« C’est tout simplement illégal » : La décision du duo Elon Musk – Donald Trump de supprimer l’agence américaine pour le développement soulève un tollé

Un cataclysme pour l’aide humanitaire. L’Agence américaine pour le développement international (USAID), qui gère des milliards de dollars d’aide à travers le monde via des programmes d’aide dans quelque 120 pays, va fermer de façon « irrémédiable », a annoncé, lundi 3 février, l’homme le plus riche du monde Elon Musk. Le milliardaire gourou de l’extrême droite, nommé par Donald Trump à la tête d’une « commission à l’efficacité gouvernementale » afin de s’attaquer à l’État fédéral, s’est targué d’avoir en la matière le soutien total du président des États-Unis.

Ce dernier a d’ailleurs lui-même estimé, dimanche 2 février, qu’USAID était « dirigée par une bande de fous extrémistes ». Elon Musk « ne peut pas et ne pourra pas » faire quoi que ce soit « sans notre accord », avait-il également assuré dans la foulée.

« C’est un abus de pouvoir corrompu »

« Ce n’est pas juste que le ver est dans le fruit (…) c’est sans espoir. Il faut se débarrasser de l’ensemble. C’est pour cela qu’elle doit disparaître. C’est irrémédiable », a renchéri Elon Musk lors d’une session vidéo sur X vers minuit heure de Washington lundi. Donald Trump « est d’accord que nous devrions fermer. (…) Je l’ai interrogé en détail et il a accepté que nous le fermions », a insisté le patron de Tesla et Space X.

Des propos qui font suite à des accusations toujours plus poussées relayées sur sa plateforme X depuis dimanche, où le milliardaire a lui aussi qualifié l’agence d’« organisation criminelle ». Il a ensuite osé alléguer, sans aucune preuve : « Saviez-vous qu’avec l’argent du contribuable, l’USAID a financé des recherches sur les armes biologiques, dont le Covid-19, qui a tué des millions de personnes ? »

Cette fermeture a indigné de nombreuses personnalités, notamment issues de la recherche ou de la politique. « Le président n’a pas l’autorité légale de l’abolir ou de la transférer unilatéralement au département d’État », ont écrit, lundi, dans un mémo Matthew Kavanagh et Luis Abinader, du Centre d’études des politiques publiques en matière de santé de l’université Georgetown. Ils ont évoqué « désastre pour la politique étrangère américaine ».

Le sénateur démocrate Chris Van Hollen a exprimé la même indignation : « C’est un abus de pouvoir corrompu. Ce n’est pas seulement un cadeau à nos adversaires, mais essayer de fermer l’Agence pour le développement international par décret est tout simplement illégal. »

« L’USAID aujourd’hui, qui sera le prochain »

Cette fermeture s’est néanmoins vite traduite concrètement. Les personnes employées par l’Agence ont reçu l’ordre par courrier électronique de ne pas se rendre à leur bureau lundi. Quelque 1 000 employés ou contractuels se sont retrouvés ainsi bloqués hors de leurs systèmes informatiques, a rapporté Devex, une plateforme spécialisée dans le développement.

Une décision insupportable, pour les personnes embauchées par l’USAID. Une cinquantaine d’entre elles a manifesté devant le siège de l’organisation à Washington avec des pancartes lisant : « Sauvez l’USAID, sauvez des vies » ou « L’USAID aujourd’hui, qui sera le prochain », a constaté un journaliste de l’Agence France-Presse. Un employé de l’USAID, qui a souhaité rester anonyme, a parlé, lundi matin, de « chaos total ».

D’autant que quelques heures après l’annonce de Musk, le secrétaire d’État américain, Marco Rubio, a annoncé, en déplacement au Salvador, la mise sous tutelle de l’agence. « Je suis le directeur par intérim de l’USAID », a-t-il déclaré aux journalistes, dénonçant « le niveau d’insubordination » au sein de l’organisme. S’il a indiqué que nombre de ses opérations seraient maintenues, il a l’accusé d’agir comme si elle était une « entité non gouvernementale indépendante ».

Le compte X d’USAID a été suspendu et son site internet est hors service, alors que plusieurs hauts responsables de l’agence ont été placés en congé administratif dès samedi soir.

Un gel de l’aide étrangère pour 90 jours

Cette fermeture n’est pas un coup de tonnerre dans un ciel serein. Dès son investiture le 20 janvier, Donald Trump avait gelé l’aide étrangère pour 90 jours, arguant d’un réexamen complet de celle-ci notamment pour traquer les programmes favorisant « la diversité ou l’avortement ».

Des exceptions pour l’Égypte, Israël et l’aide alimentaire d’urgence, avaient vite été annoncées par son secrétaire d’État, Marco Rubio. Devant le tollé et l’inquiétude suscitée dans les milieux humanitaires, Marco Rubio avait ensuite élargi ces dérogations à l’aide humanitaire essentielle comprenant les soins de santé, ou bien les médicaments. Mais le floue persiste sur des pans entiers d’aide.

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