Ahmed Al Charaa à Paris, première visite en Europe pour le président syrien
C’est grâce à une dérogation des Nations Unies que Ahmed Al Charaa, toujours visé par une interdiction de voyager en raison de son passé de chef du groupe Hayat Tahrir al-Sham (HTC), issu de l’ex-branche d’Al-Qaïda en Syrie, a pu se rendre ce mercredi à Paris. Celui qui a assis son pouvoir en tant que président par intérim, avec une période de transition de cinq ans, depuis la chute de Bachar Al Assad, le 8 décembre 2024, dirige désormais la Syrie à la tête d’une coalition islamiste. Et tente surtout de montrer un visage rassurant pour obtenir la levée des sanctions qui touchent son pays depuis 2012.
C’est donc à l’Élysée, avec Emmanuel Macron, que Ahmed Al Charaa effectue son premier déplacement dans un pays occidental. Malgré une communication bien rodée, il reste comptable des massacres de mars dernier, qui ont fait 1 700 morts, majoritairement alaouites, dans l’ouest du pays, ainsi que de récents combats avec des drones, notamment dans la région de Damas. Tous imputables aux forces de sécurité syriennes, épaulées par des groupes armés radicaux sunnites dont Ahmed al Charaa reste le dirigeant.
Celui-ci a promis de poursuivre les auteurs des massacres d’Alaouites – la communauté dont est issu l’ancien président Bachar Al Assad – via la mise en place d’une « commission d’enquête indépendante ». Mais pour l’heure, aucune poursuite n’a été engagée, dans un pays il est vrai en déliquescence, où l’autorité de l’état reste théorique. À l’Élysée, on assure que le chef de l’État français compte demander à son homologue syrien « de faire en sorte que la lutte contre l’impunité soit une réalité », et que « les responsables d’exactions contre les civils soient jugés ».
L’enjeu des « investissements étrangers »
Le ministre des Affaires étrangères, Jean-Noël Barrot, a lui assuré que « ne pas engager le dialogue avec ces autorités de transition serait être irresponsable vis-à-vis des Français, et surtout ce serait tapis rouge pour Daech », a-t-il estimé sur RTL. Selon lui, « la lutte contre le terrorisme, la maîtrise des flux migratoires, la maîtrise des trafics de drogue » et « l’avenir du Liban », « tout cela se joue en Syrie ».
Pour la France, l’enjeu est en effet de conserver une certaine influence dans la région et de prendre sa part dans le chantier de la reconstruction de l’État syrien. Selon l’Élysée, les sanctions « pèsent sur la capacité des autorités de transition à se lancer dans une logique de reconstruction et à attirer des investissements étrangers ». Autres sujets au menu des discussions : l’accord-cadre historique signé le 10 mars avec les autorités kurdes du nord-est du pays, mais aussi la multiplication des opérations militaires israéliennes.
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