avec des indices qui vont monter et qui vont descendre, au gré des discussions et des tweets", pronostique David Taieb.
Derrière la chute des cours du pétrole, la crainte d'une baisse de la croissance
Ces dernières semaines ont également été marquées par une forte chute des cours de l'or noir. Le prix du baril de brent de la mer du Nord a atteint son niveau le plus bas depuis quatre ans. Il s'échangeait à 62,8 dollars le 8 avril, un seuil qui n'avait plus été atteint depuis exactement quatre ans (le 6 avril 2021). Une bonne nouvelle pour les automobilistes qui vont profiter d'une potentielle baisse des prix à la pompe. Mais les analystes financiers ne le voient pas du même œil. "Une baisse des cours du pétrole traduit le fait que le marché anticipe un ralentissement de l'économie", rappelle ainsi l'économiste Christopher Dembik.
"Les marchés ont peur de rentrer dans une guerre commerciale qui se traduirait par un effondrement de la croissance mondiale", affirme David Taieb. Selon cet analyste, les marchés craignent désormais un basculement de l'économie mondiale dans la récession, avec un impact de la hausse des droits de douane attendu pour la fin de l'année. "Beaucoup d'industriels ont réalisé des stocks de manière massive pour éviter les hausses annoncées dans un premier temps. Mais ces réserves devraient avoir été écoulées d'ici septembre ou octobre", précise David Taieb.
Cette crainte d'une récession mondiale ne fait pas l'unanimité chez les analystes. "Il faut être encore extrêmement prudent. En réalité, même l'administration Trump ne semble pas savoir ce qu'elle veut faire", juge Christopher Dembik.