Melissa serait l’ouragan le plus intense qui ait jamais touché terre en Atlantique. Qu’en est-il exactement ?
Fabrice Chauvin
Chercheur au Centre national de recherches météorologiques de Météo France
C’est l’un des plus puissants, de catégorie 5 sur l’échelle de Saffir-Simpson, du nom des deux ingénieurs qui ont établi ce classement pour associer les vents aux dégâts. Juste avant de frapper la Jamaïque, Melissa a été classé au niveau maximal, associé à des dégâts extrêmes, quand les vents dépassent 250 km/h. Sachant qu’il est question de moyenne de vitesse de vents, et non des rafales.
Ce que les gens ont tendance à confondre. Quand on qualifie un ouragan, on se base sur le calcul d’un vent moyen sur dix minutes. Melissa a enregistré des rafales de vent dépassant les 350 km/h, mais en vent moyen, il ne semble pas avoir dépassé les 300 km/h. À ma connaissance, les tempêtes dont les vents moyens ont dépassé les 300 km/h se comptent sur les doigts d’une main.
Peut-on dire que ce type d’événement extrême est plus fréquent et plus intense ? Et faire le lien avec le changement climatique ?
Depuis les années 1980 et l’observation des conditions météorologiques par satellite, on a dénombré très peu d’ouragans de catégorie 5, tout au plus une vingtaine sur l’Atlantique. C’est un phénomène rare, qui n’est pas forcément en lien avec le réchauffement climatique.
“Depuis les années 1990, nous sommes dans une anomalie chaude.”
D’une manière générale, nous vivons dans une atmosphère marquée par des anomalies, chaudes ou froides. Depuis les années 1990, nous sommes dans une anomalie chaude. Mécaniquement, cela augmente la probabilité des ouragans. En revanche, et c’est un signe du changement climatique, la hausse de la température de la surface de la mer a une incidence sur leur intensité.
L’océan, c’est le carburant de ces phénomènes. Selon le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (Giec), la probabilité qu’un ouragan atteigne des intensités fortes va augmenter avec le réchauffement.
Une tempête ne se limite pas aux vents…
Selon les scientifiques, le réchauffement entraîne des pluies plus abondantes lors de ces épisodes. C’est une des métriques identifiées par le Giec. Les modèles de projections futures nous permettent de comprendre le processus par lequel cela va se produire. Plus il y a de chaleur, plus il y a d’humidité, plus il y aura de vent et de pluies.
Mi-octobre, l’ONU alertait sur le fait que les populations les plus pauvres sont plus exposées aux aléas climatiques extrêmes. Melissa le montre une fois encore…
Ce ne sont pas forcément les pays les plus pauvres qui sont systématiquement touchés. En termes de coûts, les États-Unis sont souvent massivement impactés par les catastrophes naturelles car ils ont énormément de biens assurés.
Mais en termes de vies humaines, il est certain que les pays les moins développés payent le plus lourd tribut. Pour des raisons d’infrastructures, d’organisation, etc.
Peut-on imaginer que l’Europe soit un jour touchée par des ouragans ?
Je ne dirais pas que c’est impossible mais c’est très peu probable, en raison de la latitude moyenne, des variations atmosphériques, qui empêcheraient un tel phénomène de conserver son intégrité. Néanmoins, certains ouragans montent très au nord. Avec le changement climatique, on voit même un déplacement vers les pôles, de quelques centaines de kilomètres.
Avant de partir, une dernière chose…
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