Violences faites aux femmes : à une grande cause, un budget « dérisoire », dénonce un rapport sénatorial
Le rapport d’information sur le financement de la lutte contre les violences faites aux femmes a été lancé en 2020, à la suite du Grenelle contre les violences conjugales. Une veille nécessaire, organisée désormais tous les cinq ans par la commission des Finances du Sénat. Leur triste constat était malheureusement attendu : les budgets ne sont toujours pas à la hauteur. Le sexisme, lui, progresse, comme le déplorent aujourd’hui les rapporteurs Arnaud Bazin (LR) et Pierre Barros (CRCE-K), entraînant inégalités et violences.
Bien sûr, les crédits ont augmenté depuis 2020. Ceux alloués au programme 137 « Égalité entre les femmes et les hommes » sont passés de 36,5 millions d’euros à 101,1 millions d’euros en 2024. Mais ces montants restent « dérisoires » quand on les compare aux « 2,5 à 5 milliards nécessaires selon les calculs de la Fondation des femmes », fait remarquer Arnaud Bazin.
Les coûts de ces violences estimés « entre 2,5 et 70 milliards »
Les coûts de ces violences ont même été estimés « entre 2,5 et 70 milliards selon les périmètres pris en compte », souligne le rapport, qui s’appuie sur des études de la Cour des comptes. Le sénateur LR voudrait davantage « mobiliser les fonds européens, les collectivités territoriales et les fonds privés » pour renforcer les financements de la lutte contre les violences faites aux femmes, avec une administration ministérielle dédiée.
Les sénateurs demandent à revoir les indicateurs de performance du programme 137, le seul de l’État consacré aux violences de genre et à l’égalité, « en contextualisant les indicateurs porteurs de biais, voire en révisant ces indicateurs en lien avec les associations concernées ». Ils déplorent aussi des politiques éparses et le manque de stratégie globale, claire et coordonnée.
Trois axes de priorité
« Nous avons dégagé trois axes de priorité de l’action publique », a précisé Pierre Barros. La première part d’un constat : l’enveloppe concernant les violences hors du couple est très réduite par rapport à celle concernant les violences conjugales, dix fois plus importante. Ces violences faites aux femmes dues à la domination masculine ne doivent pas être négligées, alertent les rapporteurs.
Pour eux, il faut aussi renforcer l’accès aux parcours de sortie de prostitution. Sept ans après la loi qui les mettaient en place, « certaines commissions départementales ne se sont jamais réunies » déplore Pierre Barros.
Enfin, l’accompagnement global des victimes doit être accéléré, notamment les solutions d’hébergement pour les victimes qui fuient un conjoint violent, de la mise à l’abri d’urgence jusqu’à un logement autonome, en passant par une phase progressive d’accompagnement.
Une augmentation du nombre de féminicides
Si le montant des subventions aux associations a doublé depuis 2020, le volume et sa répartition ne suffisent pas face au poids des violences systémiques faites aux femmes. Ainsi, les CIDFF (centres d’information sur les droits des femmes et des familles) attendent toujours des versements de l’État. Leur retard a d’ores et déjà entraîné la fermeture de service et les structures sont en sursis. Les violences, elles, n’attendent pas.
Selon ce rapport spécial, le nombre de tentatives de féminicide a augmenté de 238 à 451 de 2020 à 2023. Le nombre de viols ou de tentatives de viol enregistré par les services de police et de gendarmerie a plus que doublé sur cette période (+ 104,1 %) et le nombre de cas de violences volontaires au sein du couple a connu une hausse de 47,9 %.
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