En Bosnie-Herzégovine, les plaies du conflit en ex-Yougoslavie de plus en plus visibles et inquiétantes
Dans les Balkans, la situation devient de plus en plus tendue en Bosnie-Herzégovine, où le président de la République serbe de Bosnie est visé par un mandat d'arrêt international, depuis jeudi 27 mars. Le dernier épisode d'une forte montée des tensions depuis plusieurs semaines. Une situation à suivre de près, car elle réunit tous les ingrédients qui ont conduit à la guerre des années 90.
L'homme visé par ce mandat d'arrêt s'appelle Milorad Dodik, l'homme fort de la Republika Srpska, autrement dit, la République serbe de Bosnie, l'une des deux entités qui composent ce petit pays d'environ trois millions d'habitants, niché entre la Serbie et la Croatie.
Le pays est divisé en deux entités autonomes avec une société multiethnique et un territoire morcelé, dont environ la moitié est habitée par des Serbes orthodoxes au sein de la République serbe de Bosnie. L'autre partie est peuplée de Croates catholiques et de Bosniaques musulmans, qui cohabitent au sein de la Fédération de Bosnie-Herzégovine, avec Sarajevo pour capitale. Cette partition est issue des accords de Dayton, signés en 1995 pour mettre un terme à trois ans d'une guerre sanglante qui a fait 100 000 morts et a notamment été marquée par le siège de Sarajevo et le génocide de Srebrenica.
De multiples tentatives de sécession
Depuis 30 ans, un équilibre très fragile tente d'être maintenu sous la houlette d'un représentant international chargé de faire respecter la paix. Or, c’est notamment parce qu'il ne respecte plus les décisions de ce représentant que Milorad Dodik a été condamné fin février à un an de prison et six ans d'interdiction d'exercer ses fonctions. Une peine infligée parce que Milorad Dodik multiplie les tentatives de sécession pour aller vers une "Grande Serbie", unifiée avec Belgrade.
Il n'a pas été arrêté. Le jour de sa condamnation, il s'est même permis de défier tout le monde en paradant devant ses partisans et en clamant, sourire aux lèvres : "Qu'ils viennent m'arrêter !" C'est un fait important, car Milorad Dodik est un personnage incontournable, président depuis 2006, et incarne un glissement nationaliste et révisionniste.
Lui qui reconnaissait autrefois le massacre de Srebrenica le conteste aujourd’hui. Il accumule les provocations, comme l'inauguration d’un centre universitaire Radovan Karadžić, du nom de l’ancien dirigeant condamné pour crimes contre l'humanité.
Un allié historique de la Serbie et de la Russie
Moscou souffle sur les braises, et Dodik devait d’ailleurs se rendre au Kremlin cette semaine. Une agitation séparatiste prorusse qui rappelle étrangement un scénario connu dans un passé récent, en Géorgie ou dans le Donbass en Ukraine.
Si Dodik n'est pas arrêté, l'autorité du pays est totalement bafouée. Mais si son arrestation se passe mal, la situation pourrait s'embraser. Dans une région où les plaies du passé sont encore vives, l'air de la guerre n'a jamais vraiment quitté l'atmosphère.