"Nous empêcherons les hommes de pratiquer les sports féminins"... Avec le retour de Donald Trump, quelles conséquences pour les athlètes transgenre ?

"Nous empêcherons les hommes de pratiquer les sports féminins. Ce sera fait dès demain, c'est terminé !" Donald Trump a prononcé ces mots, dimanche 20 janvier, à la veille de son investiture comme 47e président des Etats-Unis. Une nouvelle attaque frontale du président américain à l'encontre des personnes transgenres. Selon ABC, le candidat républicain a dépensé au moins 21 millions de dollars en publicité anti-transgenre durant sa campagne.

Avant même sa réélection, Donald Trump en avait fait un argument de campagne. Cet été, le milliardaire s'en était notamment pris à la boxeuse algérienne Imane Khelif aux JO de Paris, et avait alors martelé vouloir "laisser les hommes en dehors du sport féminin". Le 22 décembre, déjà élu, il avait accéléré en annonçant qu'il signerait "des décrets pour mettre fin aux mutilations sexuelles des enfants, exclure les transgenres de l'armée, des écoles primaires, des collèges et des lycées".

Dans le domaine du sport, une semaine avant son investiture, la chambre des Représentants a adopté, le 14 janvier, un projet de loi visant à interdire à une personne née de sexe masculin de participer à une activité ou un programme athlétique destiné aux femmes ou aux filles. Un texte qui avait déjà été présenté en 2023, mais qui avait été retoqué par le Sénat. Mais cette fois, le Congrès est à majorité républicaine dans ses deux chambres. "D'un simple trait de plume, dès le premier jour, nous mettrons un terme au délire transgenre", avait anticipé le président élu fin décembre.

Un retour en arrière pour 1,6 million de personnes se définissant comme transgenres aux Etats-Unis, dont plus de 300 000 sont âgées de 13 à 17 ans, relève une étude du Williams Institute [en anglais], groupe de réflexion de l'université UCLA (Californie). En avril 2024, l'administration Biden avait étendu aux LGBT la protection issue du "Title IX" de 1972, qui interdit toute discrimination sur la base du sexe dans les programmes d'éducation soutenus par l’État, et notamment dans le domaine du sport. Néanmoins, l'ex-président n'était pas parvenu à intégrer dans cette extension la question spécifique des athlètes transgenres.

"La politique officielle des Etats-Unis sera qu'il n'y a que deux genres, homme et femme."

Donald Trump,

le 5 novembre 2024

Cela est en passe d'être révoqué : un juge fédéral a jugé, le 10 janvier, que ce département ne pouvait étendre la loi aux discriminations basées sur "l'identité de genre". Donald Trump souhaite, lui, supprimer le "Departement of Education", chargé de l'application de cette loi. "L'absence de discrimination basée sur le sexe, en réalité, elle est déjà en danger depuis un bout de temps", relève Jean-Baptiste Guégan, spécialiste en géopolitique du sport. "On l'a vu avec la remise en cause du droit à l'avortement, et on a vu monter pendant la campagne la question de la transidentité. Il y a fort à parier que ce sera un sujet. Mais sera-t-il utilisé de manière polémique, purement opportuniste ou clairement structurelle ?", s'interroge le spécialiste.

Autant de premiers clous de la nouvelle mandature Trump vis-à-vis des transgenres. En 2024, 672 textes anti-transgenre ont été portés dans 43 Etats (neuf sont actifs), un record pour la cinquième année consécutive, selon le site translegislation.com. "J'ai l'impression que mon propre pays me hait", résumait à franceinfo Daria, qui participait à la "Marche du peuple" anti-Trump, samedi 18 janvier.

Le sport féminin et les minorités déjà dans son viseur lors de son premier mandat

Le président américain n'a jamais craint de se mettre à dos une communauté du sport pour imposer ses valeurs depuis sa première élection en 2016. Du quarterback de San Francisco Colin Kaepernick, qui défendait le mouvement "Black Lives Matter" en mettant son genou à terre durant l'hymne, à Megan Rapinoe, capitaine de l'équipe nationale de football féminine et icône lesbienne. En plus des personnes trans, les équipes féminines ou les minorités dans le sport pourraient de nouveau voir leur accès au sport bousculé. 

En février 2024, un groupe mené par Stephen Miller, l'architecte des politiques migratoires de Trump, avait déposé une plainte, considérant que la "Rooney Rule" en NFL, qui oblige les équipes à réaliser des entretiens avec des personnes issues des minorités pour les postes à responsabilité, était illégale. "Je pense que le clivage n'est pas prêt de disparaître. Est-ce qu'il va s'accroître ? On verra. Ce qui est sûr, c'est que le sport ne sera pas le lieu de la réconciliation, mais plutôt de l'expression de l'intensification des clivages", avertit Jean-Baptiste Guégan.