Donald Trump prépare la guerre « totale » au droit à l’avortement, en mode camouflage
Décret après décret, Donald Trump abat toutes ses cartes avec l’aplomb d’un joueur de poker sûr de sa main. Il y a un sujet sur lequel, pourtant, il fait preuve d’une surprenante prudence : l’avortement. Aucune déclaration, aucun document paraphé : c’est, apparemment, le calme plat sur ce front où les groupes dits « pro-life » (« pro-vie ») et le Parti républicain ont remporté une victoire, en 2022, avec la décision de la Cour suprême de revenir sur l’arrêt Roe v. Wade de 1973 qui accordait une protection constitutionnelle au droit à l’avortement.
L’interdiction de la mifépristone
L’audition par le Sénat de Robert Kennedy Jr (RFK), pressenti par Donald Trump pour être le prochain secrétaire à la Santé, a pourtant dévoilé la stratégie « à bas bruit » de la nouvelle administration, à commencer par la pilule abortive.
Dans son projet 2025, véritable feuille de route pour l’administration Trump, la Heritage Foundation – think tank ultraconservateur – fait une priorité de l’annulation de l’approbation par la Food and Drug Administration (l’agence fédérale chargée de réguler notamment le marché des médicaments) de la mifépristone, prise dans la moitié des IVG médicamenteuses aux États-Unis. Or, Donald Trump a donné pour mission à Robert Kennedy Jr de se pencher sur les « questions de sécurité » liées à celle-ci.
« Le président Trump m’a demandé d’étudier la sécurité de la mifépristone. Il n’a pas encore pris position sur la manière de la réglementer. Dès qu’il le fera, je mettrai en œuvre ces politiques », a-t-il indiqué aux élus qui doivent valider sa candidature. La ficelle est grosse. « Alors que toutes les études crédibles montrent que le médicament est sûr et efficace », comme le rappelle la journaliste Jessica Valenti sur son blog, les groupes anti-avortement vont ressortir « des “recherches” trompeuses et fausses qui affirment que le médicament met en danger la santé et la vie des femmes ».
Trump pourra alors s’appuyer sur le principe « dans le doute, on s’abstient » pour tenter d’interdire la mifépristone. Saisie du sujet en avril 2023 après la décision d’un juge du Texas ordonnant le retrait de la pilule du marché fédéral du médicament, la Cour suprême avait décidé d’en maintenir l’accès.
La loi fédérale contre la volonté démocratique
Plus grave encore : RFK Jr a informé le Congrès que Donald Trump lui avait dit son intention « de mettre fin aux avortements tardifs ». Une formule suffisamment floue pour que s’y cache un loup, selon Jessica Valenti. « Pour moi, il s’agit d’une indication claire que Trump est ouvert à une interdiction nationale de l’avortement si elle est présentée comme restreignant les avortements “tardifs” », commente la journaliste.
Durant toute la campagne, Donald Trump avait adopté un profit bas sur ce sujet très sensible de la politique américaine. Pour une bonne raison : une majorité d’Américaines se déclare favorable au droit à l’avortement. Le 5 novembre, le camp « pro-choice » (« pro-choix ») a remporté sept des dix référendums d’initiative populaire, y compris dans certains bastions conservateurs. La stratégie des républicains de renvoyer aux États fédérés la question de l’exercice de ce droit se trouve ainsi (relativement) mise en échec. D’où le retour de l’idée d’une loi fédérale, à laquelle Trump avait promis de ne pas avoir recours.
Le journal des intelligences libres
« C’est par des informations étendues et exactes que nous voudrions donner à toutes les intelligences libres le moyen de comprendre et de juger elles-mêmes les événements du monde. »
Tel était « Notre but », comme l’écrivait Jean Jaurès dans le premier éditorial de l’Humanité.
120 ans plus tard, il n’a pas changé.
Grâce à vous.
Soutenez-nous ! Votre don sera défiscalisé : donner 5€ vous reviendra à 1.65€. Le prix d’un café.
Je veux en savoir plus !