Reconnaissance de sa responsabilité, commission d’enquête, fonds d’indemnisation… Ce qu’il faut retenir des annonces de la congrégation religieuse des pères de Bétharram

Deux signalements à l’encontre de François Bayrou, accusé d’avoir fermé les yeux sur des violences pédocriminelles perpétrées pendant six décennies à l’établissement privé de Notre-Dame de Bétharram ont été classés sans suite par la Cour de Justice de la République, a appris, lundi 3 mars, l’Agence France Presse. D’anciens religieux et personnels laïcs de l’établissement sont visés par plus de 150 plaintes déposées par des anciens élèves pour violences physiques, agressions sexuelles et viols. Après un an d’enquête, le parquet de Pau a ouvert une information judiciaire en février dernier et un ancien surveillant né en 1965 a été mis en examen et placé en détention provisoire.

Dans ce contexte, une parole très attendue par les nombreuses victimes qui accusaient les religieux bétharramites de « mutisme » s’est exprimée mardi 4 mars. Parlant au nom de ses pairs, le prêtre Laurent Bacho a assuré se sentir « responsable » face aux « souffrances de ces enfants (…) anéantis » dans une interview accordée à l’AFP.

La création d’un nouveau fonds d’indemnisation pour les victimes de violences sexuelles prescrites commises par des laïcs a été annoncée par la congrégation. Une annonce essentielle, étant donné que le champ d’action de la Commission Reconnaissance et Réparation (CRR) mise en place par l’Église depuis 2021 se limite à celles commises par des religieux.

Un nouveau fonds d’indemnisation financé par « la vente des quelques biens immobiliers »

Le lancement d’une commission d’enquête indépendante pour identifier « les causes » des « abus massifs » commis durant des décennies dans ce collège lycée des Pyrénées-Atlantiques sous contrat avec l’Éducation nationale a été également notifié.

La future commission d’enquête, dont les membres doivent encore être définis, recueillera la parole des victimes « dans différents pays » où la congrégation a des établissements et « pourra étudier les archives », a détaillé Laurent Bacho. Elle devra mettre en place des outils pour éviter un nouvel « aveuglement », a-t-il ajouté.

La création du nouveau fonds d’indemnisation sera financée par « la vente des quelques biens immobiliers » appartenant à la congrégation sur la commune de Lestelle-Bétharram, a-t-il précisé. Pour l’heure, l’indemnisation de 19 victimes via la CRR, à hauteur de 700 000 euros, a absorbé 60 % de ses finances.

Une action également sur le plan « mémoriel »

« La réparation financière est importante parce qu’elle donne du poids à nos mots », souligne Laurent Bacho. La congrégation veut aussi agir sur le plan « mémoriel », avec l’idée d’édifier un monument ou d’installer une plaque.
Elle participera à un forum sur les violences sexuelles organisé le 15 mars à Bayonne par l’Institut francophone pour la Justice et la Démocratie (IFJD), une ONG qui l’accompagne depuis mai dans sa démarche auprès des victimes.

Les paroles du prêtre Laurent Bacho marquent un tournant important. En effet, si l’un des dirigeants de la congrégation, le père Jean-Marie Ruspil, reconnaissait, en février, l’existence « des victimes », il replaçait, dans la même homélie, ces affaires de brutalités extrêmes, d’humiliations et de pédocriminalité dans une liste des « épreuves » connues par le sanctuaire depuis des siècles. « Jésus lui-même a eu des adversaires et des ennemis, argue-t-il. L’Église, les chrétiens, l’enseignement catholique n’échappent pas à cette réalité… Comment pourrions-nous éviter cela ? Nous avons notre lot, nous sommes bien servis, c’est indiscutable. »

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