Procès de Gérard Depardieu : retour sur les accusations visant le géant déchu du cinéma français
Le monstre sacré du cinéma français devant les tribunaux. Gérard Depardieu comparaîtra les 24 et 25 mars au tribunal correctionnel de Paris pour agressions sexuelles sur deux femmes, lors du tournage du film "Les Volets verts", de Jean Becker.
En 2021, le cinéaste offre à Gérard Depardieu un rôle taillé sur mesure, celui d'un acteur adulé, au sommet de sa gloire, mais vieillissant et usé par ses excès. Un film surfant sur la frontière entre réalité et fiction, dont le tournage a pris une tournure cauchemardesque.
"Agressions sexuelles" contre deux techniciennes
Le 23 février 2024, Amélie, décoratrice ensemblière de 54 ans, porte plainte contre l'acteur pour "agression sexuelle", "harcèlement sexuel" et "outrages sexistes".
À Mediapart, elle décrit son calvaire : Gérard Depardieu l'a "attrapée avec brutalité" dans un couloir, l'a bloqué "en refermant ses jambes sur [elle] comme un crabe" et lui a "pétri la taille, le ventre, en remontant jusqu'à ses seins". Une agression à laquelle auraient mis fin les gardes du corps de l'acteur, selon la plaignante. "On se reverra, ma chérie !", aurait-il alors lancé.
Elle a également rapporté des propos outranciers tenus par Gérard Depardieu. Il aurait notamment hurlé qu'il "voulait un 'ventilateur' car il ne pouvait 'même plus bander' avec cette chaleur".
Une deuxième plainte pour "agression sexuelle" concernant des faits commis lors du même tournage a été déposée, dans la foulée, le 21 mars 2024. Sarah, troisième assistante réalisatrice de 34 ans, accuse Gérard Depardieu de lui avoir touché "les fesses" un soir alors qu'elle l'accompagnait des loges au plateau. "Choquée", elle a expliqué à Mediapart n'avoir "rien dit", la première fois. Gérard Depardieu aurait recommencé à deux reprises, lui touchant les "fesses" et la "poitrine", affirme la seconde plaignante expliquant avoir "tenté de dire non". Les deux femmes ont expliqué avoir prévenu la production, qui n'aurait selon elles pas pris la mesure de la gravité des faits et de leur impact. "J'ai mis un temps fou à me remettre de ça, j'avais beaucoup maigri j'étais épuisée", a récemment expliqué Amélie.
"Calomnies" ou omerta ?
Face aux accusations, l'acteur, aujourd'hui âgé de 76 ans, nie en bloc. Son avocat, Me Jérémie Assous, a affirmé que son client était "victime d'accusations totalement mensongères" et qu'il s'agit d'une "véritable campagne de calomnies".
Il "est jugé pour avoir agressé physiquement quelqu'un, il n'y a aucun témoin", dénonçait-t-il le 28 octobre dernier.
Alors que le réalisateur Jean Becker a indiqué ne pas avoir eu connaissance de mauvais comportements de la part de l'acteur sur le tournage, l'actrice Anouk Grinberg, également à l'affiche du film, a dénoncé la "lâcheté" du cinéaste affirmant qu'il "savait très bien que deux femmes avaient été agressées gravement".
"Sur certains films avec Depardieu, on dit à l'équipe avant le tournage : 's'il y a le moindre problème vous vous taisez. Si vous parlez, vous êtes virés'", a dénoncé l'ancienne compagne de Bertrand Blier – réalisateur de neuf films avec Gérard Depardieu, dont "Les Valseuses" (1974) –, fustigeant l'omerta autour du comportement de l'acteur.
Initialement prévu le 28 octobre, le procès avait finalement été reporté à la veille de l'audience, les médecins de Gérard Depardieu lui ayant "interdit" de s'y présenter, selon son avocat, qui évoquait alors un quintuple pontage coronarien et des problèmes de diabète.
Depuis, une expertise médicale a été réalisée et l'acteur a été jugé apte à comparaître les 24 et 25 mars.
Accusations en série
Ce premier procès s'inscrit dans une affaire bien plus large. Célébré pendant des décennies comme un monstre sacré du cinéma français à la renommée internationale, Gérard Depardieu a été rattrapé par ses outrances et des accusations de violences sexuelles ces dernières années. L'affaire a débuté avec le dépôt de plainte en 2018 de la comédienne Charlotte Arnould, qui accuse l'acteur de l'avoir violée à deux reprises dans son hôtel particulier.
Au total, il a fait l'objet de six plaintes, dont deux pour viol et quatre pour agression sexuelle. Plus de 20 femmes ont témoigné à son encontre par voie de presse ou devant la justice pour dénoncer des agressions sexuelles et sexistes.
Cette affaire, considérée comme le plus important scandale du mouvement #MeToo en France, a fait l'effet d'une bombe provoquant de vifs débats jusqu'au plus haut sommet de l'État, Emmanuel Macron lui-même ayant été accusé d'avoir pris la défense de l'acteur.
Une extension de votre navigateur semble bloquer le chargement du lecteur vidéo. Pour pouvoir regarder ce contenu, vous devez la désactiver.

L'affaire a également exposé d'importantes divisions au sein du monde de la culture, avec la publication d'une tribune de soutien – dénonçant le "lynchage" médiatique d'un "géant" du septième art – puis d'une contre-tribune en défense de la parole des victimes.
En août 2024, le parquet de Paris a demandé le renvoi de Gérard Depardieu devant la cour criminelle départementale dans le cadre de la plainte pour viols et agressions sexuelles, déposée par Charlotte Arnould. La juge d'instruction chargée de cette affaire ne s'est pas encore prononcée sur la tenue ou non d'un procès.