Les enjeux climatiques et le retour de Trump au pouvoir
Gérard Le Puill
Dès son entrée en fonction, le président américain a annoncé le retrait de son pays de « l’horrible coûteux et unilatéral accord de Paris » sur le climat. En France, l’INSEE évoquait dans une note du 23 janvier les investissements « verts » à opposer aux investissements « bruns ». Le même jour, on apprenait que de nombreuses forêts françaises stockent de moins en moins de carbone en raison des multiples conséquences du changement climatique.
À peine réinstallé à la Maison Blanche, le 20 janvier, Donald Trump a signé un décret et adressé une lettre aux Nations Unies pour indiquer le retrait de son pays de l’accord de Paris sur le climat. Le pays le plus riche du monde rejoindra ainsi, pour la seconde fois, l’Iran, la Libye et le Yémen, trois pays qui n’étaient pas signataires de l’accord de 2015 ratifié par 195 Parties présentes à Paris. Pour mémoire, cet accord prévoyait de limiter le réchauffement global à +2°C d’ici la fin de ce XXIème siècle et même de +1,5°C, si possible. Mais ce dernier chiffre était déjà en train d’être dépassé en 2024, année où les températures moyennes ont été les plus élevées dans le monde depuis que les relevés existent.
Ce week-end, des inondations dans trois régions de France ont causé des dégâts dont les réparations seront émettrices de CO2 en plus d’être coûteuses pour les victimes. En fin de semaine dernière, des vents violents accompagnaient la tempête Eowyn, causant d’énormes dégâts en Irlande et sur une partie de Royaume Uni. Tandis que Donald Trump survolait la Californie pour constater l’importance des destructions provoquées par les incendies de ces dernières semaines, on apprenait que le feu a causé pour 250 milliards de dollars de dégâts. Trump a pris la parole pour demander à cet Etat de démarrer sans attendre les reconstructions, sans chercher à analyser les causes du désastre. Durant la seule année 2024, les ouragans, les inondations, les incendies et d’autres épisodes climatiques extrême ont coûté 320 milliards de dollars à la planète, selon un dossier sur le dérèglement climatique paru dan l’hebdomadaire « Courrier International » du 23 au 29 janvier.
Capital « brun » contre capital « vert » nous dit l’INSEE
En France, le 23 janvier, l’INSEE publiait une longue note d’une grande complexité au niveau rédactionnel. Elle était titrée « Quel chemin vers la neutralité carbone ?». Le premier des trois paragraphes du résumé de présentation était ainsi rédigé : « L’Union européenne et la France sont engagées à atteindre la neutralité carbone d’ici 2050. Or, plusieurs chemins y conduisent, qui diffèrent par le profil de baisse des émissions et les implications économiques. Les conséquences de ces chemins sont comparées à l’aide d’un modèle stylisé représentant la transition d’une économie exploitant le capital « brun » (émetteur de gaz à effet de serre) à une économie axée sur le capital « vert » (non émissif)».
Dans cette note étalée sur 6 pages, aucune explication claire n’était fournie sur la manière dont il serait possible de passer du capital « brun » au capital «vert». Mais nous savons que la Commission européenne propose aux pays membres de l’Union une voie rapide pour parvenir à la neutralité carbone dès 2050. Elle consiste à interdire la vente de véhicules neufs équipés d’un moteur thermique à partir de 2035 pour ne plus vendre que de véhicules neufs équipés d’un moteur électrique à partir de cette date. La Commission présidée par Ursula Von der Leyen prévoit même de taxer les firmes automobiles qui, faute d’une demande suffisante de leurs clients potentiels, ne vendront pas un nombre suffisant de voitures électriques cette année.
En théorie, la combustion de la voiture électrique répond aux exigences du capital « vert » puisque la consommation d’électricité par ces voitures n’émet pas de CO2. En pratique, il en va différemment si l’électricité reste majoritairement produite en brûlant du charbon et du gaz, car on continuer d’investir dans le capital « brun ». À cela s’ajoute le fait qu’une voiture électrique doit parcourir une moyenne 40 000 à 50 000 kilomètres avant que son bilan carbone passe sous celui d’une voiture de même puissance équipée d’un moteur thermique. L’extraction et la transformation des métaux rares qui entrent dans la production des voitures électriques et de leurs batteries ont un bilan carbone très élevé.
Quand les arbres stockent moins de carbone
Le 23 janvier également, un communiqué commun du Comité français de l’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN), de l’Office français de la biodiversité (OFB) et du Muséum national d’histoire naturelle indiquait en titre que « la moitié des forêts de montagne de l’Hexagone et de Corse sont menacées par le changement climatique, selon la liste rouge des écosystèmes en France ». Suivaient deux pages d’explications dont voici un extrait :
« Malgré une augmentation de la surface des forêts depuis le milieu du XIXème siècle, les forêts de montagne de l’Hexagone et de Corse connaissent aujourd’hui des bouleversements liés à de multiples pressions d’origine anthropique, locales ou globales (…) En particulier, elles sont exposées à des conditions climatiques qui diffèrent de plus en plus de celles qui ont permis leur développement. C’est notamment le cas des hêtraies et des cembraies-mélézins (forêts de Pins cembros et de Mélèzes) de l’étage subalpin qui sont 2 écosystèmes de forêts de montagne classées « en danger», montrant des mutations de leurs végétations. 8 autres écosystèmes de l’étage montagnard sont classés «vulnérable» et 6 sont «quasi-menacé». Le changement climatique est un facteur déterminant des résultats de cette évaluation ».
Il s’agit là de conséquences très concrètes du changement climatique en cours que le capital « vert » se substituant au capital « brun » aura du mal à corriger. Surtout quand Donald Trump promet d’exploiter sans limite le pétrole et le gaz de schiste, deux produits énergétiques très émetteurs de CO2, pour faire croître les exportations des Etats-Unis.