Face aux injonctions de Donald Trump, l’UE cède et accélère la dérégulation

Quand on a perdu le nord depuis longtemps, une boussole suffit-elle à retrouver le cap ? Censée pallier le décrochage de l’Union européenne (UE) face aux États-Unis et à la Chine, la « boussole de compétitivité » présentée, le 29 janvier, par l’hyperprésidente de la Commission, Ursula von der Leyen, ne déroge pas aux vieilles méthodes néolibérales.

En l’espèce, dérégulations, accélération de la politique de l’offre et travailleurs sacrifiés sur l’autel de la compétitivité. Le dernier à sonner le tocsin fut l’ancien président de la Banque centrale européenne (2011-2019) Mario Draghi, qui alertait dans un rapport remis en septembre dernier sur le suicide économique de l’UE.

Dans la feuille de route délivrée par la Commission, tout commence pourtant par un satisfecit : « Ces dernières années, l’Europe a démontré une remarquable habilité à répondre à une succession de crises. » Le document revient ainsi sur la gestion de la pandémie, de la crise énergétique consécutive à la guerre en Ukraine, les transitions vertes et numériques et… la croissance économique. C’est sans doute aller un peu vite en besogne. Pour l’année qui vient, le Fonds monétaire international (FMI) ne table que sur 1 % de croissance dans la zone euro, alors que la BCE parle d’une inflation à 2,1 % sans compter la destruction de centaines de milliers d’emplois du fait de la désindustrialisation.

La droite à la manœuvre

Dans ce sillage, Ursula von der Leyen propose un calendrier qui a tout de la thérapie de choc. Le 26 février, elle devrait d’ailleurs dévoiler son « choc de simplification » pour les entreprises qui vise à alléger la législation de 25 % et, en l’instance, à se défaire des normes de durabilité, de respect des normes environnementales et des droits humains pour les donneurs d’ordre (devoir de vigilance et « comptabilité sociale et environnementale » du CSRD).

Dans l’automobile, la chimie et l’acier, le patronat applaudit. Ce revirement ne signifie rien d’autre que l’abandon des objectifs de son premier mandat, et notamment des obligations liées au pacte vert, qui portait déjà des conséquences délétères pour les plus vulnérables.

« Nous jugerons sur pièces, mais il faut que ce soit un mouvement très radical. On ne peut pas faire dans la demi-mesure », estime l’eurodéputé François-Xavier Bellamy (LR), qui plaide depuis longtemps en faveur de la dérégulation. La Pologne, qui occupe actuellement la présidence tournante du Conseil de l’UE, abonde au prétexte que la déréglementation états-unienne lèse les entreprises européennes.

Face à cette fuite en avant outre-Atlantique, l’eurodéputé belge Marc Botenga (la Gauche) tançait la philosophie qui sous-tend les plans de la Commission : « L’Europe doit se débarrasser de son syndrome de Stockholm qui nous fait plier devant toutes les demandes américaines. » De fait, le lobby BusinessEurope cible 68 « charges » dont les Vingt-Sept devraient se délester, et parmi elles, la taxe carbone aux frontières, applicable aux entreprises exportant vers l’UE.

Soit une réponse directe aux injonctions du président américain, Donald Trump, lors du Forum de Davos, concernant la simplification des normes. En outre, l’UE pourrait se doter d’un régime spécifique pour permettre aux entreprises innovantes de se délester des juridictions nationales s’agissant des faillites, de loi du travail et de fiscalité. En la matière, la boussole existe déjà, c’est celle du capital.

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