Assurance-chômage : durée d'indemnisation, conditions d'accès, rupture conventionnelle... Comment le gouvernement entend mener sa nouvelle réforme
Jamais deux sans trois. Alors que le système de l'assurance-chômage a déjà été réformé à deux reprises sous la présidence d'Emmanuel Macron, le Premier ministre, François Bayrou, a proposé, lors de la présentation, mi-juillet, de sa feuille de route pour le budget 2026, de nouvelles modifications concernant le périmètre du droit au chômage des Français.
Estimant qu'"il n'est pas normal qu'un pays comme le nôtre, avec autant d'emplois offerts, conserve un taux de chômage au-dessus de 7%", François Bayrou a annoncé son intention de lancer des négociations avec les partenaires sociaux sur ce sujet. Sans attendre, la ministre du Travail, Astrid Panosyan-Bouvet, a convoqué les acteurs de la discussion, syndicats en tête, pour une rencontre bilatérale, lundi 21 juillet. Une rencontre reportée par Force ouvrière (FO) et boudée par la CGT et la CFE-CGC. "Vu les annonces [de François Bayrou], on a décidé de ne pas donner suite. Nous ne sommes pas obligés d'aller écouter des foutaises", s'emporte Jean-François Foucard, secrétaire confédéral du syndicat en charge des parcours professionnels, contacté par franceinfo.
Une baisse de la durée maximale d'indemnisation
La CFTC a été le seul syndicat, avec la CFDT, à faire acte de présence pour échanger avec la ministre. "Durant cette rencontre, le gouvernement nous a présenté les deux leviers de la réforme ; un allongement du temps nécessaire de l'affiliation [les conditions nécessaires pour avoir des droits au chômage], et une réduction de la durée d'indemnisation", déroule Frédéric Belouze, chargé du dossier pour le syndicat des travailleurs chrétiens. Actuellement, un salarié doit avoir travaillé au moins six mois sur les vingt-quatre derniers mois pour prétendre à son indemnité chômage. Avec la proposition du gouvernement, il faudra en avoir travaillé huit sur les vingt mois précédant la rupture du contrat. La durée d'indemnisation maximale passerait alors à quinze mois, contre dix-huit actuellement, confirme l'entourage de la ministre du Travail à franceinfo.
Avec ces propositions, toujours en discussion, le gouvernement espère faciliter les recrutements dans les entreprises, pousser les demandeurs d'emploi à retourner sur le marché du travail et "éviter une amplification de la dégradation de la trajectoire financière de l'Unedic". Mais ces mesures doivent avant tout permettre de rapporter "entre 2 et 2,5 milliards d'euros pour la période 2026-2029, et 3 à 4 milliards d'euros d'économie à l'horizon 2030", selon le chiffrage des équipes de la ministre.
La rupture conventionnelle dans le viseur
Un dernier sujet brûlant pourrait être mis à la table des discussions : les conditions d'accès à l'assurance-chômage après une rupture conventionnelle. A ce sujet, l'instauration d'un délai avant le début de l'indemnisation est à l'étude, selon les informations de franceinfo.
De l'avis de tous les syndicats contactés, la proposition de réforme ressemble, sur plusieurs points, à celle portée par Gabriel Attal en juin 2024, lorsqu'il était Premier ministre, et dont l'application avait été suspendue face au tollé général, puis abandonnée après la dissolution de l'Assemblée nationale.
"Il s'agit d'une demande de négociation qui se fait uniquement sur le dos des personnes qui se retrouveraient au chômage, ce n'est pas possible."
Frédéric Belouze, chef de file sur les questions d'emploi et de chômage à la CFTCà franceinfo
Reste qu'à l'heure actuelle, l'ouverture des négociations sur cette réforme demeure particulièrement incertaine. A la CFDT, le terme de "carnage total" a été employé lundi par sa secrétaire générale, Marylise Léon, dénonçant un volume d'économies "qui n'a jamais été fait". "Nous sommes très réservés sur notre participation", prévient pour sa part la CFTC, qui se dit en désaccord avec l'analyse de sa trajectoire budgétaire du système : "On nous présente cette réforme comme une volonté de pérenniser les comptes de l'Unedic ; mais les comptes de l'Unedic vont très bien", s'insurge Frédéric Belouze.
"C'est absolument inacceptable, on va combattre [ce projet de réforme]", confirme également, auprès de franceinfo, la CGT, par la voix de Denis Gravouil, secrétaire confédéral en charge du dossier. Un front quasi unanime qui inquiète Eric Chevée, vice-président de la Confédération des petites et moyennes entreprises (CPME). En cas d'absence ou d'échec des négociations, "les acteurs sociaux risquent de ne plus avoir les commandes du régime entre les mains", anticipe-t-il dans les colonnes du Monde.
Et le calendrier reste serré. Les documents de cadrage devraient être envoyés à la fin du mois de juillet aux syndicats. Ils auront ensuite jusqu'au 15 novembre pour s'accorder, faute de quoi le gouvernement reprendra la main, en pouvant décider d'une réforme par décret.