Lundi 10 février, le président étasunien Donald Trump a promis un « enfer » au Hamas si l’organisation ne relâchait pas tous les otages israéliens d’ici samedi. Comme si la bande de Gaza n’était pas déjà un enfer où ont péri près de 61 709 de Gazaouis, selon les données du ministère de la Santé du Hamas. Alors que l’organisation palestinienne a menacé de reporter la prochaine libération prévue par la trêve en vigueur dans la bande de Gaza depuis le 19 janvier, Donald Trump et le premier ministre israélien Benyamin Netanyahou sont sur le pied de guerre.
Le gouvernement de ce dernier a d’ores et déjà ordonné à son armée de se préparer à « tous les scénarios », a annoncé le ministre de la Défense israélien, Israël Katz, lundi 10 février. Donald Trump, qui a qualifié de « terrible » cette menace de report auprès de la presse reçue à la Maison Blanche, remet donc en cause le fragile cessez-le-feu mis en place ces dernières semaines, tout en affirmant vouloir son maintien – à ses conditions. « Annulez-le et rien ne va plus, qu’un véritable enfer se déchaîne, a-t-il menacé. Vous (les journalistes présents – NDLR) le saurez, et eux aussi. Le Hamas comprendra ce que je veux dire. »
« Des tirs d’obus et d’armes à feu »
Après sa prise de position initiale, l’organisation palestinienne a assuré que « la porte reste ouverte » pour que les vagues de libération « se déroulent selon le plan prévu ». Le mouvement islamiste a intimé, pour cela, à Israël de « s’acquitter de ses obligations ». Pour rappel, le Hamas accuse Tel-Aviv de violer l’accord de cessez-le-feu, en « retardant le retour des personnes déplacées dans le nord de la bande de Gaza et en les prenant pour cible par des tirs d’obus et d’armes à feu ». Abu Obeida, porte-parole des Brigades Qassam, la branche armée du Hamas, avait alors annoncé un report « jusqu’à nouvel ordre » des libérations, lundi 10 février sur la messagerie Telegram.
L’heure n’est ainsi plus aux négociations ni au respect de l’accord établi pour le locataire de la Maison Blanche. Son exigence – libérer tous les otages israéliens d’ici samedi 15 février – dépasse le cadre en vigueur depuis janvier. Sur 251 personnes enlevées lors de l’attaque du 7-Octobre, l’accord de cessez-le-feu prévoit la libération de 33 d’entre eux, dont huit annoncés comme morts, en échange de 1 900 Palestiniens détenus par Israël, durant une première phase courant sur six semaines.
Depuis le début de la trêve, 16 Israéliens ont été libérés, en plus de cinq Thaïlandais (hors accord), en échange de 765 Palestiniens. 73 otages sont toujours retenus à Gaza, dont au moins 34 sont morts selon l’armée israélienne. La deuxième phase du cessez-le-feu est censée aboutir à la libération de tous les otages et à la fin définitive de la guerre, avant une étape finale dédiée à la reconstruction de Gaza.
Or, le gouvernement israélien a refusé, jusqu’à présent, que ses négociateurs envoyés à Doha (Qatar) discutent de cette seconde phase, comme cela était prévu à partir du 16e jour du début de l’application de l’accord. L’armée israélienne a, de son côté, annoncé « renforcer la zone » autour de la bande de Gaza, déjà assiégée : « Après évaluation de la situation (…) il a été décidé de renforcer fortement la zone avec des troupes supplémentaires pour des missions défensives. »
« Prendre le contrôle de la bande de Gaza »
Soit l’escalade tant crainte par les parties prenantes de l’accord, le Qatar et l’Arabie saoudite en tête. Des premiers signes avant coureur – retard de l’arrivée d’une délégation israélienne dans le cadre des négociations, lancement d’un plan de « départs volontaires » des Gazaouis, sans billets de retour, par l’administration Netanyahou – ont ainsi été dénoncés ces derniers jours. Des tensions plus largement ravivées par l’annonce du président étasunien qui a déclaré, mardi 4 février, vouloir « prendre le contrôle de la bande de Gaza », afin d’y ériger la « Riviera » du Moyen-Orient.
Un projet colonial digne de son passé de promoteur immobilier guidé par le profit et concocté au mépris des espoirs de la création d’un État palestinien. Quitte, aussi à mettre le feu à la région, alors que l’élu républicain a intimé à l’Égypte et la Jordanie d’accueillir les civils gazaouis. Requête de nouveau formulée lundi 10 février par le principal intéressé, qui n’a pas hésité à menacer les deux États de « peut-être » arrêter les aides financières, s’ils n’accueillent pas les Palestiniens originaires de Gaza.
L’Égypte a rejeté, plus tôt dans la journée, « tout compromis » portant atteinte aux droits des Palestiniens, selon un communiqué publié après la rencontre du ministre des Affaires étrangères égyptien avec son homologue étasunien, à Washington. Interrogé, lundi 10 février, par le journaliste de la chaîne Fox News, Bret Baier, sur la question du « droit au retour » des Palestiniens, le président étasunien a alors franchi un nouveau palier : « Non, ils n’en auraient pas car ils auront des logements bien meilleurs. En d’autres termes, je parle de leur construire un endroit permanent parce que s’ils doivent revenir maintenant, il faudrait des années avant qu’ils puissent le faire, ce n’est pas habitable. »
Des déclarations qui ne cessent de fragiliser une situation déjà friable. « La preuve en est venue vendredi dernier lorsque le Hamas a retardé la publication des noms des otages libérés, résumait ainsi le quotidien israélien Haaretz, lundi 10 février. Si les négociations de la deuxième étape ne sont pas accélérées, des retards similaires pourraient se produire vendredi prochain, et même une escalade, comme des retards dans les libérations elles-mêmes, pourrait se produire. » Il n’aura fallu que 24 heures pour qu’un tel scénario se produise, quitte à replonger les civils palestiniens dans un « enfer » sur lequel ils n’ont aucune prise, ni d’échappatoire.
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