Si Donald Trump excelle dans un domaine, c’est bien celui de l’inertie face au changement climatique, voire son aggravation. À l’occasion de son premier discours devant le Congrès depuis son retour à la Maison Blanche, il a évoqué « un immense projet de gazoduc en Alaska, parmi les plus grands au monde, dans lequel le Japon, la Corée et d’autres nations pourront être nos partenaires. Tout est prêt », a-t-il assuré.
À rebours de la transition hors des énergies fossiles, décision de rigueur en vertu du consensus de Dubaï signé – y compris par les États-Unis – en 2023 à la COP28 dans le but de limiter le réchauffement planétaire, le leader nationaliste est prêt à tout pour relancer l’extractivisme sur le sol états-unien, se dit-il au nom d’une prétendue « urgence énergétique ».
Direction Anchorage
On l’appelle « Alaska LNG ». Ce projet consiste à acheminer de vastes réserves de gaz naturel situées au nord de l’Alaska, du côté de la baie de Prudhoe et de Point Thomson, vers le sud de l’État, près d’Anchorage, sur près de 1 300 km de long.
Plus de 100 millions de mètres cubes de gaz pourraient ainsi être transportés chaque jour, destinés à être ensuite liquéfiés (GNL), puis transportés à bord de méthaniers en direction de l’Asie. Bien que cette ambition soit complètement anachronique, elle se veut être le nouveau trophée du républicain. Un énième moyen de prouver au monde la grandeur énergétique et économique des États-Unis et donc, sa domination sur ses alliés.
L’idée de construire un gazoduc en Alaska ne vient néanmoins pas de son nouveau promoteur. Elle remonte à 1967, date de la découverte de larges réserves de gaz et de pétrole sur la côte nord de l’État. Un premier projet de ce type avait vu le jour à la fin des années soixante-dix, mais il a finalement été abandonné.
Ressorti des cartons par Sarah Palin, la gouverneur ultra-conservatrice de l’Alaska dans les années 2000 – qui deviendra ensuite l’égérie du Tea Party, le projet a attiré l’oeil de grands groupes pétroliers, tels que BP, ExxonMobil, ou encore le géant russe Gazprom, avant d’être, une fois de plus, délaissé pour des motifs financiers.
Voilà que le président états-unien le relance plein gaz, désormais soutenu par le groupe américain Glenfarne, pour une hypothétique mise en circuit à partir de 2030. Le coût total de l’affaire est pharaonique : 41 milliards d’euros. En Asie, plusieurs pays ont manifesté leur intérêt, à l’image des Philippines.
Début février, dans le cadre d’une rencontre à Washington avec le premier ministre japonais, Shigeru Ishiba, Donald Trump avait assuré que l’archipel nippon s’engagerait à acheter « des quantités records » de gaz naturel états-unien. Dans un communiqué, le ministère des Affaires économiques de Taïwan a fait savoir que sa société d’hydrocarbures publique « continuera à évaluer la faisabilité et est prête à augmenter ses achats ». Enfin, la Corée du Sud a également annoncé des discussions avec son homologue de l’autre côté du Pacifique à ce sujet.
Le règne de l’affabulateur
Le locataire du Bureau ovale le certifie : tous ces États auraient promis de réaliser « des investissements de milliers de milliards de dollars chacun ». Comprenez : un nouvel eldorado énergétique s’ouvre dans mon pays, l’argent va couler à flots. Sauf qu’en pratique, ces déclarations tonitruantes s’apparentent plus à des affabulations, chose à laquelle il nous a d’ailleurs souvent habitué. Malgré ses dires, aucun de ces gouvernements étrangers n’a, pour l’heure, fait d’annonces concrètes en ce sens. Surtout, contrairement à ce qu’il laisse penser, Donald Trump n’a pas totalement les mains libres sur l’exploitation des énergies fossiles aux États-Unis.
Bien qu’il ait, dès son retour au pouvoir, signé un décret présidentiel pour annuler l’interdiction de nouveaux forages maritimes, décision prise par son prédécesseur Joe Biden à la veille de son départ, cette manœuvre pourrait échouer. Certaines associations de défense de l’environnement ont récemment saisi la justice, estimant que le président républicain ne pouvait revenir sur cette interdiction sans l’aval du Congrès.
C’est que Donald Trump est coutumier du fait. Déjà, en 2019, durant son premier mandat, un juge fédéral de l’Alaska avait justement déclaré illégale sa décision de lever une interdiction de forages pétrogaziers dans l’Atlantique et dans l’Atlantique promue par Barack Obama. En ce qui concerne Alaska LNG, sa faisabilité reste à prouver, même si selon les déclarations de l’intéressé, les permis auraient été obtenus pour lancer l’opération.
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